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Actualités - COMMUNIQUES ET DECLARATIONS

Dénonçant la corruption, le suivisme, la mauvaise gestion, les atteintes aux libertés ... La CGTL engage la bataille des revendications avec le gouvernement

La Confédération générale des travailleurs au Liban (CGTL) a fait le procès du gouvernement, lui faisant assumer la responsabilité de la crise économique et sociale qui secoue le pays et remettant en cause la plupart des orientations appliquées depuis l’arrivée au pouvoir du président Rafic Hariri. Renouant avec ses anciens discours incendiaires, la CGTL a développé une série de revendications à caractère économique et social, mais aussi politique, réclamant notamment l’annulation de l’interdiction de manifester, le renforcement de l’indépendance de la justice, la réactivation du processus de retour des déplacés et la défense des libertés de la presse. C’est le président de la CGTL, M. Elias Abou Rizk, un farouche opposant à la politique de M. Hariri, qui a lu à la presse le rapport élaboré par le comité exécutif de la centrale à l’issue d’une réunion hier. Selon le rapport, «la crise socio-économique est amplifiée par les lacunes du système politique, notamment le confessionnalisme, la corruption, le suivisme, le tribalisme et la mauvaise gestion, au détriment des valeurs de la démocratie, de la citoyenneté et des lois». «La lutte contre ces problèmes est souvent un prétexte pour commettre des atteintes contre la démocratie et la liberté qui constituent les principaux piliers de la patrie, a ajouté M. Abou Rizk. La répression s’intensifie, le pouvoir de la loi recule et les institutions s’affaiblissent, ce qui a des répercussions importantes non seulement sur la stabilité de l’Etat, mais aussi sur tous les indices économiques et sociaux. Au nom de la reconstruction et sous les prétextes de la modernité et des principes de la mondialisation défendue par le libéralisme sauvage, on a vu naître beaucoup de concepts nuisibles: la privatisation et la vente d’institutions publiques au secteur privé, l’inféodation aux trusts financiers et l’acceptation d’une logique infondée selon laquelle les secteurs productifs industriels et agricoles sont inaptes. Les efforts étaient concentrés sur la création de taxes lourdes imposées aux travailleurs, aux personnes aux revenus limités et aux consommateurs, alors que l’impôt direct a été réduit sous prétexte de ne pas porter atteinte aux investissements». Le leader syndical a indiqué que toutes ces orientations ont provoqué de nombreux problèmes sociaux et économiques dont voici certains exemples: — La récession s’accentue après une période de croissance accompagnée d’une augmentation des investissements et d’une amélioration relative de la situation des consommateurs. Les experts pensent que la croissance sera nulle cette année après avoir été de 8% en 1994, 6,5% en 1995, 4% en 1996 et 4% en 1997, selon les chiffres officiels. En dépit d’une croissance nominale, le produit national brut (PIB) n’atteint que les deux tiers de celui de 1974. — La récession touche en particulier les secteurs productifs alors que le secteur des services connaît une croissance qui ne se répercute pas sur l’ensemble de l’économie. La production industrielle stagne malgré une augmentation des capitaux et l’agriculture vit une crise difficile: les récoltes s’amoncellent en l’absence de toute protection ou facilité accordée à ce secteur. Les petites entreprises n’ont reçu aucune aide en dépit des promesses répétées de créer des entreprises de crédits. Accroissement du déficit et de la dette — Le processus de reconstruction avance très lentement. Les dépenses se concentrent sur des secteurs improductifs, alors que l’exécution des projets à caractère social est ajournée. — Le déficit s’est considérablement accru ces dernières années et a atteint en 1997 59% des dépenses (51,1% en 1996, 48,2% en 1995, 38,5% en 1993). Cela a suscité des réserves internationales qui ont abouti à l’octroi au Liban d’un indice de classification négatif. Et si le déficit est en recul cette année, ce qui constitue un point positif, cela s’est fait au détriment de la majoration des salaires des fonctionnaires qui n’ont pas été réajustés depuis 1995 et d’une avalanche de taxes indirectes et d’impôts injustes, notamment les tarifs douaniers qui ont augmenté de 22% entre juillet 97 et juillet 98. — La dette publique s’amplifie dangereusement (24768 milliards de livres) et dépasse la ligne rouge représentée par les chiffres les plus optimistes. Le service de la dette constitue le double du coût de l’échelle des salaires. — Des impôts susceptibles de drainer des recettes très importantes sont ignorés par le gouvernement: l’impôt sur les biens maritimes et fluviaux peut rapporter 350 milliards par an. D’un autre côté, le gouvernement refuse avec entêtement d’augmenter les impôts sur le revenu et sur le bénéfice (qui peut rapporter sûrement des centaines de milliards de livres). — Le tissu social se déchire, les classes moyennes glissent vers la pauvreté et les revenus de la plupart des Libanais baissent. Toutes les études, mêmes celles qui sont élaborées par des institutions officielles, indiquent que le taux de paupérisation augmente. L’étude appelée «la situation des familles en 1997» préparée par la direction centrale des statistiques précise que 60,9% des familles ont un revenu inférieur à 1,2 million de livres (5,8% inférieur à 300.000 livres, 18,8% inférieur à 500.000, 39,8 inférieur à 800.000 livres). Les salaires doivent être augmentés de 86% pour que le pouvoir d’achat soit semblable à celui de 1992. Pendant ce temps, le processus de retour des déplacés qui revêt une importance nationale, est suspendu, le chômage est en hausse (15%) et les permis de travail accordés aux étrangers augmentent alors que l’ouvrier libanais ne jouit pas de la protection nécessaire. De cela résulte une recrudescence des problèmes sécuritaires, notamment les vols. Pendant ce temps, les prisonniers, notamment ceux qui sont en attente de jugement, subissent un traitement inhumain. «Face à cette situation, la CGTL avance un programme revendicatif complet que ne peut résumer qu’un seul mot: le changement», a déclaré M. Abou Rizk. Le chef de la centrale syndicale a indiqué que le programme revendicatif s’articule autour des points suivants: Sur le plan de la politique générale: — L’attachement absolu aux libertes publiques qui constituent un droit humain et une valeur nationale. — La défense des libertés syndicales et le rejet de toute ingérence de la part du pouvoir dans les affaires des syndicats. — La protection des libertés de la presse, notamment les médias audiovisuels, et l’arrêt de la politique du partage des parts. — L’annulation de la décision d’interdire les manifestations et le respect de la liberté d’expression et d’opinion. — L’engagement à bâtir l’Etat de droit, des institutions et de la justice, qui passe par le renforcement des organes de contrôle et l’arrêt de la destruction systématique de l’administration. — La lutte contre la corruption politique et administrative en commençant par la mise en œuvre de la loi sur l’enrichissement illicite. — Réactiver le processus de retour des déplacés et garantir l’indépendance de la justice. L’économie Sur le plan de l’économie: — Mettre un terme à la politique de privatisation qui porte atteinte aux intérêts de la patrie et des citoyens et stopper la vente des biens de l’Etat. — Réviser la politique de reconstruction de manière à revoir les priorités en insistant davantage sur l’aspect humain et en appuyant les secteurs productifs, notamment l’industrie et l’agriculture. — Elaborer un plan visant à encourager les petites et moyennes entreprises et le secteur artisanal et soutenir les agriculteurs, les pêcheurs et les esprits créatifs. — Réexaminer l’action des différents conseils et caisses autonomes en les rattachant aux ministères concernés grâce à un cadre flexible. — Créer un organe visant à rationaliser les dépenses gouvernementales. — Mettre au point une véritable politique d’austérité en commençant par le sommet et arrêter le gaspillage qui engloutit 15% du budget. — Limiter la politique d’endettement, notamment à l’étranger, qui risque d’hypothéquer le pays, son avenir et sa libre décision. — Réduire les intérêts, ce qui permettra d’économiser des sommes considérables. Chaque point en moins constitue une économie de 250 milliards de livres par mois. — Récupérer les droits appartenant à l’Etat dans les domaines maritimes, fluviaux et pétroliers et réactiver les raffineries. — Modifier les lois sur la fiscalité en adoptant l’impôt progressif, en augmentant les taxes sur les biens maritimes. — Revoir le dossier de Solidere en partant du principe que le centre de la capitale appartient à ses habitants. — Percevoir les taxes sur les infractions à la loi sur les bâtiments et revoir à la baisse les tarifs de l’électricité, de l’eau et des téléphones. — Lutter sérieusement contre les monopoles en élaborant de nouvelles lois dans ce domaine. Renforcer la surveillance et les sanctions sur le plan de la qualité et des prix et encourager le système des coopératives. M. Abou Rizk a également réclamé un réajustement des salaires dans une proportion de 86% afin de retrouver le pouvoir d’achat de 1992. Il a aussi demandé une augmentation de 30% dans le secteur privé avec effet rétroactif à compter du premier janvier 1998. Selon la CGTL, cette augmentation des salaires pourrait revitaliser l’économie en encourageant la consommation, ce qui relancerait la production. Toutes ces mesures devraient s’accompagner d’une approbation de l’échelle des salaires des fonctionnaires du secteur public. «La CGTL estime que ce programme revendicatif pourrait servir de document de travail pour un dialogue positif avec le gouvernement et le patronat», a conclu M. Abou Rizk.
La Confédération générale des travailleurs au Liban (CGTL) a fait le procès du gouvernement, lui faisant assumer la responsabilité de la crise économique et sociale qui secoue le pays et remettant en cause la plupart des orientations appliquées depuis l’arrivée au pouvoir du président Rafic Hariri. Renouant avec ses anciens discours incendiaires, la CGTL a développé une...