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Actualités - ANALYSE

Joumblatt : une réaction somme toute utile

Personne n’a jamais contesté à Walid Joumblatt la palme de la singularité. Aujourd’hui moins que jamais on peut lui reprocher de suivre béatement le courant ascendant. Seul de tous les taëfistes il s’élève contre l’avènement de Lahoud compris en tant que militaire. Une décision qui n’est pas facile à assumer, ainsi qu’il le laisse entendre quand il proclame que «nul [et ce «nul» on sait bien qui c’est] ne peut forcer le Parti socialiste progressiste et Walid Joumblatt à voter pour ce candidat». Et de préciser qu’il n’assistera ni à l’amendement de l’article 49 ni à la séance d’élection. Ce qui reste quand même un peu mieux, vu sous l’angle des loyalistes, que d’être présent pour voter contre. «Il est évident, et il l’a laissé d’ailleurs entendre qu’à part prendre date pour le principe, M. Joumblatt adopte une position de refus qui est de nature négociatoire» estime un politicien. «C’est systématique chez le leader du PSP: chaque fois qu’il y a un nouveau gouvernement en vue, il rue dans les brancards. Pour qu’on ne l’oublie pas à l’heure de la distribution…», ajoute ce contempteur. Et pour cette personnalité «l’enseignement le plus troublant à tirer de l’attitude «classique» de M. Joumblatt est qu’il a tout l’air de croire que rien dans la praxis politique ne va changer, qu’on va continuer à partager le gâteau et que le système de la troïka va être reconduit». Ce serait en effet tout à la fois grave et étonnant, car on voit mal le général Lahoud admettre un tel système et c’est bien pourquoi d’ailleurs il fait presque l’unanimité. Trois tests Il reste que, pour un ancien ministre de l’ouest, «plutôt qu’autre chose, il faut voir dans la réaction de M. Joumblatt un signe de bonne santé démocratique et la preuve que les décideurs semblent résolus à laisser le jeu se faire librement…» En tout cas, ils ont tranché. Et cela permet à la livre de se redresser, tandis que la phase de transition est consacrée à préparer une passation des pouvoirs en douceur. L’accent sera tout particulièrement mis sur la démocratie, pour gommer toute impression d’irruption de l’armée dans la politique. Comme pour compenser la désinvolture de la proclamation du choix fait à Damas, les spécialistes du théâtre politique local fignolent un cérémonial, un scénario parfaits avec une élection qui aurait tout l’air d’un plébiscite et des discours aussi vibrants pour accueillir le nouveau régime qu’émouvants pour saluer le partant. Les Libanais, scotchés à leur télé qui va tout couvrir, vont pouvoir se régaler. Sur le plan des qualifications, personne, répétons-le, ne trouve rien à redire au général Lahoud que les évêques maronites accueillent favorablement, malgré leurs réserves que la façon dont il a été choisi. Tout le monde souligne que l’homme a réussi à réhabiliter vraiment l’armée, à en faire une institution étatique solide et paradoxalement civile, dans ce sens qu’elle est à peu près la seule à ne pas être rongée par les virus du confessionnalisme et du clientélisme. Il lui faudra maintenant transposer cette même expérience au plan national global, et c’est sans doute plus difficile. Mais si tout le monde fait preuve de bonne volonté, la réussite sera assurée. D’une façon générale, il est donc bon de se montrer positif. Pour contribuer ainsi à l’effort de redressement que le général promet d’engager. Il se trouvera d’entrée de jeu confronté à trois tests: la formation du nouveau gouvernement bien sûr, mais aussi sa propre succession à la tête de l’armée et enfin le pourvoi des postes administratifs vacants de première catégorie.
Personne n’a jamais contesté à Walid Joumblatt la palme de la singularité. Aujourd’hui moins que jamais on peut lui reprocher de suivre béatement le courant ascendant. Seul de tous les taëfistes il s’élève contre l’avènement de Lahoud compris en tant que militaire. Une décision qui n’est pas facile à assumer, ainsi qu’il le laisse entendre quand il proclame que...