Le président argentin a entamé une visite de trois jours au Liban Le volet régional au centre des entretiens Menem-Hraoui (photos)

Premier chef d’Etat argentin à visiter le Liban, depuis l’établissement des relations diplomatiques entre Beyrouth et Buenos Aires en 1945, le président Carlos Menem a entamé hier une visite officielle de trois jours dans le pays, à l’invitation de son homologue, M. Elias Hraoui. Plus d’une fois, il a mis l’accent sur la nécessité d’une reprise des négociations de paix régionale, soulignant la détermination de son pays à appuyer les efforts déployés pour aboutir à «une solution pacifique au conflit au Moyen-Orient». Quant au président Hraoui, il a rappelé les principes de base de la politique libanaise dans le cadre du processus de paix, notant l’urgence de «réformes sérieuses au sein de l’ONU» et exprimant l’espoir que les pays qui ne sont pas membres permanents du Conseil de Sécurité «puissent avoir la chance de participer à l’élaboration de l’avenir du monde». Les présidents Hraoui et Menem qui se sont tous deux félicité des relations entre le Liban et l’Argentine ont tenu ces propos au palais de Baabda, au cours du dîner offert par le chef de l’Etat en l’honneur de son hôte argentin et de la délégation qui l’accompagne. M. Menem est arrivé à 15h à Beyrouth, première étape d’une tournée régionale qui doit également le conduire en Egypte. Il est accompagné de sa fille Suleyma, du chef de la diplomatie argentine, M. Guido de Tella, du gouverneur de Santa Fé, Jorje Alberto Obeid, d’origine libanaise, ainsi que de sénateurs, de députés et d’hommes d’affaires argentins. Pendant son séjour, il résidera à l’hôtel Mariott, a-t-on appris. Un accueil officiel a été réservé au président argentin qui a été salué à sa descente d’avion par les chefs de l’Etat et du Parlement, MM. Elias Hraoui et Nabih Berry, ainsi que par le vice-président du Conseil, M. Michel Murr, représentant M. Rafic Hariri. Deux petites filles du «Village d’enfants SOS», Rita Khoury et Joëlle Salloum, en costume folklorique, ont offert des gerbes de fleurs à M. Menem et à sa fille. Etaient également présents pour accueillir le président argentin et la délégation qui l’accompagne les ministres Michel Eddé, Hagop Démirdjian, Ali Harajli, Fawzi Hobeiche, Béchara Merhej, Elias Hanna, Ayoub Hmayed, Chahé Barsoumian, Bahige Tabbarah, Omar Meskaoui, les membres du Bureau de la Chambre, les présidents des commissions parlementaires, les membres du corps diplomatique accrédités au Liban, l’ambassadeur du Liban en Argentine, M. Riyad Kantar, le commandant en chef de l’armée, le général Emile Lahoud, les mohafez de Beyrouth et du Mont-Liban, MM. Nicolas Saba et Mohamed Souheil Yamout, et plusieurs autres personnalités politiques, militaires et diplomatiques. D’importantes mesures de sécurité ont été prises dès le matin dans le périmètre de l’aéroport. Après la cérémonie d’accueil et une pause de 10 minutes au salon d’honneur de l’AIB, M. Menem s’est rendu dans la voiture présidentielle au palais de Baabda où il a eu un entretien de 20 minutes en tête-à-tête avec son homologue. Les ministres Murr, Hobeiche et Hanna, ainsi que la délégation argentine devaient ensuite rejoindre les deux présidents. La conversation a notamment porté sur le processus de paix ainsi que sur la colonie libanaise en Argentine. M. Menem a souligné la nécessité de l’instauration d’une paix juste dans la région et s’est prononcé pour la mise en application de la résolution 425 de l’ONU ainsi que pour une reprise des pourparlers de paix. Ce à quoi M. Hraoui a répondu en indiquant que la 425 ne peut pas faire l’objet de négociations. Il a ajouté: «Le secrétaire d’Etat américain, Mme Madeleine Albright, fait le tour du monde en prélude à une action quelconque contre l’Irak. Pourquoi ne ferait-elle pas quelque chose pour la mise en application de cette résolution? Aussi, espérons-nous votre aide». M. Menem a en outre exposé le rôle des Libanais dans le développement de son pays. Il a aussi évoqué ses origines. Le président argentin, rappelle-t-on, est de père et de mère syriens. En fin d’après-midi, M. Menem a reçu une délégation de la municipalité de Beyrouth, conduite par M. Mohamed Ghaziri, qui lui a remis les clés de la ville. Le président argentin a répondu en mettant l’accent sur sa joie de se trouver au Liban, notant que plusieurs membres de sa délégation sont d’origine arabe et notamment libanaise. Au cours du dîner offert en son honneur par le président Hraoui, M. Menem a rappelé que trois millions et demi d’Argentins sont d’origine arabe, «dont la moitié est d’ascendance libanaise». Après avoir mis l’accent sur «la contribution de la communauté d’origine libanaise au développement» de son pays, le président argentin a souligné que son gouvernement suit de près l’évolution de la situation au Moyen-Orient. «Je voudrai insister, a-t-il déclaré, sur le fait que mon gouvernement continuera d’appuyer les efforts de la communauté internationale en vue d’arriver à une solution pacifique au Moyen-Orient. Le processus de paix initié à Madrid en 1991 doit, à notre avis, se poursuivre dans le respect des accords d’Oslo et de Washington et sur base des résolutions 242, 338 et 425 du Conseil de Sécurité». M. Menem a ensuite remercié le président Hraoui pour la décoration qu’il venait de lui décerner. Le chef de l’Etat avait accordé à son hôte la Médaille du Mérite libanais, grade extraordinaire, en signe de «reconnaissance des liens profonds qui unissent le Liban et l’Argentine et en appréciation de votre appui au Liban». Plus de 200 personnalités étaient conviées au dîner de Baabda. Prenant la parole pour souhaiter la bienvenue à son hôte, M. Hraoui a rappelé que l’Argentine a «constitué un des premiers foyers de l’expansion libanaise dans le monde». Ce pays «compte à l’heure actuelle plus d’un million de citoyens d’origine libanaise et au cœur de sa capitale, à l’entrée d’une avenue qui porte le nom de la République libanaise, s’élève la statue d’un génie international originaire du Liban, Gébrane Khalil Gébrane», a-t-il ajouté. Le président Hraoui a exposé les réalisations de son hôte, se félicitant de sa politique d’ouverture responsable, a-t-il dit, de la stabilité économique en Argentine, ainsi que sa contribution à la création d’un Marché commun des Etats latino-américains. Une capitale culturelle, scientifique et touristique Il a ensuite souligné les efforts fournis par l’Etat pour que le Liban «redevienne La capitale culturelle, scientifique et touristique de l’Orient, et un centre de rayonnement de la liberté et de la démocratie qu’il a pratiquée avant même la naissance de plusieurs Etats dans notre région». Au sujet du processus de paix, le président Hraoui a affirmé la détermination de l’Etat à libérer les parties occupées du pays et à recouvrer sa souveraineté, tout en notant qu’Israël continue d’ignorer la résolution 425 ou de manœuvrer (en parlant d’un retrait à des conditions déterminées). Après avoir salué le soutien de l’Argentine au Liban durant l’agression israélienne d’avril 1996 et l’intérêt qu’elle porte à la question des détenus libanais dans les prisons israéliennes, le chef de l’Etat a rappelé l’attachement du pays à une paix «qui sauvegarde les droits au moyen de l’application des résolutions internationales» et au principe de la paix en échange du territoire. Il a estimé que l’ONU «a besoin de réformes sérieuses et de développer ses institutions et sa mission». «Il n’est pas permis, a-t-il dit, de constater que cette organisation est en mesure de mettre en application des résolutions internationales dans différentes parties du monde et n’est pas capable de les appliquer chez nous». M. Hraoui a poursuivi en exprimant l’espoir que les pays qui ne sont pas membres permanents du Conseil de sécurité «pourront avoir la chance de participer à l’élaboration de l’avenir du monde». Il a conclu en appelant au développement des relations commerciales, culturelles et touristiques bilatérales et à l’encouragement des investissements entre le Liban et l’Argentine. Le chef d’Etat argentin sera ce soir l’hôte du chef du gouvernement, M. Rafic Hariri, qui regagnera ce matin Beyrouth. M. Menem doit auparavant se rendre à 10h, Place de l’Etoile où il prononcera un discours devant les députés. Il visitera ensuite la ville de Jbeil et recevra à 16h les correspondants des médias argentins.