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Actualités - ANALYSE

Les capacités réformatrices du prochain régime passées au crible

Tout le monde réclame à cor et à cri un président fort, honnête, expérimenté et surtout efficacement réformateur. Mais engager le changement sur le plan intérieur est-il possible à l’ombre des conditions qui règnent sur le plan régional? Ce thème a été soulevé en privé au cours d’une session qui a groupé nombre de députés et de politiciens. Bien entendu divers avis ont été émis. — Certains ont soutenu en substance qu’un chef de l’Etat ayant les qualités précitées peut à coup sûr modifier les méthodes, le style du pouvoir tout entier, en abolissant le système dit de la troïka. A les en croire, il n’y aurait plus alors de partage des parts du gâteau, ni dans les nominations ni dans les contrats. Les pourris seraient neutralisés, le gaspillage des deniers publics réduit, le clientélisme éradiqué et les politiciens interdits de toute immixtion dans l’Administration. Les partisans de ces vues optimistes reconnaissent bien sûr que ce n’est pas le président de la République libanaise qui peut changer le statu quo régional, obtenir par sa seule action le retrait de l’occupant israélien et la fin de la présence militaire syrienne, ni dissocier le volet libanais du Golan pour servir la souveraineté comme l’indépendance ou le pouvoir de décision autonome de ce pays. Ils admettent qu’il en ira toujours ainsi tant que la paix globale n’a pas été réalisée au Proche-Orient, le Liban étant condamné à rester le maillon faible de la chaîne à cause notamment du problème du Sud qui sert d’exutoire aux visées des parties extérieures. Mais, selon les tenants de cette thèse, il est possible d’isoler, pour bien les traiter, nombre de facteurs purement internes comme la corruption. Ils estiment que personne n’empêcherait du dehors le Liban de faire le ménage chez lui pour entamer son redressement socio-économique, développer ses régions défavorisées, contrôler les dépenses, réduire le déficit budgétaire ainsi que la dette publique, renforcer la monnaie nationale, améliorer la perception fiscale en combattant la fraude, augmenter la production, promouvoir le revenu national etc. Toujours à leur avis, cette tâche, bien que titanesque, peut être menée à bien par un Cabinet spécial formé d’hommes dévoués, compétents, intègres, soucieux de dynamiser l’Administration après l’avoir épurée et de servir le public sans qu’il ait besoin de piston ou de recours au pot-de-vin. Et de conclure en soulignant que les complicités passive ou actives qui permettent la corruption ainsi que l’anarchie n’ont rien à avoir avec les considérations régionales et peuvent être traitées sans problème, pour peu qu’on ait l’intention de remettre le pays administrativement sur les rails. — Cette analyse est contredite par des politiciens qui s’affirment moins «naïfs». Selon eux, ce n’est pas avec déplaisir que les ennemis ou adversaires du Liban, ainsi que nombre de parties extérieures intéressées, contemplent sa désagrégation intérieure qui le rend à terme moins concurrentiel et le garde malléable en toute occasion, voire corvéable à merci. Et puis, selon ces parlementaires, même s’il n’y avait aucun problème de croc-en-jambe étranger, le chef de l’Etat aussi vertueux, aussi zélé qu’il soit, n’est pas en mesure de lutter contre la corruption, d’enclencher une vraie réforme. Cela pour deux bonnes raisons complémentaires: le mal est inhérent au système qu’il est impossible et interdit de changer tant que les règles du jeu régional restent les mêmes; et ce système dit de Taëf prive la présidence de la République des prérogatives nécessaires pour lancer la réforme, même sur le simple plan des méthodes du pouvoir. A la limite, et non sans une pointe de cynisme (ou de désespoir résigné), ces personnalités pensent que ce serait un très mauvais cadeau à faire à un homme capable, et à l’Etat, que de l’élire à la présidence de la République. Car, indiquent-ils, constatant qu’il n’y peut rien et las de se battre contre des moulins à vent, il en viendrait sans doute à démissionner ou se laisserait embarquer dans une crise de pouvoir. Sans aller jusqu’à déconseiller le choix d’un président fort, ces politiciens laissent donc entendre qu’ils préféreraient un candidat tout à fait ordinaire, tout à fait prêt à s’accommoder de la situation et du reste plus facile à trouver.
Tout le monde réclame à cor et à cri un président fort, honnête, expérimenté et surtout efficacement réformateur. Mais engager le changement sur le plan intérieur est-il possible à l’ombre des conditions qui règnent sur le plan régional? Ce thème a été soulevé en privé au cours d’une session qui a groupé nombre de députés et de politiciens. Bien entendu divers...