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Actualités - REPORTAGE

Restauration de monuments, nouvelle ambassade, nouveaux lycées.. Retour en force de la présence culturelle et pédagogique française au Liban (photo)

De nombreux bâtiments et monuments français rénovés, ainsi que de nouvelles constructions entreprises récemment au Liban par les autorités françaises, témoignent clairement de l’attachement de plus en plus profond de la France au Liban. Dans un déploiement stratégique, les différents services diplomatiques, lycées et centres culturels français se développent dans toutes les régions libanaises. Le budget réservé par la France au Liban depuis 1995 pour des projets à caractère culturel est de 170 millions de francs, ce qui place notre pays en tête des investissements, devant Pékin et Berlin. Ainsi, le long de la rue de Damas, un «quartier français» (comme on l’appelle) sera achevé incessamment et regroupera tous les services diplomatiques de la France, dont la nouvelle ambassade. Les travaux de restauration de la prestigieuse Résidence des Pins viennent d’être terminés. L’ancienne ambassade à Clemenceau a été transformée en grande école des affaires (ESA). Sans compter de nouveaux lycées et centres culturels aménagés dans les régions... Bref, la présence française au Liban, surtout dans son aspect culturel, connaît aujourd’hui un essor remarquable qui dénote une politique de réimplantation prouvant la confiance de la France dans le redressement et la reconstruction du Liban. Sur cette nouvelle expansion française, M. Bertrand Huguenet, ingénieur responsable des projets français au Liban, en Jordanie et en Syrie, nous donne plus de détails: «Depuis 1995, la France a décidé de prouver sa confiance dans le redressement du Liban en marquant clairement sa réimplantation dans des locaux et quartiers qui avaient été détruits pendant la guerre. La première grande décision en ce sens a été prise par M. Alain Juppé, alors ministre des Affaires étrangères, et elle consistait en la reconstruction de la Résidence des Pins, gravement endommagée pendant les événements. Les travaux sur ce site ont été marqués par le passage du président de la République française, M. Jacques Chirac, lors de son séjour au Liban en avril 1996». Raisons politiques Cette expansion immobilière est-elle un indicateur d’un changement politique quelconque? «Le financement direct de la France pour l’ensemble des projets au Liban est de 170 millions de francs, ce qui place ce pays en première place des engagements financiers de la France à l’étranger, devant Berlin et Pékin», explique M. Huguenet. Et de poursuivre: «Il y a certainement des raisons politiques à cela. La première de ces raisons est sentimentale, et elle est issue de l’attachement séculaire et réciproque du Liban à la France. La seconde est celle de l’arrivée d’une nouvelle équipe au pouvoir en France, qui a renouvelé l’engagement de son pays envers le Liban. La décision de rénover la Résidence des Pins a eu en ce sens un rôle symbolique: celui de marquer l’engagement de la France à renforcer sa présence au Liban. Il faut rappeler à cet égard que c’est à la Résidence des Pins qu’a eu lieu la seule manifestation qui ait réuni, pendant les événements, tout le Liban politique, et ce, le 14 juillet 1981. Quant à la troisième raison, elle concerne la foi de la France dans le redressement du Liban, et dans sa capacité à être un point de rayonnement pour les pays voisins, surtout au niveau de l’éducation. Le Liban est un trait d’union entre l’Orient et l’Occident. Certes, la francophonie a reculé pendant la guerre, mais nous faisons notre possible afin que cette récession s’arrête. Notre politique ne consiste pas à imposer la francophonie, celle-ci s’acquiert comme un mode de vie». Espace des Lettres «A partir de 1995, la France a repensé toute son implantation au Liban, et décidé d’effectuer un retour au centre-ville pour oublier tous les clivages entre l’Est et l’Ouest, et marquer clairement la réunification des Libanais», explique M. Huguenet. «L’acte essentiel est la réhabilitation de «l’Espace des Lettres», appelé autrefois Ecole supérieure des lettres et Centre d’études mathématiques, bordé par les rues de Damas et du Tribunal militaire», ajoute-t-il. «Le but est de créer un grand campus rue de Damas, qui regroupe tous les services français culturels et diplomatiques. La nouvelle ambassade s’y trouvera aussi, et sera inaugurée en l’an 2000». L’Espace des Lettres était à l’origine une caserne militaire française. Lors de l’indépendance, l’armée française a transmis l’ensemble des terrains à la Mission laïque pour y établir le centre culturel, l’Ecole des lettres et l’Ecole d’infirmières. Ce projet a pris corps en 1952 et a fonctionné jusqu’en 1975. A cette date, les bâtiments ont été évacués. Le CERMOC (Centre d’études et de recherche sur le Moyen-Orient contemporain) et l’IFAPO (Institut français d’archéologie du Proche-Orient) ont été évacués pendant les années 80. Qu’est-ce qui a été fait jusqu’à présent sur le plan de la réhabilitation des services rue de Damas? «Une partie des bâtiments avait déjà été restaurée de 1991 à 1994 pour y accueillir le CERMOC, précise M. Huguenet. La superficie totale réhabilitée est de 10.800 mètres carrés développés (Centre culturel, salle Montaigne, CERMOC, IFAPO et AUPELF principalement), auxquels il faut ajouter 4000 mètres carrés de parking souterrain (sous le jardin) et en surface, et 2000 mètres carrés réservés à la nouvelle chancellerie diplomatique». Et de poursuivre: «Il y a un autre parking souterrain de 800 places sous le stade du Chayla qui est actuellement en train d’être aménagé. Le stade sera construit au-dessus et comportera des gradins d’une capacité de quelque 3000 personnes, pour des activités culturelles ou sportives. Le stade aura une superficie de 10.000 mètres carrés, avec 6000 mètres pour le parking à niveaux. Le grand avantage de la réhabilitation de ce stade est celui de procurer un espace d’activité à proximité du centre-ville, facilement accessible aux habitants de la capitale et des alentours». Le stade du Chayla, situé également en bordure de la rue de Damas, était lui aussi un terrain militaire à l’origine, qui a, par la suite, été transformé en stade à l’usage du Grand lycée français qui se trouve à proximité. Le déploiement français rue de Damas ne s’arrête pas là: il y a évidemment le Grand lycée franco-libanais, l’Hôtel-Dieu, et le Couvent des Franciscaines dont une partie sera bientôt aménagée en vue d’y établir les élèves des classes secondaires du collège Louise Wegman. «Cela permettra aux élèves de Louise Wegman des sections de Joura et de Bchémoun de se rencontrer en fin d’études, et d’apprendre à mieux se connaître, a expliqué M. Huguenet. Un terrain sera également mis à la disposition de l’Université Saint-Joseph pour y construire une nouvelle faculté des lettres et sciences humaines». Résidence des Pins La restauration de la prestigieuse Résidence des Pins a été décidée avec l’arrivée de l’ambassadeur Jean-Pierre Lafon en mai 1994. Dans cette résidence, huit ambassadeurs se sont succédé de 1946 à 1974, et deux seulement après le début des événements. C’est devant cette résidence également que Louis Delamare, alors ambassadeur de France, fut assassiné le 4 novembre 1981. La construction de la Résidence des Pins date du début du siècle. Mais durant la guerre du Liban, les bâtiments ont été très endommagés. Les travaux sur le site sont aujourd’hui terminés. Cette résidence jouit d’une position privilégiée puisqu’elle est située, d’une part, au centre du Grand Beyrouth et, d’autre part, près du Bois des Pins, replanté et remodelé avec le concours de la Région d’Ile-de-France. A quoi vise cette restauration? «Ce projet de réhabilitation a pour objet de redonner à ce bâtiment, récemment classé monument historique, son aspect d’origine: respect de son architecture originelle, rénovation fidèle des façades en pierres de taille, conservation des volumes intérieurs et du style de décoration au rez-de-chaussée et en continuité de l’escalier monumental, explique M. Huguenet. Parallèlement, il s’agit d’intégrer le plus judicieusement possible les éléments techniques à même d’assurer à cet édifice le confort d’un bâtiment moderne». La nouvelle Ecole des affaires Qu’est-il advenu de l’ancien siège de l’ambassade de la rue Clemenceau? «L’ambassade française ne sera plus située à Clemenceau, vu que le nouveau campus diplomatique se trouvera intégré au regroupement de la rue de Damas, explique M. Huguenet. Les bâtiments de Clemenceau servent actuellement de locaux à l’Ecole supérieure des affaires, dont la direction des études a été confiée à la Chambre de commerce de Paris, et qui est parrainée par HEC et l’ESCP (Ecole supérieure de commerce de Paris). Le campus se trouve sur un espace de 30.000 mètres carrés entièrement arboré. Il reste encore deux bâtiments à réhabiliter dans ce site. Un auditorium est également prévu sous le jardin». «L’idée de cette école est complètement nouvelle, poursuit M. Huguenet. Elle assure un enseignement de 3e cycle en gestion, commerce et affaires, soit une année de plus que le MBA américain. Le diplôme est cosigné par les ministres français et libanais. Trois promotions y fonctionnent actuellement. Cette école, unique dans la région, pourra attirer des étudiants de tous les pays environnants. Elle a été financée par la France et la Banque du Liban». Nouveaux lycées L’une des plus grandes réalisations de la Mission laïque française est la construction d’un lycée à Nabatiyeh, au Liban-Sud. La construction de cet établissement a obéi à deux impératifs: le souci d’expansion de la francophonie sur l’ensemble du territoire libanais, et la volonté des habitants de cette localité d’avoir la possibilité d’apprendre la langue française, d’autant plus qu’une partie non négligeable de la population a longtemps habité l’Afrique francophone. «Le lycée de Nabatiyeh, qui a ouvert ses portes cette année, accueille déjà 260 élèves de maternelle et du primaire, explique M. Huguenet. La deuxième phase de la construction sera terminée cette année. La superficie totale du lycée de Nabatiyeh est de 30.000 mètres carrés. La Mission laïque française finance elle-même la construction». D’autres projets concernant les lycées français sont en cours. Le lycée de Tripoli devra être agrandi incessamment. L’établissement Sainte-Anne à Rayak (Békaa) fera également l’objet de travaux d’amélioration. Un bâtiment supplémentaire sera aménagé sur le terrain du Collège protestant français, permettant d’accueillir 500 élèves de plus. Bref, l’effectif des établissements français sera augmenté de 5000 élèves. De plus, un nouveau centre culturel a été créé à Tripoli dans un grand ensemble à Mina, le City Complex. Ce projet a été lancé par Mme Margie Sudre, ministre de la Francophonie, en octobre 1996. En Syrie et en Jordanie Le volume des travaux en Syrie et en Jordanie est nettement inférieur à celui du Liban. M. Huguenet, qui est également responsable des projets français dans ces deux pays, précise qu’«en Syrie, une nouvelle ambassade a été construite en 1994». «Mais pour l’instant, il n’y a que des travaux sur la résidence de l’ambassadeur, ainsi que deux nouveaux projets, un lycée français et un Institut français d’archéologie», ajoute-t-il. «En Jordanie, une école française a été achevée en 1996 et reçoit actuellement 500 élèves, déclare M. Huguenet. Il n’y a pas de très grands projets prévus dans ce pays pour l’instant». La relation entre la France et le Liban sera, de toute évidence, toujours marquée du sceau de l’engagement sans cesse renouvelé: engagement affectif, certes, mais aussi stratégique entre ces deux pays qui partagent une fascination pour la même culture et le même mode de vie. Cet engagement profond prouve par la même occasion que la francophonie se porte bien et que son expansion dépasse les régions qui lui étaient traditionnellement acquises. Suzanne BAAKLINI
De nombreux bâtiments et monuments français rénovés, ainsi que de nouvelles constructions entreprises récemment au Liban par les autorités françaises, témoignent clairement de l’attachement de plus en plus profond de la France au Liban. Dans un déploiement stratégique, les différents services diplomatiques, lycées et centres culturels français se développent dans toutes...