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Actualités - ANALYSE

Présidentielle Le Liban entre cette semaine dans la dernière ligne droite jusqu'à l'élection Malgré l'émergence du nom du général Lahoud, les perspectives demeurent obscures

Le Liban entrera cette semaine dans la dernière ligne droite devant mener, en principe, à l’élection d’un nouveau président de la République ou à une nouvelle prorogation du mandat actuel. Jusqu’ici, les perspectives demeurent obscures, les gesticulations «électorales» de la classe politique tenant davantage du théâtre d’ombres que d’une véritable campagne. C’est, en effet, le jeudi 24 septembre que commence à courir le délai constitutionnel d’un mois au cours duquel l’élection doit avoir lieu (voir encadré sur l’article 73 de la Constitution). Mais le véritable point de départ du processus électoral pourra se situer dès la tenue du sommet entre les présidents Elias Hraoui et Hafez el-Assad prévu pour bientôt. On estime dans les milieux politiques que cette rencontre au plus haut niveau donnera l’occasion de révéler au grand jour ce qui a été concocté jusqu’ici entre la Syrie, d’une part, et les présidents Rafic Hariri et Nabih Berry de l’autre. Depuis la visite du président de la Chambre, mercredi dernier, à Damas, et son entretien de plusieurs heures avec le chef de l’Etat syrien, le nom du commandant en chef de l’armée, le général Emile Lahoud, revient avec insistance en tête de la liste des présidentiables, une liste qui, il est vrai, ne présente aucun caractère formel et comporte des noms de «candidats» virtuels, comme les ministres Michel Eddé ou Jean Obeid. On sait qu’au cours de l’audience qu’il a accordée à M. Berry, M. Assad a fait l’éloge du commandement de l’armée et de son chef. On sait par ailleurs que le premier ministre Rafic Hariri a amorcé dernièrement un rapprochement avec le général Lahoud, qu’il a d’ailleurs rencontré le même jour dans une ambiance qualifiée de «cordiale». Ce développement marque un changement fondamental en faveur du commandant en chef de l’armée, dans la mesure où, si ce rapprochement se confirmait, il serait ainsi débarrassé du handicap qui était le sien il y a trois ans, à savoir l’hostilité déclarée du chef du gouvernement. Une prorogation n’est pas exclue La discrétion observée dans les milieux de M. Berry depuis son retour de Damas relativise toutefois ces éléments, sauf à considérer, comme l’induisent ces mêmes sources ainsi que les déclarations faites ces derniers jours par de nombreux responsables, qu’on a voulu, par égard pour M. Hraoui, lui laisser la primeur de l’affaire. D’où l’importance du sommet prochain libano-syrien. Une éventuelle élection du général Lahoud suppose, comme on le sait, l’amendement au préalable de l’article 49 de la Constitution, tout comme une prorogation du mandat de M. Hraoui (VOIR ENCADRÉ SUR L’ARTICLE 49). En dépit des positions affichées du chef de l’Etat, cette dernière option ne semble pas tout à fait écartée, du moins pour des raisons tactiques. Un député sunnite du Nord, Jihad Samad, reçu jeudi à Baabda, a fait à cet égard une intervention remarquée en déclarant à sa sortie du palais présidentiel que M. Hraoui «ne reculerait pas si on lui demandait de rester au pouvoir». Du côté des candidatures déclarées, qui, dans la conjoncture libanaise, sont toujours qualifiées de «peu sérieuses», celle du député de Batroun Boutros Harb fait figure d’exemple civique et démocratique. L’intéressé lui-même ne se berce pas trop d’illusions pour ce qui est de ses chances de succès, déclarant mener une «bataille de principe», et reconnaissant «l’influence déterminante de l’électeur syrien». Le comble de l’ironie serait que M. Harb se fasse quand même élire, non pour avoir mené une bonne campagne, mais pour être jugé conforme – éventuellement – aux critères recherchés par les tuteurs. C’est autour de ces critères – ou qualités présidentielles – que se déroule la véritable bataille. Certes, tout le monde veut un président «propre» et beaucoup le souhaitent «fort», sans pour autant que tous ne donnent la même signification à ce terme. Pour l’opposition chrétienne, ainsi que pour le patriarche maronite, cela veut dire qu’il ne soit pas inféodé à l’étranger, mais aussi que l’opinion libanaise ait son mot à dire dans le processus électoral. Pour d’autres, cela veut dire simplement que le prochain président doit être en mesure d’assumer au mieux son rôle de chef d’Etat face aux autres pôles du pouvoir, tout en demeurant attaché à l’équation politique actuelle, notamment sur le plan des relations avec la Syrie. D’où la polémique sur les attributions constitutionnelles du président. Les contradictions de la classe politique L’attitude de M. Hariri illustre les contradictions de la classe politique dirigeante à ce propos. Le chef du gouvernement avait lui-même ouvert il y a quelques mois le débat en insistant notamment sur le fait que le prochain président de la République devrait être davantage représentatif de sa communauté. Ces propos avaient à l’époque profondément irrité M. Hraoui à qui le premier ministre semblait reprocher de ne pas l’avoir été suffisamment. Mais M. Hariri n’est pas sans savoir qu’un président maronite «fort» et «représentatif» ne saurait se cantonner dans un rôle de faire-valoir. Or, le premier ministre s’évertue dans le même temps à donner une interprétation restrictive des prérogatives conférées par la Constitution de Taëf au chef de l’Etat, en insistant notamment sur le fait qu’il fait partie intégrante du pouvoir exécutif, et qu’à ce titre, il ne peut jouer un rôle d’arbitre entre les pouvoirs. Au-delà de cette contradiction, le véritable enjeu, qui ressemble au problème de la quadrature du cercle, est plus que jamais le suivant: où trouver un maronite qui puisse à la fois rassurer sa communauté et les chrétiens en général, les sortir de leur léthargie politique, les réconcilier avec l’Etat et poursuivre une politique de «relations privilégiées» avec la Syrie et d’équilibre avec les autres pouvoirs?
Le Liban entrera cette semaine dans la dernière ligne droite devant mener, en principe, à l’élection d’un nouveau président de la République ou à une nouvelle prorogation du mandat actuel. Jusqu’ici, les perspectives demeurent obscures, les gesticulations «électorales» de la classe politique tenant davantage du théâtre d’ombres que d’une véritable campagne. ...