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Actualités - REPORTAGE

Rencontres avec les trois présidents et réceptions officielles pour les participants au Refresher Program Parlement des journalistes : Berry matraqué de questions sur les libertés et la présence syrienne Le chef du législatif déplore le partage du paysage audiovisuel entre les principaux responsable

Journée des réceptions officielles, hier, pour les journalistes de l’Union catholique internationale de la presse (UCIP) participant au «refresher program». Pour leur troisième et dernière journée de leur session de formation, les journalistes ont été reçus au siège de l’Assemblée nationale, pour un «Parlement des journalistes», ainsi que par le président Hraoui et le chef du gouvernement. Le grand événement de la journée a été la séance parlementaire retransmise en direct par la télévision, à laquelle les journalistes étrangers, venus d’une trentaine de pays, ont pu assister. Deux heures durant, ils ont pu poser des questions en toute liberté, et écouter les réponses du président Nabih Berry. Ce dernier a eu droit aussi bien aux questions difficiles sur la présence des troupes syriennes au Liban, qu’aux questions faciles sur le Sud, la solidarité arabe absente ou la passivité de l’ONU. «Le blocus de l’Irak sera levé quand les Irakiens adjugeront les travaux de reconstruction de ce qui a été détruit dans le pays, à ceux qui les ont détruit», a-t-il répondu, à une question au sujet de la solidarité arabe et de l’Irak.

Du reste, aussi ouvertes qu’on les veuille, ce genre de séances ne se prête ni aux échanges, ni aux nuances, et l’auditeur doit se contenter souvent d’enregistrer une réponse qui ne correspond pas toujours à la question qu’il a posée. Pour beaucoup, l’intérêt de la séance était plutôt dans les questions plus que dans les réponses.
En dépit de ces réserves, le «Parlement des journalistes» a permis à M. Berry de prendre position sur des sujets du jour. Ainsi, ce dernier a solennellement condamné «au nom du Parlement», l’agression dont a été victime notre confrère Pierre Atallah, tout en mettant en garde contre les généralisations. Des incidents similaires se produisent parfois dans bien des pays occidentaux, a-t-il noté.
M. Atallah, rappelle-t-on, a obtenu l’asile politique en France, car il risque la prison au Liban pour «contact avec des agents de l’ennemi», en l’occurrence, le chef des Gardiens du Cèdre, M. Etienne Sacre. Arrêté une première fois, il a indiqué avoir été battu durant sa détention. Après sa libération, il a été roué de coups par des inconnus à Achrafieh.
Après avoir reconnu qu’au sortir de la guerre, il a fallu «rationner l’information», M. Berry a affirmé que le Liban peut se vanter d’être le premier pays de la région à s’être doté d’une loi sur l’audiovisuel. Il a cependant regretté la façon «malencontreuse» dont elle a été appliquée, et le partage du paysage audiovisuel entre les principaux responsables politiques du pays. Selon lui, il serait de loin préférable que le paysage audiovisuel soit aux mains des professionnels de la communication, et qu’il joue son rôle naturel de «Parlement ambulant».
Du reste, a assuré M. Berry, le nombre actuel de télévisions disposant de licence d’émission est «fictif», et sera révisé aussitôt qu’un rapport technique fixant la capacité de l’espace hertzien sera mis au point.
Les troupes syriennes

Pour répondre à la question «Les troupes syriennes au Liban sont-elles des troupes d’occupation?», M. Berry est remonté au début de la guerre. Il a parlé du rôle unificateur joué par la Syrie en 1976, à la demande même du leadership chrétien d’alors, dans un pays menacé d’éclatement par les guerres intestines qui le ravageaient. Il a ajouté que la question du départ des troupes syriennes du Liban ne sera examinée par le gouvernement qu’après le départ définitif des troupes israéliennes du pays. Il a révélé par ailleurs que les troupes syriennes avaient eu 12.000 morts et plusieurs centaines de leurs véhicules détruits, lors de l’invasion israélienne de 1982, et souligné que des «lignes rouges» fixées, aussi bien par le monde occidental que les pays arabes, leur interdisent de se rendre au Liban-Sud. Indirectement, pourtant, en se chargeant de missions de sécurité ailleurs, les soldats syriens permettent à l’armée libanaise d’être massivement présente dans la partie méridionale du pays, a-t-il indiqué.
Par la même occasion, M. Berry a fustigé un monde arabe incapable de solidarité, qui prend aujourd’hui ombrage de la grande solidarité entre le Liban et la Syrie, mais dont les promesses, notamment financières (au sommet de Fez et après l’accord de Taëf), sont restées sans lendemain.

Pays de la modération

Sur la convivialité islamo-chrétienne au Liban, le président de l’Assemblée nationale a adopté des positions aussi clairvoyantes que rassurantes. Il a notamment affirmé, dans l’esprit de l’Exhortation apostolique, que «la présence chrétienne au Liban n’est pas une question de nombre», et que les chrétiens constituent «une partie essentielle du monde arabe». La pérennité du Liban comme entité nationale est étroitement liée à la présence chrétienne, a-t-il souligné.
A une question au sujet des Libanais déplacés par la guerre, et du retour encore timide dans les régions dont ils ont été expulsés, M. Berry a répondu en affirmant que ce retour — dans la montagne, au Akkar —, est devenu moins une nécessité de sécurité, qu’une nécessité de développement. Il a ajouté qu’au cours des séances de travail qui viennent de se tenir, dans le but de prendre les mesures qui s’imposent pour assainir la situation financière du pays, il a été question de trouver des fonds pour financer ce retour soit grâce à un emprunt, soit grâce à un contrat de location-vente du téléphone cellulaire.
Toutefois, M. Berry a répondu par une boutade à la question posée par un journaliste libanais travaillant en Italie, partagé entre son amour pour le Liban et sa cause, et le sombre tableau de la gestion des affaires publiques que ne cesse de brosser le chef de l’Eglise maronite.
Il n’a pas su répondre, non plus, à la question d’une journaliste française sur la nécessaire analyse de ce qui s’est passé durant la guerre. «Rendre justice à ce qui s’est passé. Faire un travail d’analyse, d’expression, de justice aussi», voilà ce que proposait la question. A quoi M. Berry s’est contenté de répondre que le Liban a promulgué une loi d’amnistie et a choisi de ne plus demander des comptes pour ce qui s’est produit avant l’accord de Taëf (1989), rejetant sur «le système politique» d’alors la responsabilité des brèches par lesquelles des parties externes ont pénétré, pour déchirer le corps national.

La protection
des touristes

A la question de savoir ce que le Liban fait pour protéger les touristes après l’attentat de Louxor, posée par M. Günther Mees, président de l’UCIP, M. Berry a répondu en refusant l’amalgame, fabriqué par la presse occidentale, entre terrorisme et résistance. Le Hezbollah, présenté comme «pro-iranien» et assimilé à une organisation terroriste, c’est une fraction de Libanais qui exercent leur droit à la résistance, a-t-il expliqué. Et d’ajouter qu’au Liban «il n’y a pas de terrorisme, mais une résistance».
M. Berry s’est fait applaudir en condamnant sans appel l’attentat intégriste de Louxor, et en affirmant qu’en qualité de musulman, «il ne voyait pas quel lien peut s’établir entre les principes coraniques et cet acte». «L’extrémisme n’a pas besoin de courage, a ajouté M. Berry, mais la modération, si. Le Liban est le pays de la modération».
«Terre sainte aux yeux des chrétiens, pour avoir été foulée par les pieds du Christ, qui y a accompli, à Cana, son premier miracle, terre sainte aussi aux yeux de l’Islam, le Liban est une nécessité de civilisation», a encore dit M. Berry.

Invitation à Aoun

A une question sur les opposants bannis ou forcés objectivement à l’expatriation, comme le président Amine Gemayel ou le général Michel Aoun, M. Berry a répondu par une nouvelle invitation lancée au général Aoun à regagner le pays, et «à y exercer ses droits politiques, civils et juridiques». On rappelle que le général Aoun risque, au cas où il regagnerait le pays, d’être poursuivi pour recel de fonds publics, des sommes versées par ses sympathisants, à l’époque où il agissait en sa qualité de chef d’un gouvernement de militaires, pour soutenir sa cause. Selon le gouvernement, ces sommes appartiennent de droit au Trésor.
Et M. Berry de souligner, en réponse à une question annexe, que «l’emprisonnement du docteur Geagea n’a rien à voir avec les droits de l’homme», bien que les conditions de sa détention puissent être examinées par les autorités judiciaires.
Vers 13 heures, à l’issue de la réunion parlementaire, les journalistes de l’UCIP se sont rendus au domicile du chef du gouvernement, qui leur a fait un exposé de la situation financière, économique et politique du pays. Les questions posées au Parlement ont de nouveau été proposées au chef du gouvernement.
Après avoir déjeuné à la table de l’archevêque maronite de Beyrouth, Mgr Boulos Matar, les congressistes ont regagné l’auditorium du Couvent de la Croix, où ils ont clôturé leurs travaux, après avoir suivi trois exposés proposés par le directeur du «Anwar», M. Rafic Khoury, le professeur Antoine Messarra et M. Rafic Chélala, directeur de l’Agence nationale d’information, dont l’allocution a été lue par M. Farès Gemayel.

Avec Hraoui

En soirée, les congressistes ont été reçus par le chef de l’Etat.
S’adressant aux membres de la délégation, le président Hraoui a commencé par rappeler succinctement les multiples épreuves endurées par le Liban lors de la présence palestinienne armée dans le pays. «C’est parce que le Liban est un pays hospitalier que nous avons dû subir le poids de la présence palestinienne», a notamment souligné le chef de l’Etat qui a précisé sur ce plan que les Eglises ont été les premières à accueillir les réfugiés palestiniens.
«Israël, a ajouté le président Hraoui, a exploité l’hospitalité du Liban afin d’envahir le Sud, dans une première étape, et la capitale, par la suite. Aujourd’hui encore, Israël continue d’occuper une partie du Sud et de la Békaa-Ouest». Le chef de l’Etat a demandé à ce propos à la presse catholique d’exposer à l’opinion publique internationale le droit du Liban à recouvrer sa souveraineté totale sur l’ensemble de son territoire. Après avoir évoqué le massacre de Cana, le président Hraoui s’est demandé pour quelles raisons les résolutions internationales sont appliquées partout dans le monde sauf au Proche-Orient.
En conclusion, il a affirmé que le Liban demeurera «le pays de la tolérance, de la liberté et de la démocratie».
Journée des réceptions officielles, hier, pour les journalistes de l’Union catholique internationale de la presse (UCIP) participant au «refresher program». Pour leur troisième et dernière journée de leur session de formation, les journalistes ont été reçus au siège de l’Assemblée nationale, pour un «Parlement des journalistes», ainsi que par le président Hraoui et...