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Actualités - ANALYSE

Un match de cath où tous les coups semblent permis

Jamais les relations entre un président d’Assemblée et un chef de gouvernement n’ont atteint au Liban ce degré d’hostilité et d’irrespect mutuels. On en est presque aux insultes et les deux hommes se menacent réciproquement de révélations scabreuses. Menaces qui, il faut bien l’avouer, mettent l’eau à la bouche du côté d’une opinion que la curiosité tenaille. Mais qui, tout compte fait, ne pense pas grand bien de ces empoignades. Bien évidemment ce spectacle n’est pas gratuit. Et le timing choisi n’est pas fortuit. Il est clair en effet que l’explosion est en rapport avec la présidentielle, et d’ailleurs elle a éclaté au moment même où le coup d’envoi de la bataille électorale était donné. Il est également clair, cependant, que l’objectif véritable se situe au-delà de l’élection proprement dite, dans laquelle les deux protagonistes n’ont qu’un rôle très effacé. Ce qu’ils se disputent déjà, en troïkistes chevronnés, c’est le gâteau du vrai pouvoir pour les six années à venir et, au passage, le leadership de la composante mahométane du pays politique. Enjeu capital, d’autant que Taëf a très opportunément — pour eux — réduit à bien peu de chose les pouvoirs de la présidence de la République qui représente quant à elle la composante chrétienne de ce même paysage politique. Dès lors, les coups volent bas et fort. Les fanfaronnades se ressemblent furieusement du reste: les haririens voient dans l’agressivité de leurs adversaires la rage du loup pris au piège «qui sait que sous le prochain régime ce sera fini de rire, que l’anarchie ne sera plus permise». Et les amalistes soutiennent que, «débusqué, sentant sa fin proche, le camp du premier ministre se débat comme un beau diable, pour trouver une issue honorable, démissionner et partir sans perdre la face». Et ainsi de suite. Bien sûr, chacun prend ses désirs pour des réalités. Au train où l’on va, il ne semble pas que sous le prochain régime on puisse se dégager du système dit de partage, comme le promettent les haririens. Mais rien n’indique non plus que la carrière politique de M. Rafic Hariri tire à sa fin, comme en rêvent les amalistes… Toujours est-il que, fin stratège, M. Nabih Berry a fait monter la tension d’un cran en durcissant le ton, à la veille de sa propre visite à Damas où il ne veut pas se rendre en position de faiblesse. Il pose cependant par son comportement un problème institutionnel: élu par une Chambre dont la grosse majorité est loyaliste puisqu’elle vote toujours la confiance, disposant lui-même de ministres au sein du Cabinet, peut-il vraiment jouer à l’opposant ultra? Mais il y a belle lurette qu’on n’en est plus à une contradiction près, sous la présente République qui a ramené la paix civile mais pas dans ses propres rangs. Ainsi, les haririens ne sont pas en reste de positions contraires à la logique des institutions. Ils s’étonnent que leurs adversaires-partenaires, s’il ont tant à leur reprocher, ne l’aient pas fait voici des années. Mais assez étourdiment ils déclarent ensuite qu’ils se sont tus pendant des années et qu’ils ne sont plus disposés à le faire, laissant donc entendre qu’ils sont pour le moins des complices passifs d’exploits inavouables. Et comme personne n’est naïf, qu’on sait que, dans le système, c’est toujours donnant-donnant, on se demande ce que ce long silence mutuel a pu rapporter aux deux camps. Comment explique-t-on que les haririens, qui se réveillent aujourd’hui pour révéler que plus de 600 de leurs projets dorment d’un profond sommeil dans les tiroirs du Parlement, n’aient pas donné plus tôt l’alerte à ce grave sujet… Ceux que la situation divertirait beaucoup, s’il n’était un peu trop tard pour qu’ils en cueillent les fruits, ce sont les hraouistes. On entend en effet maintenant les haririens s’aviser, aussi bien que les amalistes, que le chef de l’Etat avait raison de demander des retouches à la Constitution, alors que les deux autres présidents avaient poussé les hauts cris. Avec un bel ensemble, hélas disparu depuis…
Jamais les relations entre un président d’Assemblée et un chef de gouvernement n’ont atteint au Liban ce degré d’hostilité et d’irrespect mutuels. On en est presque aux insultes et les deux hommes se menacent réciproquement de révélations scabreuses. Menaces qui, il faut bien l’avouer, mettent l’eau à la bouche du côté d’une opinion que la curiosité tenaille....