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Actualités - REPORTAGE

Réédition de Mission de Phénicie , parution d'une biographie et d'une étude L'hommage à Ernest Renan

Ernest Renan était à l’honneur de la soirée inaugurale du salon «Lire en Français et en musique», édition 97. Cet éminent orientaliste, auteur notamment de la fameuse «Mission de Phénicie», rééditée pour la première fois par «Terre du Liban» et présentée au Salon, fait également l’objet de deux ouvrages: «Renan au Liban» de Hyam Mallat et «Renan», biographie signée Francis Mercury.

Par décret du 11 octobre 1860, Napoléon III charge Ernest Renan, jeune et brillant orientaliste, philosophe, savant, de conduire une «mission d’exploration dans l’ancienne Phénicie». Ernest Renan débarque le 20 octobre à Beyrouth. Il passera près d’une année dans la région, se déplaçant par monts et par vaux, notant les détails aussi bien archéologiques que liés aux paysages, aux peuples, à leurs coutumes... «Mission de Phénicie» paraît entre 1864 et 1872, en fascicules de 100 pages. «Il y en aurait eu quelque 800 exemplaires» indique Mme Fayza el-Khazen, responsable de la maison d’Edition «Terre du Liban». La réédition limitée (1.500 exemplaires) est fidèle à l’original. Elle comporte deux volets: un texte de 884 pages, «reproduit in extenso» et un classeur de 70 planches détachables, reproductions intégrales des lithographies originales. Dans la préface de la réédition, signée Jean d’Ormesson, l’académicien note que «la mission de Phénicie, qui devait durer un an et au cours de laquelle Henriette la soeur bien-aimée d’Ernest Renan, devait trouver la mort, aura des conséquences incalculables. Pour Renan d’abord. Une de ses oeuvres majeures — «l’Histoire des origines du christianisme» dont la publication s’étendra sur près de 20 ans et dont le premier volume, «la Vie de Jésus» allait éclater avec un bruit de tonnerre dans le ciel de la littérature et des croyances religieuses — voit le jour, au lendemain de la mission qui marque une étape décisive dans ses travaux. Ensuite, et surtout, pour les relations entre le Liban et la France. L’image de chacun des deux peuples dans le regard de l’autre en sortira modifiée et embellie».
Dans un texte explicatif sur «l’Itinéraire de Renan au Liban» Sami Karkabi souligne que Renan «a scrupuleusement noté tout ce qui était visible à la surface du sol, accompagnant ses descriptions et commentaires d’admirables et fidèles reproductions d’une rare précision». La mission de Renan se composait de quatre campagnes de fouilles: celles d’Aradus, de Byblos, de Sidon et de Tyr.

Deux ouvrages

L’ouvrage de Hyam Mallat, «Renan au Liban» (FMA), dans lequel on peut trouver un résumé de la «Mission de Phénicie», quelques lettres inédites et une étude, est un outil qui permet de comprendre l’oeuvre orientaliste de Renan.
Hyam Mallat, juriste et haut fonctionnaire, explique son choix par le fait que «Ernest Renan, humaniste et orientaliste, est une des grandes personnalités littéraires du 19e siècle. Mais c’est également l’auteur du premier ouvrage scientifique qui a identifié la situation archéologique phénicienne, libanaise». Il ajoute que «Renan a écrit une page de notre histoire archéologique. Mais il a été également profondément marqué par le Liban. Il y a d’ailleurs commencé à rédiger sa «Vie de Jésus»»...
M. Mallat indique que l’intérêt de Renan pour la Phénicie s’est manifesté très tôt, «puisque dès 1855, il publie un livre sur un auteur phénicien presqu’inconnu, Sanchoniaton». Et il souligne que «son ouvrage minutieux a permis de sauver une grande partie de notre patrimoine architectural, puisqu’il a relevé des sites qui n’existent plus, aujourd’hui».
Parallèlement, Francis Mercury, auteur de l’introduction de la réédition de «Mission de Phénicie», est à Beyrouth, pour présenter sa biographie de Renan.
«Il y a un intérêt évident à s’intéresser à des hommes qui ont traversé un siècle» remarque-t-il. «Renan (1820-1892) est un témoin cultivé, intelligent, qui approfondit les décisions et les commandes». Dans une approche très contemporaine, «il a cherché à replacer l’événement dans une perspective à la fois historique et visionnaire. Considérant que les choses ne sont pas d’aujourd’hui, mais qu’elles ont des racines historiques et qu’elles ont une projection dans l’avenir».

Un savant

Francis Mercury, historien, professeur d’université, journaliste -grand reporter et directeur des programmes documentaires et magazines sur l’ex-première chaîne publique française- a commencé à travailler sur Renan pendant ses études d’histoire. Il dit avoir été fasciné par trois choses dans le caractère de Renan: «D’abord, il était intéressant de voir comment cet homme brillant du 19ème siècle a mené sa vie de famille : Renan était d’un grand égoïsme, il laissait les femmes (mère, soeur, épouse) prendre en charge tout ce qui était important dans l’existence, alors que lui se consacrait entièrement aux études qu’il dirigeait. Paradoxalement, cet égoïsme l’a sauvé. Deuxièmement, c’est un homme qu’on a mal compris, parce qu’il ne prenait pas la peine d’expliquer ou de se défendre. Troisièmement, c’est sa volonté de connaissance. Conscient de la nécessité de connaître la langue d’un peuple pour accéder à sa culture et à sa civilisation, il apprend, très tôt l’arabe, l’hébreu et l’araméen». Et M. Mercury indique qu’Ernest Renan «a été un vrai savant dans le domaine de l’écriture. Il a fait dessiner et exécuter en acier les caractères du phénicien classique qui sont encore utilisés de nos jours . Ils constituent un patrimoine précieux à l’usage des éditeurs du monde entier».
Il relève que «la «Mission de Phénicie» marque le couronnement des travaux de recherche conduits par Ernest Renan, depuis le début de sa carrière, dans le domaine des langues et civilisations orientales».
Ernest Renan était, à l’instar des scientifiques de son temps, à la recherche d’une explication rationnelle de Dieu. Francis Mercury remarque dans l’introduction à la réédition de la «Mission de Phénicie», que «à sa mission officielle, il en rajoute une plus personnelle, qui touche à l’immense ambition d’en appeler à la terre, à la lumière, aux hommes d’Orient pour connaître la vraie figure de Jésus et peut-être même la source du projet messianique si souvent répété entre les rives du Nil et la Montagne du Liban».
Outre ce double intérêt historique et spirituel, l’oeuvre d’Ernest Renan est écrite «dans une langue d’une perfection absolue» remarque Francis Mercury. «C’est foisonnant, moins rigoureux que la langue du 17e siècle, mais plus coloré, plus riche».
Pour plus de détails, une rencontre sur Ernest Renan réunira MM. Francis Mercury et Hyam Mallat, ce soir, 20h, salle... Ernest Renan.
Aline GEMAYEL

Ernest Renan était à l’honneur de la soirée inaugurale du salon «Lire en Français et en musique», édition 97. Cet éminent orientaliste, auteur notamment de la fameuse «Mission de Phénicie», rééditée pour la première fois par «Terre du Liban» et présentée au Salon, fait également l’objet de deux ouvrages: «Renan au Liban» de Hyam Mallat et «Renan», biographie...