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Actualités - CHRONOLOGIE

Guerre des chiffres entre Hoss et le ministère des Finances L'ancien premier ministre réfute les arguments du gouvernement sur l'héritage de la dette

L’ancien premier ministre Sélim Hoss et le ministère des Finances se sont livrés hier à une guerre des chiffres autour du volume de la dette et des taux d’intérêt, une guerre qui illustre ainsi la précarité de toute solution aux problèmes du pays en l’absence de statistiques transparentes.
M. Sélim Hoss a réfuté dans une déclaration les arguments du gouvernement selon lequel la moitié du volume actuel de la dette publique est héritée des gouvernements précédents et reproché aux responsables d’avoir eux-mêmes laissé filer les déficits.
«Dans une tentative claire de se disculper d’avoir porté la dette publique à un niveau inquiétant, les responsables se sont employés ces derniers temps à répéter que la moitié du montant actuel de la dette a été héritée» des gouvernements précédents, a noté M. Hoss.
«Ils affirment ainsi que la dette atteignait à la fin de 1992 (au moment de l’arrivée au pouvoir de Rafic Hariri), quelque 3.500 milliards de livres et que, si l’on intégrait à ce montant la somme des intérêts cumulés sur cinq ans, le chiffre s’élèverait alors à 8.500 milliards de livres, ce qui équivaudrait, selon les allégations des responsables, à la moitié du montant total de la dette publique actuelle», a-t-il relevé.
«Ces affirmations dissimulent une série de non-vérités», selon lui. «D’abord, en se basant sur ce que disent les responsables, le montant total actuel serait de près de 17.000 milliards de livres. La vérité est que la dette atteint actuellement 21.000 milliards», a-t-il dit.
«Deuxièmement, selon les chiffres du gouvernement, le taux moyen des intérêts cumulés qu’ils additionnent au montant de la dette à son niveau d’il y a cinq ans s’établirait à 20 pour cent. Or, c’est le gouvernement actuel qui est dans une large mesure responsable de cette moyenne. Celle-ci n’aurait pas été aussi élevée si, d’une part, le pouvoir n’avait pas lui-même fixé les taux au lieu de laisser le marché les déterminer par le biais de la concurrence, et si, d’autre part, il n’avait pas émis plus de bons du trésor qu’il n’en fallait pour résorber le déficit budgétaire», a-t-il ajouté.
M. Hoss a expliqué que cette inflation de bons du trésor a provoqué à un certain moment la hausse du solde débiteur du Trésor auprès de la Banque du Liban à près de 4.000 milliards de livres. «Or le Trésor n’était pas en mesure d’émettre des obligations supplémentaires jusqu’à concurrence de cette valeur sans subir en contre-coup des hausses des taux d’intérêt», a-t-il poursuivi.
«Pour ces considérations, j’affirme que le taux moyen additionné à la dette héritée est de la fabrication du pouvoir», a-t-il dit.
«Troisièmement, les affirmations des responsables laissent supposer que le gouvernement, lorsqu’il hérite d’un problème, ne doit pas chercher à le résoudre, mais au contraire le laisser s’aggraver», a poursuivi l’ancien premier ministre. «Quelle logique bizarre! Est-il permis qu’un gouvernement ignore un problème existant, même si son origine remonte à une époque antérieure?»
«A cela s’ajoute le fait que le plan 2000, établi en 1992 et qui n’a pas vu le jour, prévoyait que le budget 1995 serait excédentaire et que l’excédent augmenterait d’année en année, de sorte que les dépenses de reconstruction et de développement puissent être entièrement couvertes à partir d’un certain moment. Cela signifie que la conception qui prévalait en 1992 allait dans le sens d’une volonté de régler progressivement la question du déficit budgétaire à partir de 1995 et non de la laisser s’aggraver», a-t-il souligné.
«Mais, dans la pratique, le gouvernement a fait le contraire, laissant filer le déficit et la dette et se comportant comme s’il n’était pas concerné par la question, sous prétexte qu’elle était héritée», a-t-il encore dit.
M. Hoss a conclu en comparant les arguments des responsables sur la dette héritée à «la feuille de vigne qui ne cache pas les défauts de la politique qu’ils ont adoptée au cours des cinq dernières années».
«En pratique, a-t-il dit, le gouvernement a fini par reconnaître son erreur et a admis pour la première fois l’existence d’un problème et la nécessité de suivre la voie de la rationalisation des dépenses, de la rigueur et de l’arrêt du gaspillage, alors qu’il se refusait auparavant à voir le danger représenté par la hausse continue du volume de la dette due au déficit budgétaire».

La réponse du
gouvernement

Le ministère des Finances a aussitôt répliqué à M. Hoss en affirmant que les montants dont a fait état l’ancien premier ministre n’étaient «pas précis».
Selon un communiqué du ministère, le volume total de la dette publique intérieure s’est élevé au 31 octobre dernier à 16.862 milliards de livres et atteindra environ 17.500 milliards à la fin de l’année en cours.
Le communiqué précise que le ministère adopte dans la comptabilisation de la dette intérieure les méthodes du Fonds monétaire international (FMI) et de la plupart des Etats membres.
Il affirme en outre que les taux d’intérêt pratiqués avant l’arrivée au pouvoir de M. Hariri atteignaient une moyenne de 34% et que le gouvernement Hariri est parvenu à réduire progressivement ces taux, «sauf en de rares occasions, en raison des tiraillements politiques qui ont failli menacer la stabilité monétaire ou des agressions israéliennes, comme en juillet 1993 et avril 1996».
Le ministère indique aussi que, contrairement aux chiffres avancés par M. Hoss, le solde débiteur du Trésor auprès de la Banque centrale s’est élevé à près de 972 milliards de livres au cours des cinq dernières années.
Le communiqué a en outre renvoyé à M. Hoss ses accusations selon lequelles les responsables actuels ont laissé s’aggraver les problèmes hérités des gouvernements précédents. «Les Cabinets successifs de M. Hariri se sont attelés à la tâche de régler tous les problèmes que les gouvernements antérieurs avaient accumulés», affirme le ministère.
A la suite de ce communiqué, M. Hoss est revenu à la charge, en confirmant ses chiffres dans une déclaration à la télévision.
L’ancien premier ministre Sélim Hoss et le ministère des Finances se sont livrés hier à une guerre des chiffres autour du volume de la dette et des taux d’intérêt, une guerre qui illustre ainsi la précarité de toute solution aux problèmes du pays en l’absence de statistiques transparentes. M. Sélim Hoss a réfuté dans une déclaration les arguments du gouvernement...