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Actualités - REPORTAGE

MEA : l'enquête marque une pause... mais le dossier reste ouvert

Pourquoi le Parquet s’acharne-t-il à poursuivre son enquête sur le déficit au sein de la MEA, alors que le contrat sur la location de trois avions Airbus entre la compagnie libanaise et la Singapore Airlines a été renégocié? Pourquoi l’ancien chef de la brigade criminelle, le général Béchara Salem — qui, en dépit de sa mutation, continue à suivre le dossier — continue-t-il à convoquer le directeur général de la compagnie, M. Youssef Lahoud, reconduit dans ses fonctions par le nouveau conseil d’administration et donc quasiment réhabilité par la Banque centrale, principal actionnaire de la MEA? Enfin, pourquoi le Parquet pioche-t-il dans les comptes de la compagnie, remontant au début des années 90, à la recherche de la cause du cumul de déficit dans son budget? Autant de questions que journalistes et personnes concernées par l’affaire se sont posées hier, pendant que le général Salem poursuivait ses investigations, dans l’un des bureaux du greffe du Parquet, celui du chef de la brigade criminelle étant désormais occupé par le général Naoum Khoury. L’affaire a commencé au début du mois de novembre par une enquête judiciaire sur un contrat de bail jugé défavorable à la MEA. Et voilà que deux mois et demi plus tard, le Parquet mène des recherches sur les causes du déficit général, accumulé au cours des dernières années par la compagnie d’aviation libanaise. Comme s’il répugnait à clore le dossier... Au cours de la séance d’hier, le général Salem a entendu le commissaire aux comptes, M. Joseph Fadl (chargé par la société internationale Touche-Ross de contrôler les finances de la MEA),ainsi que l’ancien PDG, M.Khaled Salam, et le directeur général, M.Youssef Lahoud. M. Fadl —qui avait été entendu jeudi dernier — a remis hier au général un rapport sur l’état des finances de la compagnie depuis sa nomination comme contrôleur en 1992. Selon des sources judiciaires, M.Fadl aurait déclaré au général qu’il avait à plusieurs reprises attiré l’attention des responsables de la compagnie sur l’énormité du déficit. Et le général a entendu M.Khaled Salam pour lui demander ce qu’il a fait pour tenter de réduire le déficit. L’ancien PDG de la compagnie — qui a pris ses fonctions en septembre 1995 — aurait précisé au général, que lorsqu’il a été nommé à la tête de la compagnie, celle-ci avait accumulé un déficit de 372 millions de dollars, qu’il avait réussi à réduire. Toutefois, selon des sources judiciaires, les budgets des années 96 et 97 n’ont pas encore été établis et l’ancien PDG aurait répondu qu’effectivement, lorsqu’il s’agit d’une compagnie de cette importance, cela prend du temps. Selon les comptes présentés au Parquet, le déficit de la compagnie au cours de l’année 96 aurait atteint 60 millions, alors qu’en 1997, il était de 53 millions de dollars. Mais toujours selon des sources judiciaires, la réduction du déficit aurait dû être bien plus importante, si une politique financière saine avait été suivie. A cela aussi, M. Salam aurait répondu qu’il était impossible de réduire le déficit de manière plus radicale, en raison du nombre élevé d’employés «inamovibles» pour des raisons politiques, de la concurrence des autres compagnies aériennes qui offrent aux voyageurs des prix avantageux et aussi en raison de la crise générale que traversent actuellement les compagnies d’aviation dans le monde. Toujours selon M. Salam, la MEA souffre aussi du coût élevé du matériel et de l’entretien des avions, sans compter le fait qu’au niveau administratif et comptable, tout se fait manuellement et non sur ordinateur. Selon les mêmes sources judiciaires, les enquêteurs auraient posé les mêmes questions à M. Youssef Lahoud afin d’entendre son explication du déficit accumulé par la compagnie. M. Lahoud avait été nommé directeur général de la compagnie en 1991, alors que M. Sélim Salam était PDG. Mais ses prérogatives avaient été sérieusement réduites par le conseil d’administration d’alors et le principal actionnaire de l’époque, la banque Intra exigeait de donner son accord à toute transaction. La Intra n’a vendu ses actions à la Banque centrale qu’en 1996. Les sources judiciaires ont précisé que le général a axé ses questions à M. Lahoud sur le point de savoir si, à son avis, les contrats signés par M. Khaled Salam au sujet du catering et de l’achat de fuel ont aggravé le déficit de la compagnie et s’ils ont pu apporter des bénéfices financiers à celui qui les a signés. Le Parquet continue donc à enquêter sur les agissements de M. Khaled Salam, essayant de savoir si l’important déficit au sein de la MEA pourrait être dû à un gaspillage intentionnel, ce qui constituerait un délit pénal, passible de poursuites. Hier, le général Salem a aussi posé de nombreuses questions sur les procès verbaux des réunions de l’ancien conseil d’administration, datés de juin 1997 et relatifs au mandat accordé à M. Salam afin qu’il négocie le contrat avec la Singapore Airlines. Le général Salem aurait en effet découvert que ces procès verbaux n’ont pas été signés par les membres du conseil d’administration et il voudrait en connaître la raison, car n’étant pas signés, ils ont pu être falsifiés...En réalité, les journalistes avaient un peu l’impression hier, que l’enquête tournait plutôt en rond, d’autant que si l’existence d’un délit pénal n’est pas prouvée, le Parquet ne peut entreprendre aucune action puisque le principal actionnaire (la Banque centrale) a clairement montré sa détermination à ne pas porter plainte. D’ailleurs, à l’issue de ses investigations d’hier, le général Salem a annoncé qu’il comptait prendre son temps pour étudier le rapport financier que lui a remis M. Fadl et il n’a pas annoncé de nouvelles convocations. Ainsi, le dossier est encore ouvert, mais l’enquête prend une pause. Et la question qui s’impose est la suivante: à qui profite le maintien de l’ouverture de ce dossier, à la veille du début du mois des soldes où le Liban est censé accueillir des milliers de voyageurs venus à bord des vols de la MEA? Scarlett HADDAD
Pourquoi le Parquet s’acharne-t-il à poursuivre son enquête sur le déficit au sein de la MEA, alors que le contrat sur la location de trois avions Airbus entre la compagnie libanaise et la Singapore Airlines a été renégocié? Pourquoi l’ancien chef de la brigade criminelle, le général Béchara Salem — qui, en dépit de sa mutation, continue à suivre le dossier —...