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Actualités - CHRONOLOGIE

Les américains divisés sur l'opportunité d'une attaque

L’Administration démocrate a fait donner les experts et les sondages hier, au lendemain du fiasco médiatique essuyé par le trio de choc Albright-Cohen-Berger à l’université de Columbus, dans l’Ohio. Pour dire que l’hostilité manifestée à cette occasion par l’auditoire ne reflétait pas la majorité de l’opinion publique. Il n’en reste pas moins que l’Amérique est divisée sur l’opportunité d’une opération militaire contre l’Irak. Et la presse de jeudi se fait l’écho de cette division, jugeant que le président Bill Clinton devrait comprendre l’avertissement. «Bien qu’il ne fût certainement pas ce que la Maison-Blanche en attendait, cet événement a constitué le fascinant baromètre d’un pays divisé, ou tout au moins incertain, sur l’opportunité d’un recours à la force militaire contre l’Irak», relève le «New York Times» dans un éditorial. «Certains moments (...) avaient étrangement le goût des manifestations et des passions suscitées par la guerre du Vietnam», juge le quotidien new-yorkais, qui qualifie le débat public tenu par le secrétaire d’Etat Madeleine Albright, le secrétaire à la Défense William Cohen et le conseiller de M. Clinton pour les affaires de sécurité Sandy Berger de «manifestation de la démocratie américaine». Cependant, «les divisions exprimées à Columbus requièrent l’attention soutenue du président Clinton et de ceux (...) qui estiment qu’une frappe aérienne contre l’Irak serait justifiée, si la diplomatie échouait», met en garde l’éditorialiste du «New York Times». Pour sa part, le «Washington Post» a estimé que le débat avait «exposé l’élite de la diplomatie américaine à une profonde dose d’angoisse publique au sujet de la confrontation qui semble s’annoncer entre le pays et le président irakien Saddam Hussein». «Nombreux furent les membres du public qui sont sortis (de la réunion) sans avoir obtenu les réponses qu’ils étaient venus entendre», ajoute le «Post». «C’est bien la politique de M. Clinton qui a été chahutée», juge quant à lui le quotidien conservateur «Washington Times». «Ce n’était pas un début favorable pour la campagne entamée par le président pour faire accepter sa politique irakienne au peuple américain», note le journal. Selon un sondage diffusé mercredi soir par la chaîne de télévision CBS, trois Américains sur quatre se disent favorables à des attaques aériennes contre l’Irak afin de s’assurer que ce pays ne fabrique pas d’armes de destruction massive. En classe Après s’être fait chahuter mercredi à Columbus, le secrétaire d’Etat a poursuivi hier sa campagne d’explication à Nashville (Tennessee), devant un public plus sage mais dont les questions reflétaient les mêmes doutes que ceux des jeunes de l’Ohio. «J’aime bien être dans une salle de classe, je me sens chez moi», s’est écriée Mme Albright, un ancien professeur d’université, devant quelques centaines d’élèves de l’université d’Etat du Tennessee. Ceux-ci lui ont donné du «docteur Albright» et ont applaudi sur commande. Mais sous la courtoisie perçaient les mêmes interrogations. Un premier étudiant a évoqué le risque «d’être entraîné dans une guerre du type Vietnam». Un étudiant sénégalais, Daoude Cissé, a demandé s’il fallait vraiment «tuer des enfants irakiens innocents» et pourquoi la France et la Russie ne suivaient pas l’Amérique sur le sentier de la guerre. Les réponses ont été sans surprise: priorité à une solution pacifique, même si «le temps de la diplomatie est compté», soutien au secrétaire général de l’ONU Kofi Annan en mission à Bagdad — qui devra revenir avec «une vraie solution, pas un marché de dupes» — et détermination à frapper si l’Irak ne laisse pas l’ONU inspecter ses armes chimiques et bactériologiques. Mme Albright s’est surtout efforcée d’imprimer dans ces jeunes cerveaux l’image d’un Saddam Hussein «multirécidiviste», prêt à répandre du gaz moutarde et des bacilles mortels, un homme qu’elle a présenté comme le dictateur le plus dangereux depuis Hitler. En même temps, et sans craindre la contradiction, elle réduisait l’éventuelle frappe contre l’Irak à une simple opération de police. «Nous parlons d’utiliser la force, pas d’une guerre, il n’y aura pas de longue guerre terrestre (...). Il n’y a pas de danger d’une guerre mondiale», a-t-elle martelé. Devant une carte murale du Moyen-Orient, elle a répété «que le but de l’opération n’était pas de chasser Saddam Hussein du pouvoir (mais) de le contenir». «En fin de compte, la biologie fera son œuvre et il disparaîtra» de mort naturelle, a-t-elle ajouté. Il ne faut pas trop compter sur l’opposition irakienne pour le renverser, a-t-elle reconnu, car «c’est un groupe très compliqué, très difficile à organiser». Elle a aussi fait appel à la fierté nationale en soulignant que le reste du monde «compte sur le leadership» de l’Amérique, seule superpuissance. Au beau milieu de son exposé, un assistant lui a tendu un téléphone portable. Au bout du fil: le capitaine de l’équipe féminine de hockey sur glace américaine, médaille aux Jeux olympiques de Nagano (Japon), que Mme Albright a pu féliciter devant les caméras. «Vous êtes les meilleures ambassadrices» des Etats-Unis, a-t-elle dit aux hockeyeuses. L’entourage de Mme Albright affirmait ensuite que ce coup de téléphone providentiel n’était pas un coup de publicité. Pour certains experts appelés à la rescousse, les manifestations d’hostilité mercredi, lors d’un débat retransmis par CNN, ne reflètent pas l’opinion réelle des Américains sur un recours à la force contre l’Irak. Ces observateurs s’accordent à dire que la tentative d’explication de la politique américaine vis-à-vis de l’Irak, menée mercredi par trois des plus hauts responsables américains, a été un fiasco, «un désastre de relations publiques». Ces mêmes experts soulignent cependant que la majorité de l’opinion soutient le président Bill Clinton et ses conseillers et que les Américains se serrent les coudes en période de crise. M. Clinton, lui, a indiqué qu’il n’était pas découragé par ces manifestations pacifistes. Le président s’est dit convaincu que «la plupart des Américains soutiennent notre politique». «Je pense que la majorité écrasante des Américains veulent aussi une résolution pacifique de (cette crise). Mais s’il nous faut agir, je crois que l’Amérique fera ce qu’elle a toujours fait (...) s’unir comme nous l’avons fait en 1991», a-t-il dit.
L’Administration démocrate a fait donner les experts et les sondages hier, au lendemain du fiasco médiatique essuyé par le trio de choc Albright-Cohen-Berger à l’université de Columbus, dans l’Ohio. Pour dire que l’hostilité manifestée à cette occasion par l’auditoire ne reflétait pas la majorité de l’opinion publique. Il n’en reste pas moins que l’Amérique...