Les albanais du Kosovo rejettent les conditions de Belgrade

Les Albanais du Kosovo ont rejeté les conditions de Belgrade à un dialogue, excluant toute autre solution que l’indépendance de leur province, cela au moment où le président yougoslave Slobodan Milosevic était soumis à une pression internationale croissante. Le gouvernement serbe avait invité mardi les responsables albanais du Kosovo à «un dialogue (...) sur toutes les questions dont dépend la réalisation des droits de l’homme» dans cette province du sud de la Serbie. Il a souligné toutefois qu’il ne traiterait de ces questions qu’«en accord avec la Constitution» de la Serbie. Le dirigeant des Albanais Ibrahim Rugova a répondu mercredi en affirmant qu’«une solution politique dans le cadre de la Yougoslavie n’est pas une solution». «Une autonomie ne serait que source de nouveaux conflits», a-t-il déclaré alors même que Belgrade exclut d’octroyer au Kosovo quelque forme d’autonomie que ce soit. La revendication d’indépendance est rejetée par la communauté internationale, qui préconise l’octroi au Kosovo d’un statut qui lui garantisse un haut degré d’autonomie dans le respect de l’intégrité territoriale de la République fédérale de Yougoslavie (RFY). M. Rugova s’est toutefois dit favorable à «un dialogue sans condition (avec Belgrade) assorti d’une médiation» internationale, ce que les autorités serbes ont refusé jusqu’à présent en estimant que le Kosovo est une «affaire intérieure». A Tirana, Tony Lloyd, secrétaire d’Etat britannique aux Affaires étrangères, mandaté par l’Union européenne, a averti M. Milosevic qu’il encourrait une «action» internationale s’il ne prenait pas dans les dix jours une série de mesures pour désamorcer la crise du Kosovo. M. Lloyd, qui s’est rendu dans l’après-midi, en Macédoine, où vit une importante minorité albanaise, a rencontré dans la soirée à Belgrade le ministre yougoslave des Affaires étrangères Zivadin Jovanovic. Environ 80 Albanais ont été tués dans des affrontements avec la police serbe depuis le 28 février dans la région de Drenica. Dans le village de Prekaz, une cinquantaine de ces victimes qui avaient été ensevelies mardi sur ordre de la police serbe ont été exhumées mercredi par leurs familles qui les ont enterrées selon le rite musulman. Le Comité international de la Croix-Rouge et la Fédération des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ont retiré provisoirement leurs délégués du Kosovo après que ceux-ci eurent reçu des appels anonymes les menaçant de mort. M. Rugova a encore indiqué que les Albanais étaient déterminés à tenir leurs propres élections mais a laissé entendre que celles-ci, convoquées pour le 22 mars, pourraient être reportées: «La situation est extrêmement grave ces jours-ci et nous allons arrêter notre position sous peu, peut-être dès jeudi» (aujourd’hui), a-t-il dit.