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Actualités - REPORTAGE

Des produits libanais pourraient un jour bénéficier de la mention appellation d'origine contrôlée

La mention Appellation d’origine contrôlée (AOC) sur un produit identifie un produit typique et spécifique dont le caractère est lié à son origine géographique. Les produits reconnus en Appellations d’origine contrôlée sont l’expression d’un lien intime entre une production et un terroir, le tout mis en œuvre et perpétué par des hommes doués d’un savoir-faire. L’application des principes des AOC vise à protéger tant le produit que le producteur. Elle contribue à fixer au sol les agriculteurs et à créer une valeur ajoutée à leurs produits identifiés, grâce à des procédés traditionnels liés à leur terroir, qu’ils sont les seuls à connaître. Cette identification à l’origine de la notoriété du produit créera une importante demande et générera une valeur ajoutée du produit. Aussi faut-il souligner que les AOC représentent seulement une alternative de production agricole. Il faut continuer à fabriquer des produits de consommation industrielle de masse dont les prix seront accessibles à toutes les catégories sociales. Dans le domaine des Appellations d’origine contrôlée, l’expérience française est à retenir. Dans ce pays, l’Institut national des appellations d’origine (Inao) a été institué il y a une soixantaine d’années, par le décret-loi du 30 juillet 1935 modifié par la loi du 2 juillet 1990. Le rôle de l’Inao dans la protection des appellations d’origine contrôlée a été réaffirmé en France en 1990 lors de l’extension des compétences de l’Institut à l’ensemble des produits agricoles bruts ou transformés et des denrées alimentaires. Depuis jeudi soir, le vice-président de cet établissement public français, M. René Renou, est à Beyrouth dans le cadre d’une visite de trois jours à l’invitation du syndicat des industriels de l’agroalimentaire que préside M. Atef Idriss et de l’Union libanaise de la vigne et des produits vinicoles et en coopération avec la Chambre de commerce franco-libanaise. Au cours de son séjour, M. Renou tentera, avec les organismes concernés privés et publics libanais, de dresser un inventaire des instruments pratiques susceptibles de constituer une plate-forme de travail pour identifier à l’avenir les produits agroalimentaires méritant des mentions d’AOC. Toujours est-il que ce processus est un processus permanent de longue haleine. Droit des appellations Pour M. Renou, le droit des appellations, reconnu en tant qu’élément de la propriété intellectuelle au même titre que les marques et brevets, est un volet de la vie des affaires où il convient de brider et corriger ceux qui ne respectent pas les «us et coutumes», et qui tenteraient de s’approprier illégalement le capital d’autrui et perturberaient le marché. Protéger les noms d’appellations d’origine contrôlée, c’est protéger tout le système d’appellations d’origine, un édifice fait le plus souvent de culture et d’histoire et dont les bénéfices sont autant de nature sociale qu’économique. «Il n’y a rien qui ressemble plus à un verre de vin rouge qu’un autre vin rouge. Il n’y a rien qui ressemble plus à une tomate qu’une autre tomate. Pourtant, le système des appellations d’origine contrôlée français fait la démonstration de l’inverse», dit M. Renou. «Le jour où, dans la plaine de la Békaa, je délimiterai un terroir sur lequel des agriculteurs se rassembleront sur une production déterminée avec des conditions de production qui s’imposeront à tous, une caractéristique gustative imprimera la tomate ou le vin rouge qui fait que personne d’autre dans le monde ne pourrait le faire. A ce moment-là, le viticulteur et le producteur de la plaine de la Békaa pourront commencer à créer une valeur ajoutée à leur produit. Et la mémoire du consommateur étranger se rappellera ce goût original et exceptionnel qu’il a trouvé dans la tomate ou le vin qui vient de la Békaa et paiera le prix pour l’obtenir», ajoute-t-il. Et de poursuivre:«Il faut mettre en lumière l’expression originale du terroir en rassemblant les producteurs qui exploitent la terre de la Békaa et en les mettant d’accord sur des conditions de production qui vont s’imposer à tous. Dans le cas de l’application du système des AOC, on dépasse la technologie moderne qui vise à faire des produits standards qui ressemblent à tous les autres, pour en faire un produit qui s’appuiera sur la tradition, le savoir-faire et mettra en lumière cette différence par rapport aux autres tomates ou autres vins rouges». Imiter et non contrefaire La mention AOC met en fusion trois éléments: la terre, qui est le climat et les caractéristiques du sol; la variété végétale ou animale qui sera étroitement liée au terroir et le savoir-faire et la tradition. «Ces trois éléments vont créer une telle différence sur le goût du produit portant la mention AOC que le monde entier pourra l’imiter mais ne pourra jamais le contrefaire», affirme le vice-président de l’Inao. Cette valeur ajoutée va rester au producteur en totalité; le cas échéant, il la partagera avec le commerçant ou le négociant. Il en gardera cependant la plus forte partie parce qu’il est propriétaire de ce produit original. «Ce résultat ne pourra se faire que parce qu’il y a une copropriété entre tous les producteurs qui protégeront et défendront l’identité de leur production sur leur terroir», ajoute M. Renou. «S’il n’y a pas de triche ni de fraude parce que le consommateur s’en rendrait compte, la tomate française vaudra 10 L.L. sur le marché libanais alors que la tomate de la Békaa vaudra 1.000 L.L. Le consommateur voudra quand même celle de la Békaa puisqu’elle sera la seule à lui donner ce goût particulier», dit-il. «Pour les produits portant la mention AOC, le prix n’a plus d’importance, c’est la qualité originale du produit qui commandera la demande». Standardisation mondiale «Le principe des appellations d’origine a été défini en France depuis une soixantaine d’années pour protéger tant les produits que les producteurs», dit M. Rodolphe el-Kareh, secrétaire général de la Chambre de commerce franco-libanaise, avant de souligner que «les producteurs ont participé à l’élaboration de la série de lois et règlements régissant le système des appellations d’origine sans lesquels des secteurs entiers concernant la production laitière ou vinicole auraient complètement disparu en France et le marché aurait été inondé par ce qu’on appelle les produits de fabrication industrielle». M. el-Kareh affirme qu’il existe dans le monde aujourd’hui une réaction à la standardisation industrielle par le retour à la spécificité et à la qualité des produits du terroir avant de souligner qu’il ne s’agit pas pour le Liban de copier les structures de l’Inao mais, en partenariat avec cet institut français, de bénéficier de l’expérience française vieille de 60 ans pour inventer «un Inao libanais». «Les critères qui commandent les AOC en France ne peuvent s’appliquer en bloc au Liban», dit-il. Il prend l’exemple de la fabrication de l’arak dans la composition duquel intervient l’anis vert de Damas. Il s’agit, dit-il, d’un cas spécifique au Liban qu’il faut traiter particulièrement et donc trouver la formule qui convient pour certifier une appellation d’origine contrôlée de ce produit. «La création d’un institut pour la protection des Appellations d’origine contrôlée au Liban est devenue indispensable pour protéger le producteur libanais et activer le marché de l’exportation», déclare M. Atef Idriss, président du syndicat des industriels de l’agroalimentaire. «La création d’une firme de produits laitiers portant le label des produits laitiers Chtaura à Dubaï est une pure hérésie. Les produits Chtaura sont des produits qui puisent leur spécificité de leur origine géographique: c’est le terroir au sens large intégrant les composantes géologiques, pédologiques, climatiques, techniques et humaines», souligne-t-il.
La mention Appellation d’origine contrôlée (AOC) sur un produit identifie un produit typique et spécifique dont le caractère est lié à son origine géographique. Les produits reconnus en Appellations d’origine contrôlée sont l’expression d’un lien intime entre une production et un terroir, le tout mis en œuvre et perpétué par des hommes doués d’un savoir-faire. ...