Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

Crise irakienne : les quatre tentent à Genève d'éviter un dérapage L'option militaire n'est pas imminente selon Londres

Mission (à moitié) réussie pour la diplomatie russe, qui est montée au créneau pour tenter de désamorcer la crise irakienne: les ministres des Affaires étrangères des grandes puissances siégeant au Conseil de Sécurité — moins la Chine, qui sera représentée par son ambassadeur auprès de la conférence sur le désarmement — devaient se retrouver à partir de 3h du matin heure de Beyrouth, à Genève pour débattre d’un projet de règlement élaboré par Boris Eltsine et Tarek Aziz. Les discussions s’annonçaient serrées, Washington ayant adopté une attitude «assez rigide» selon certaines sources. Pour Londres, l’option militaire «n’est pas imminente», même si la force de frappe US devait être au complet le week-end à venir, dans le Golfe. Le secrétaire de l’ONU, «prudemment optimiste», selon son entourage, «se croise les doigts» pour que la réunion de Genève réussisse. A Bagdad, le Parlement a été convoqué d’urgence à une réunion ce matin, sans doute pour examiner les conclusions auxquelles auront abouti entre-temps les ministres des A.E., dans la métropole suisse
M. Kofi Annan «est tenu informé par les gouvernements de leurs discussions; les ministres sont maintenant les principaux acteurs», a déclaré le porte-parole du secrétaire général de l’ONU, qui a ajouté: «Il espère que nous sommes sur la voie d’une solution diplomatique».

Le plan russe

Les discussions doivent se dérouler au Palais des nations, le siège européen de l’ONU, et une conférence de presse pourrait clôturer la rencontre. De source diplomatique à Genève, la proposition élaborée par le président russe Boris Eltsine et le numéro deux irakien Tarek Aziz devrait faire briller «une lumière au bout du tunnel». Ses grandes lignes seraient les suivantes:
l D’une part, l’Irak accepte sans conditions la reprise des inspections de l’UNSCOM, dont la plupart des membres ont quitté l’Irak le 14 novembre, cela avec la participation d’inspecteurs américains. Les vols de surveillance d’avions-espions U-2 prêtés par les Etats-Unis à l’ONU se poursuivraient.
l D’autre part, les dossiers nucléaire et balistique seraient refermés, l’Irak étant donc considéré comme désormais en règle dans ces domaines.
Et concernant un éventuel aboutissement des dossiers biologique et chimique, des critères précis seraient établis, permettant à l’Irak de savoir plus exactement ce qu’on attend de lui.
Il reste à savoir, remarquent les observateurs, si les Etats-Unis peuvent accepter cette dernière suggestion, alors que le président Bill Clinton n’a pas cessé de répéter que le fond du problème est que l’Irak ne puisse plus jamais menacer ses voisins de destruction massive.
La réunion de Genève devrait porter en outre sur un éventuel assouplissement de la résolution onusienne «pétrole contre nourriture», en vigueur depuis un an.

Volonté de compromis

Peu avant la rencontre, Bagdad soulignait sa volonté de compromis. «Nous souhaitons qu’on puisse trouver une méthode de travail permettant la levée des sanctions. Pour notre part, nous nous sommes engagés à respecter les résolutions du Conseil de Sécurité», a ainsi déclaré Abdel-Amir Ali Anbari, représentant irakien à l’UNESCO, à Paris, qui avait notamment négocié l’accord «pétrole contre nourriture».
«Nous sommes disposés à coopérer au maximum», a-t-il ajouté tout en souhaitant — sans en faire une condition préalable — une composition plus équilibrée de l’UNSCOM, dominée selon Bagdad par les Américains.
Paris a répondu positivement mercredi à cette demande ancienne de l’Irak de voir l’UNSCOM étoffée. «Si l’UNSCOM nous demande de faire plus, nous examinerons cette requête avec bienveillance», a dit le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Anne Gazeau-Secret.
Pour Washington toutefois, ce n’est qu’une fois la coopération irakienne avec l’UNSCOM pleinement restaurée que pourrait être envisagé un réexamen de certains mécanismes de fonctionnement, voire de la composition de la commission, qui est au centre des préoccupations de Bagdad.
Les Etats-Unis n’entendent pas faire de grandes concessions à Saddam Hussein notamment sur ce point. Leur ambassadeur à l’ONU, Bill Richardson, a affirmé que pour Washington «il ne doit pas y avoir de compromis sur l’UNSCOM».
«La composition de l’équipe doit être faite sur des critères scientifiques et techniques par l’ONU et non par l’Irak ou pour des raisons politiques», a souligné l’ambassadeur américain à New York.
Le président US, dans une allusion au renforcement en cours du dispositif militaire américain dans le Golfe, a déclaré: «Nous prenons toutes les mesures pour nous assurer que nous sommes prêts pour toutes les options nécessaires». Une option militaire, a toutefois indiqué Lord Gilbert, ministre d’Etat britannique à la Défense, n’est pas imminente, ajoutant: «Des efforts sont menés pour aboutir à une solution diplomatique et je n’ai aucune raison de croire à l’imminence d’une opération de guerre».
Quant au secrétaire au Foreign Office Robin Cook, il a affirmé: «Nous allons continuer à travailler pour arriver à un accord politique qui permettra d’atteindre notre objectif commun: le retour de l’équipe d’observateurs de l’UNSCOM et le respect total par l’Irak des résolutions de l’ONU».
Plus tôt, le premier ministre britannique Tony Blair a affirmé à la Chambre des Communes qu’il était «absolument essentiel que (Saddam Hussein) cède, ou qu’on le force à céder».
«Bien entendu, nous chercherons une solution diplomatique, mais il faut qu’il cède, parce que s’il ne le fait pas, nous serons confrontés au problème, peut-être d’une manière différente et bien plus difficile, dans quelques années», a dit M. Blair.
Il reste que sur le terrain, le dispositif US dans le Golfe sera complètement en place ce week-end, fort de chasseurs furtifs, bombardiers et d’une véritable armada navale, prêt à intervenir dans la crise contre l’Irak, ainsi que l’ont déclaré les responsables américains.
Le porte-avions George Washington, ainsi que son groupe naval, a quitté mercredi la mer Rouge et devrait se trouver dans le Golfe vendredi.
En outre, six avions chasseurs furtifs F-117 Stealth ont quitté mercredi la base aérienne de Holloman, au Nouveau Mexique, à destination du Koweit, et six bombardiers B-52 devaient s’envoler de celle de Barksdale en Louisiane, selon les mêmes sources. Ces derniers avions doivent se rendre sur l’île de Diego Garcia, dans l’océan Indien, et seront accompagnés de quatre avions de ravitaillement en vol KV-135.
L’arrivée, prévue ce week-end, dans le Golfe de ce renfort achève ainsi un déploiement permettant aux Etats-Unis de lancer des frappes aériennes contre l’Irak au cas où la diplomatie échouerait et si Washington décide de recourir à la force.
Au total, les Etats-Unis compteront alors 27.000 hommes (contre 19.500 actuellement) dans la région à bord de 22 navires de guerre et dans les bases aériennes en Arabie Séoudite, Turquie, Koweit et dans l’océan Indien.


Mission (à moitié) réussie pour la diplomatie russe, qui est montée au créneau pour tenter de désamorcer la crise irakienne: les ministres des Affaires étrangères des grandes puissances siégeant au Conseil de Sécurité — moins la Chine, qui sera représentée par son ambassadeur auprès de la conférence sur le désarmement — devaient se retrouver à partir de 3h du matin...