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Actualités - CHRONOLOGIE

Hariri a conféré à Damas avec Assad et Khaddam Le conseil des ministres proclamera aujourd'hui Baalbeck-Hermel zone militaire

Le Conseil des ministres ordinaire, qui doit se tenir ce matin au palais de Baabda sous la présidence du chef de l’Etat, devra plancher sur deux dossiers brûlants qui sont sans lien direct entre eux mais qui ont quand même un dénominateur commun: la crise socio-économique. Entre la fronde de cheikh Sobhi Toufayli, qui continue de bafouer et de défier le gouvernement, et la grève d’avertissement de vingt-quatre heures qui devrait paralyser le pays demain, jeudi, à l’appel de la CGTL, l’Exécutif se trouve confronté à deux défis qui, pour l’heure, tendent à éclipser les autres sujets de polémiques qui ont meublé l’actualité locale au cours des derniers jours (budget; municipales; bataille présidentielle etc.).

Dans l’immédiat, le cas Toufayli focalise l’attention du pouvoir bien plus que l’agitation sociale. Preuve en est la visite-éclair que le premier ministre Rafic Hariri a effectuée hier à Damas où il a examiné la question avec le président Hafez el-Assad et le «numéro deux» syrien Abdel-Halim Khaddam. Ces entretiens, qui font suite aux concertations entreprises lundi soir au palais de Baabda entre les pôles de la «troïka», ont été principalement axés sur les mesures que le gouvernement envisage de prendre afin de juguler et de contrôler le mouvement de désobéissance civile enclenché par cheikh Toufayli dans la région de Baalbeck-Hermel.
A son retour à Beyrouth, en soirée, M. Hariri a rendu visite au président Hraoui et à M. Berry afin des les informer de la teneur des ses entretiens avec les dirigeants syriens. Les sources proches du pouvoir ont indiqué à ce propos que le Conseil des ministres approuvera aujourd’hui un décret, sur proposition des ministres de l’Intérieur et de la Défense, proclamant Baalbeck-Hermel zone militaire. Cette région sera ainsi placée sous le contrôle direct de l’armée libanaise et toutes les autres forces sécuritaires (libanaises) seront sous le commandement de Yarzé.
C’est sur base de l’article 4 de la loi de Défense, amendée par le décret législatif 102 de 1984 (adopté sous le mandat du président Amine Gemayel), que le gouvernement proclamerait Baalbeck-Hermel zone militaire. L’article 4 en question stipule, notamment, que «si l’Etat est la cible, dans une certaine région, d’actions qui portent atteinte à sa sécurité et à ses intérêts, l’armée peut alors être chargée de maintenir la sécurité dans la région en question, par décret pris en Conseil des ministres, sur proposition des ministres de la Défense et de l’Intérieur».
Dans la pratique, l’armée aura comme prérogatives, toujours selon l’article 4, d’effectuer des perquisitions, d’interdire les rassemblements, de poursuivre les pêcheurs en eaux troubles, et de lutter contre la contrebande. La mesure qui serait ainsi prise aujourd’hui par le gouvernement ne correspond pas à un état d’urgence. Elle vise plutôt à accorder à l’armée de larges pouvoirs afin de «rétablir l’ordre à Baalbeck-Hermel».
La troupe, rappelle-t-on, avait déjà été chargée en septembre dernier de se déployer en force dans le secteur, afin de juguler le mouvement de cheikh Toufayli. Elle n’avait pris position, cependant, que sur les grands axes routiers sans s’aventurer dans les villages ou les quartiers intérieurs, et, surtout, sans prendre des mesures sécuritaires draconiennes. Il ne s’agissait alors que d’un simple «déploiement» qui n’a pas eu de grandes conséquences sur le terrain. En proclamant Baalbeck-Hermel zone militaire, l’Exécutif semble vouloir donner carte blanche à la troupe afin qu’elle puisse opérer des perquisitions et prendre des mesures répressives en fonction de la situation.

Murr optimiste

Cette fermeté renouvelée de la part de l’Etat ne paraît pas inquiéter outre mesure cheikh Toufayli. Celui-ci demeure en effet serein et affirme même devant ses visiteurs qu’il ne s’attend nullement à des rafles ou des arrestations parmi ses partisans. Pourtant, des commissions rogatoires avaient été délivrées en septembre dernier par le procureur général près la Cour de cassation Adnan Addoum afin d’appréhender tous ceux qui incitent à la désobéissance civile. Aucune suite n’a été donnée à ces commissions rogatoires, et les partisans de cheikh Toufayli poursuivent leur mouvement de fronde...
En tout état de cause, dans le but, sans doute, d’atténuer au niveau populaire l’impact médiatique des mesures militaires qu’il prendra aujourd’hui pour contenir la «révolte des affamés» enclenchée par l’ancien secrétaire général du Hezbollah, le gouvernement prendra bien soin de réaffirmer, parallèlement, sa détermination à mettre à exécution le programme de développement de 150 milliards de livres libanaises destiné à Baalbeck-Hermel et aux autres régions qualifiées de «nécessiteuses». Le Conseil des ministres se contentera, aujourd’hui, de rappeler sa position de principe à ce propos puisqu’aucun projet ne peut être exécuté concrètement avant que les fonds nécessaires ne soient au préalable assurés.
L’Etat parviendra-t-il ainsi à sauver la face et à imposer ne fut-ce qu’un semblant d’autorité à Baalbeck-Hermel? Le ministre de l’Intérieur Michel Murr paraissait optimiste hier à ce propos. Il a affirmé, de fait, au cours d’un meeting oratoire, qu’il se rendra prochainement à Baalbeck-Hermel, «lorsque l’Etat y rétablira son autorité». M. Murr se proposerait même de tenir sous peu une réunion du conseil central de sécurité au sérail de Baalbeck.
Quant à cheikh Toufayli, il ne semble pas vouloir engager une véritable épreuve de force avec le pouvoir. Dosant minutieusement sa fronde, il affiche pour l’heure une attitude pragmatique et affirme qu’il pourrait assouplir quelque peu sa position si le gouvernement «fait un geste» dans sa direction. A l’évidence, les possibilités de manoeuvres et les soupapes de sécurité ne manquent donc pas de part et d’autre.
Le Conseil des ministres pourrait avoir recours à cette même tactique de louvoiement pour ce qui a trait au deuxième dossier brûlant de l’actualité: la grève de la CGTL. A défaut d’adopter des mesures concrètes sur le plan des revendications salariales, le gouvernement pourrait décider de relancer le dialogue avec le mouvement syndical, en incitant à de plus amples concertations entre les partenaires sociaux. Mais face à la complexité du dossier social, le cas Toufayli parait peut-être plus facile à gérer...
Le Conseil des ministres ordinaire, qui doit se tenir ce matin au palais de Baabda sous la présidence du chef de l’Etat, devra plancher sur deux dossiers brûlants qui sont sans lien direct entre eux mais qui ont quand même un dénominateur commun: la crise socio-économique. Entre la fronde de cheikh Sobhi Toufayli, qui continue de bafouer et de défier le gouvernement, et la...