«Il est évident que la majorité des députés se préoccupent uniquement de conserver leur siège et leurs privilèges. Le pouvoir n’a pas eu besoin de les payer pour qu’ils abandonnent la motion de censure, ils sont pour ainsi dire payés chaque jour», commente sans complaisance le politologue Andreï Piontkovski, directeur du Centre d’études stratégiques de Moscou.
Mercredi soir, après une journée de vaine agitation qui a attiré des centaines de journalistes dans les couloirs du Parlement, les députés ont finalement décidé de ne rien décider, reportant au mercredi suivant l’examen de la motion déposée par le groupe communiste.
Jeudi, le porte-parole du Kremlin Serguei Iastrjembski se lançait à l’assaut: «Certains représentants de l’opposition ont eu ce matin une poussée de fièvre en présentant des exigences irréalistes», a-t-il dit, dans une allusion à une déclaration d’un haut responsable communiste qui avait réclamé pêle-mêle la démission du premier vice-premier ministre Anatoli Tchoubaïs et des correctifs fondamentaux à la politique économique libérale.
Le Kremlin, selon M. Iastrjembski, se refuse absolument à discuter la stratégie politique du gouvernement. «Il n’y a par ailleurs aucune nécessité de discuter des changements de cadres du gouvernement», a dit le porte-parole du président Boris Eltsine.
«Le gouvernement est prêt à écouter toutes les propositions, mais il n’admet pas le chantage», a-t-il ajouté.
Selon l’un des responsables du PC, Viktor Ilioukhine, les communistes réclament, outre la démission de M. Tchoubaïs, que l’Etat conserve son monopole «au moins sur les secteurs stratégiques, matières premières, pétrole et gaz».
Le PC demande en outre au gouvernement «de ne pas augmenter les prix de l’énergie l’an prochain ou sur les deux prochaines années», et de limiter au minimum les effets de la suppression des aides au logement. L’opposition veut, enfin, «un plus large accès aux médias».
«Si le président répond à ces suggestions, et à d’autres que nous allons préparer (...), le groupe parlementaire communiste et ses alliés sont prêts à reconsidérer leur décision sur la motion de censure», avait précisé M. Ilioukhine.
Mais le gouvernement semblait peu enclin au compromis, après avoir vu mercredi soir la Douma faire marche arrière sur son projet de voter la censure, à la suite d’un appel de Boris Eltsine.
Le premier ministre Viktor Tchernomyrdine a assuré qu’il était tout à fait exclu qu’un membre du gouvernement démissionne prochainement.
Avant le débat à la Douma, le chef du gouvernement avait cependant laissé entendre qu’il démissionnerait si la censure était votée. Dans ce cas, Boris Eltsine dissoudrait probablement la Douma et convoquerait de nouvelles élections.
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