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Actualités - ANALYSE

Les présidentielles, clé de toute grille politique

«Pour comprendre ce qui se passe sur la scène locale, pour décrypter la grille politique, une seule clé: les présidentielles...» C’est un fin spécialiste, qui sait parfaitement de quoi il parle qui s’exprime ainsi. «On a beau soutenir que le dossier est clos jusqu’à nouvel ordre (des décideurs…) toutes les manœuvres que les dirigeants déploient en coulisse, tous les propos qu’ils tiennent sur la scène publique se trouvent déterminés par leurs calculs préélectoraux et par la lutte d’influence féroce qui les oppose déjà au sujet de la configuration du prochain régime, que chacun veut être en mesure de contrôler ou à tout le moins d’y installer un solide allié...».
Des députés qui reviennent de Damas affirment pour leur part que les responsables syriens «restent agacés par l’ouverture prématurée d’une campagne des présidentielles qui suscite une tension préjudiciable à la stabilité du Liban notamment dans le domaine socio-économique. Ils ont donc laissé entendre au président Rafic Hariri que son initiative, prise dès octobre dernier soit une bonne année avant l’échéance normale, n’était pas des plus heureuses...».
On sait en effet que sans que nul ne lui ait posé la question, le président du Conseil avait affirmé tout de go que cette fois il ne serait absolument pas question de proroger le mandat de M. Elias Hraoui, donnant ainsi le coup d’envoi à la course entre candidats à la succession présidentielle. Ce à quoi l’hôte de Baabda avait riposté par une surenchère immédiate: il ne verrait pas d’un mauvais œil qu’on abrégeât la durée de son mandat, des élections anticipées pouvant se faire dès le printemps prochain. Après quelques jours de tiraillements, de polémique et de grincement des dents, les décideurs étaient intervenus pour calmer le jeu, «recommander » qu’on classe l’affaire jusqu’ à l’automne de l’an prochain et qu’on oublie pour de bon cette histoire d’élections anticipées.

Condamnation

«Cependant, reprend la personnalité ministérielle citée plus haut, les dirigeants font simplement semblant de ne plus s’intéresser à la question. Ils n’en parlent plus en public, mais c’est tout. Même leurs propositions ou contre-propositions concernant le traitement de la crise socio-économique s’inspirent visiblement de leurs stratégies électorales respectives. Il n’est pas besoin d’être grand clerc, ajoute ce responsable informé, pour deviner qu’en coulisse des tractations serrées se tissent autour du thème des élections présidentielles. Chacun prépare ses batteries, affûte ses armes, se cherche des alliés, tente de se ménager une position favorable, tout en développant un effort prophylactique qui consiste à gêner le plus possible l’adversaire dans ses mouvements».
Ce politicien du premier rang et du premier cercle, juge sévèrement «l’agitation fébrile autant que discrète des leaders qu’appâte une échéance dans laquelle ils n’ont pourtant pas leur mot à dire. Plus exactement, et aucun Libanais ne l’ignore, on ne tiendra compte de leurs avis respectifs que dans la mesure toute relative où ils peuvent concorder avec les souhaits des vrais grands électeurs... La décision, est-il besoin de le rappeler, n’est pas d’ordre local et il est vain de montrer qu’on s’occupe de l’affaire car si on veut ainsi faire croire qu’on a de l’importance, on ne trompe personne...».
Après cette pique, cette source précise que «sauf changement de programme, la sélection effective des candidats sérieux comme l’élection de l’un d’eux dépendra de Damas et même, plus exactement, du président Hafez el-Assad en personne. Bien entendu officiellement il n’en sera pas ainsi, et l’on dira comme toujours que ce sont les Libanais seuls qui ont fait leur choix; mais personne n’ignore que, surtout après les péripéties mouvementées de 1988 puis de 1989, la Syrie a pratiquement obtenu de désigner le chef de l’Etat libanais, sous condition que l’Amérique garde un droit de regard et puisse faire prévaloir la nécessité de prendre en compte certains critères qui lui importent, comme évidemment le fait que le nouveau président ne devrait pas être connu pour son anti-américanisme. Ou encore comme le fait, dont les Syriens conviennent encore volontiers, que la présidence doit rester aux mains des maronites ce qui n’est plus aussi évident que par le passé».
Et d’estimer ensuite que «tout naturellement quand il aura à se pencher sur le dossier, le président Assad pourra consulter les spécialistes syriens de la question libanaise, dont le vice-président M. Abdel Halim Khaddam. Il est très probable, dans le même ordre d’idées, que le chef des S.R. syriens au Liban, le général Ghazi Kanaan, remettra au président Assad un rapport détaillé sur les candidats en lice comme sur les critères de sélection qui pourront être retenus».
On peut supposer que beaucoup de candidats potentiels seront d’une «coopérativité» parfaite. Mais il faudra quand même voir, le moment venu, dans quelle mesure on voudra ou non porter le choix sur un homme que la rue chrétienne admettrait volontiers. Autrement dit le choix de Damas pourrait beaucoup dépendre, dans un sens ou dans l’autre, de l’état de ses relations fin 98 avec le camp de l’Est, singulièrement avec son porte-flambeau, le patriarcat...

Ph.A-A.
«Pour comprendre ce qui se passe sur la scène locale, pour décrypter la grille politique, une seule clé: les présidentielles...» C’est un fin spécialiste, qui sait parfaitement de quoi il parle qui s’exprime ainsi. «On a beau soutenir que le dossier est clos jusqu’à nouvel ordre (des décideurs…) toutes les manœuvres que les dirigeants déploient en coulisse, tous...