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Actualités - CONFERENCES DE PRESSE

Des centaines de milliers de personnes pourraient être intoxiquées, affirme Hamdane Cri d'alarme de Greenpeace : des canalisations d'eau potable en amiante bientôt au Liban-nord Le CDR, responsable du projet, nie que l'amiante-ciment soit cancérigène

Greenpeace a soulevé hier la question de l’utilisation de l’amiante-ciment dans l’installation d’un nouveau réseau d’eau potable au Liban-Nord, qui va être bientôt entreprise par le Conseil de développement et de reconstruction (CDR) et le ministère des Ressources hydrauliques et électriques. Une interrogation s’impose: l’amiante est-elle une matière dangereuse si elle est utilisée dans des canalisations d’eau potable? Le bureau de Greenpeace Méditerranée répond par l’affirmative et pense que les fibres d’amiante présentent un grave danger (cancer de l’estomac et autres maladies chroniques) pour les centaines de milliers de futurs consommateurs reliés aux nouvelles canalisations. Son porte-parole, M. Fouad Hamdane, a estimé que «cette affaire est catastrophique», au cours d’une conférence de presse hier. Pour leur part, le CDR et la direction d’Eternit, l’usine chargée de confectionner les tuyaux, ripostent en se basant sur des rapports de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui confirment que l’amiante traitée et utilisée dans les canalisations d’eau potable ne présente aucun danger pour la santé. «Par ce projet de canalisation d’eau potable au Liban-Nord, le CDR met la vie de centaines de milliers de personnes en danger à cause de l’usage de tuyaux en amiante», a déclaré M. Hamdane au cours de la conférence de presse. «Poursuivre ce projet tient de la folie», a-t-il ajouté. Et d’expliquer: «L’amiante est un produit qui cause des maladies mortelles quand il est respiré par l’homme. Il y a des risques sérieux que l’existence de l’amiante dans des canalisations d’eau potable puisse causer des cancers du système digestif chez les consommateurs. Se basant sur des données scientifiques qui confirment le danger de l’amiante sur la santé, plusieurs pays comme les Etats-Unis, l’Union européenne, et l’Arabie Séoudite ont banni l’utilisation de l’amiante. Dans d’autres pays comme la Syrie, ce produit n’est utilisé à la rigueur que pour les égoûts, mais en aucun cas pour l’eau potable». M. Hamdane a présenté des documents à l’appui de ses arguments, dont un rapport du «US Environmental Protection Agency» datant de janvier 1998, qui détaille les dangers de l’amiante si elle est respirée par l’homme. «Les personnes les plus exposées au danger de maladies causées par l’amiante sont les ouvriers à Eternit qui respirent les fibres de cette matière», a poursuivi M. Hamdane. «D’ailleurs cette compagnie prétend qu’il y a plusieurs genres d’amiante, les uns nocifs et les autres pas, et qu’elle n’utilise que les seconds. Mais il est scientifiquement prouvé que les deux genres sont aussi dangereux l’un que l’autre». Le porte-parole de Greenpeace a également évoqué d’autres projets où l’utilisation d’amiante est projetée: «L’amiante sera également employée dans des systèmes d’égoûts pour les villes de Tripoli, Tyr et pour la région du Kesrouan, des projets financés par le CDR et le ministère des Travaux publics. Des hangars au port de Beyrouth devaient également être munis de toits en amiante, mais le directeur du port, M. Mouhib Itani, a décidé à la dernière minute de remplacer cette matière par du fer, comme il l’a indiqué à Greenpeace». M. Hamdane a conclu que «la décision d’utiliser l’amiante dans tous ces projets peut être révoquée parce que ces canalisations d’égouts et d’eau potable n’ont pas encore été installés». «Greenpeace appelle le président du CDR, M. Nabil el-Jisr, le ministre des Ressources hydrauliques et électriques, M. Elias Hobeika, et le ministre de l’Environnement, M. Akram Chehayeb, à employer d’autres matières que l’amiante dans leurs projets, puisque les alternatives existent, même dans les usines libanaises, notamment les tuyaux en fibre de verre par exemple», a-t-il ajouté. La réponse du CDR aux mises en garde de Greenpeace ne s’est pas fait attendre. Dans un communiqué qu’il a publié hier, le CDR a qualifié les paroles de M. Hamdane d’«erronées et diffamatoires, visant à tromper l’opinion publique sur les projets d’utilité publique entrepris par le CDR». Le Conseil a donc décidé de mettre au clair les données scientifiques qui l’ont poussé à adopter l’amiante pour ses projets: «Le CDR a entamé l’exécution des travaux sur les canalisations d’eau potable du Liban-Nord, où des tuyaux en amiante seront utilisés à certains endroits. L’utilisation de l’amiante est justifiée par des études effectuées par des bureaux internationaux qui prouvent que cette matière, si elle se trouve dans les canalisations d’eau potable, ne présente aucun danger sur la santé humaine. Les arguments qui appuient cette théorie sont les suivants: — Il faut faire la différence entre l’amiante à l’état pur et le produit fini de l’amiante-ciment qui ne contient que 10% de fibres de cette matière, fondues dans le ciment. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) assure dans ses rapports que les tuyaux en amiante-ciment ne présentent aucun danger pour la santé. — Si plusieurs pays ont interdit l’usage de l’amiante, c’est parce que cette matière était employée dans la peinture des murs pour leur isolation, et qu’elle présentait un réel danger puisque les habitants finissaient par la respirer. Mais il ne s’agit pas du même cas que les canalisations d’eau. — De plus, le risque de retrouver les fibres d’amiante dans l’eau est pratiquement inexistant puisqu’une couche calcaire ou organique se forme avec le temps à l’intérieur des tuyaux, protégeant l’eau de toute fuite indésirable». Le directeur d’Eternit, M. Pierre Abboud, a également présenté à «L’Orient-Le Jour» des arguments qui vont dans le même sens que ceux du CDR: «Nous avons en notre possession plusieurs rapports de l’OMS prouvant que l’amiante-ciment des tuyaux à eau potable ne sont en aucun cas dangereux pour la santé des consommateurs. Le premier rapport date du 25 février 1994, et les deux autres, que nous avons nous-mêmes requis pour plus de précautions, datent du 28 janvier 1997 et du 27 janvier 1998, et leur contenu n’a pas changé». Les rapports de l’OMS présentés par M. Abboud affirment ce qui suit: «Alors que le fait de respirer de l’amiante est cancérigène, il n’y a aucune preuve que l’amiante a un effet nocif sur la santé humaine quand il est avalé dans l’eau (...) Avaler ne produit apparemment pas le même effet que respirer, et l’OMS en conclut que la présence d’amiante dans les tuyaux en amiante-ciment ne présente aucun danger sur la santé des consommateurs, bien que ce péril existe de façon réelle pour les ouvriers qui confectionnent ces tuyaux, s’ils ne sont pas protégés». M. Abboud a également fait état d’un autre document en sa possession, une déclaration de la «United States Environmental Agency» datant du 13 décembre 1996, qui rectifie la décision du 12 juillet 1989 d’interdire l’usage d’amiante au Etats-Unis, et qui place les canalisations d’eau potable en amiante-ciment parmi les produits tolérés. Face à ces opinions contradictoires, le ministère de l’Environnement, contacté hier, nous a déclaré qu’il allait rendre sa réponse aujourd’hui, et qu’il n’avait pas encore pleinement étudié le dossier. Interrogé par «L’Orient-Le Jour», M. Mohammed Amine Marhaba, le directeur de l’Office des Eaux de Tripoli, a donné l’avis le plus modéré sur cette question: «Bien que nous ne soyons pas directement impliqués dans l’exécution du projet de canalisation d’eau potable du Liban-Nord, nous préférons que l’amiante n’y soit pas utilisée, parce que les avis scientifiques sont partagés à propos de cette matière. Pourquoi ne pas profiter du fait qu’il y a des alternatives et éviter les risques? Dans un projet, similaire mais de faible envergure, que nous avons exécuté depuis deux ans, nous avons employé d’autres produits».
Greenpeace a soulevé hier la question de l’utilisation de l’amiante-ciment dans l’installation d’un nouveau réseau d’eau potable au Liban-Nord, qui va être bientôt entreprise par le Conseil de développement et de reconstruction (CDR) et le ministère des Ressources hydrauliques et électriques. Une interrogation s’impose: l’amiante est-elle une matière dangereuse...