Les iraniens se mobilisent contre les taliban

Les Iraniens se sont mobilisés vendredi pour exprimer leur haine envers les taliban, alors que leurs dirigeants ont appelé la communauté internationale à rompre le silence devant les «crimes» commis par cette milice en Afghanistan. Aux cris de «Mort aux taliban, mort au Pakistan et mort à l’Amérique», plusieurs dizaines de milliers de personnes, dont des soldats, des jeunes, des femmes en tchador noir et des enfants, ont manifesté dans les rues de Téhéran. «Les taliban, ces valets de l’Amérique, commettent des crimes et les Etats-Unis les soutiennent», criaient des groupes de manifestants sur la grande rue d’Enghelab (révolution) près de l’université de Téhéran. Portant des portraits des dirigeants iraniens et des pancartes hostiles aux taliban, ils ont dénoncé le Pakistan en le qualifiant de «menteur» et d’être «le commanditaire de la bande moyenâgeuse des taliban». «Ils (les Pakistanais) mentent en disant qu’ils ne soutiennent pas les taliban», ont affirmé plusieurs jeunes manifestants rassemblés devant des journalistes de la presse internationale. Les manifestants ont convergé ensuite devant l’université de Téhéran où ils ont participé aux obsèques officielles de six diplomates et du journaliste de l’agence IRNA tués le 8 août par les taliban au consulat iranien à Mazar-i-Sharif, dans le nord de l’Afghanistan. Le Guide de la république islamique, l’ayatollah Ali Khamenei, ainsi que des hauts dignitaires du régime étaient également présents pour saluer les «sept martyrs de l’islam», après la prière hebdomadaire musulmane. Au total, huit diplomates ont été tués par les taliban, mais seuls les corps de six d’entre eux ont été rapatriés en Iran. Tragédie humaine Le président du Parlement iranien Ali Akbar Nategh-Nouri, qui a participé à la manifestation et à la prière, a demandé à la communauté internationale de «rompre le silence» devant «les crimes» des taliban. «Nous demandons à tous les pays, et surtout à l’ONU, de rompre le silence, de prendre des mesures concrètes et de traiter les taliban comme des criminels de guerre», a-t-il dit, ajoutant: «Le monde ne doit pas mal interpréter notre patience devant ce qui se passe en Afghanistan». De son côté, le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, M. Mahmoud Mohammadi, a mis en garde sur Radio-Téhéran contre «l’imminence d’une tragédie humaine» en Afghanistan. Des manifestations hostiles aux taliban se sont déroulées également dans la plupart des autres grandes villes d’Iran, à l’appel des autorités et du clergé chiite qui accusent la milice sunnite de se livrer «au massacre systématique des chiites» d’Afghanistan. L’Iran a menacé de venger la mort de ses ressortissants par les taliban, tout en affirmant qu’il «agirait en respectant les intérêts de l’islam, de la région et du pays». «Bien sûr, avant toute chose, nous pensons aux intérêts de l’islam, de la communauté islamique, de notre pays et de notre peuple», a déclaré le chef du Parlement interrogé sur les prochaines manœuvres militaires iraniennes prévues près de la frontière irano-afghane. Les autorités iraniennes accusent en outre le Pakistan de soutenir les taliban dans leurs actions en Afghanistan. La tension entre Téhéran et Islamabad a été confirmée par l’accueil particulièrement froid réservé jeudi au ministre pakistanais des Affaires étrangères Sartaj Aziz. Contrairement aux usages, le chef de la diplomatie, qui était porteur d’un message du premier ministre Nawaz Sharif au président iranien Mohammad Khatami, n’a pas été reçu par ce dernier. Parallèlement à la mobilisation de l’opinion publique iranienne contre les taliban, des mouvements massifs de troupes et des activités militaires logistiques sont en cours aux abords de la frontière afghane. Sur le plan diplomatique, une réunion ministérielle réunissant les six voisins de l’Afghanistan ainsi que les Etats-Unis et la Russie est prévue lundi à New York sous l’égide de l’ONU.