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Actualités - CHRONOLOGIE

Perception des recettes et arrêt du gaspillage Le gouvernement met enfin le doigt sur la plaie Bras de fer Hariri-Berry au sujet de la politique fiscale (photo)


BRAS DE FER HARIRI-BERRY AU SUJET DE LA POLITIQUE FISCALE
Amélioration de la perception des recettes publiques, ou en d’autres termes, égalité de tous les Libanais devant l’impôt, arrêt du gaspillage, voire du pillage du Trésor, réforme administrative dont l’une des clefs est une moralisation de la vie publique à laquelle les responsables devront être les premiers à s’astreindre: le diagnostice est fait, les responsables ont désormais le doigt sur la plaie.
C’est dans cette conscience des choses que, réuni à Baabda sous la présidence du chef de l’Etat, M. Elias Hraoui, le Conseil des ministres a entamé hier, l’examen du projet de «budget d’austérité» pour l’année 98. Ce budget atteindra la somme de 7.100 milliards de L.L., selon des sources du ministère des Finances, dont 3.100 milliards de L.L. pour le service de la dette, 2.550 milliards de L.L. pour les salaires des fonctionnaires et 1.568 milliards de L.L. pour le reste des dépenses. En gros, et en termes relatifs, les budgets des différents ministères ont été réduits dans une proportion de 30 à 40%. Le débat, qui s’est concentré hier sur recettes, se poursuivra aujourd’hui et peut-être encore demain, a souligné le chef du gouvernement, à l’issue de la séance.
M. Rafic Hariri, qui n’a pas précisé le volume global du budget, s’est contenté de dire que le déficit prévu sera de 37%, à l’instar du chiffre qui avait été posé l’année dernière. Il a toutefois souligné que dans le calcul du déficit, il sera tenu compte de dépenses ne figurant pas habituellement dans le budget (comme les dépenses des municipalités), dans le but de contribuer à une plus grande transparence. «Aucune somme ne sera dépensée en-dehors de ce que prévoit le budget», a-t-il souligné.
Rendant compte des travaux du Conseil des ministres, M. Hariri a déclaré que l’amélioration de la perception des recettes et la réforme administrative figureront en tête des priorités du gouvernement, pour le prochain exercice budgétaire.
«Nous imposons aujourd’hui des taxes et des impôts, a déclaré (un peu par anticipation) M. Hariri. Les contribuables s’en accommoderont s’ils savent que les recettes sont dépensées de façon saine et convenable, s’ils savent que tout le monde accomplit son devoir. Les gens refusent de voir des catégories payer des impôts et d’autre pas. Il y a un bon nombre de questions que, à tort ou à raison, les gens se posent. Il faut donc que les choses soient claires, transparentes. Notre budget, avec le déficit que nous prévoyons, sera transparent et clair, et aucune somme ne sera dépensée en-dehors du cadre budgétaire».

Que faire en 1999?

Sur l’importance de la question des recettes, M. Hariri a déclaré: «Nous préparons cette année un budget dont le déficit est non seulement raisonnable, mais également justifié (...). Toutefois, une fois ce budget approuvé, le déficit annuel s’ajoutera, l’année prochaine, à la dette publique, et la question se posera à nouveau. Où trouverons-nous les recettes pour combler ce nouveau déficit? C’est ce qui a allongé le débat aujourd’hui. Que doit faire le gouvernement pour améliorer la perception des recettes? Il ne suffit pas de s’arranger pour trouver des sources de financement du budget de 1998. Le citoyen voudra savoir comment nous nous y prendrons en 1999».
«Je pense que le Conseil des ministres, en gros, est d’accord pour la priorité à cette question des recettes, a encore affirmé M. Hariri, car la question des dépenses est, dans l’ensemble, plus facile à cerner. Les salaires des fonctionnaires sont ce qu’ils sont, de même que le service de la dette. Dans les dépenses qui restent, il faut s’arranger pour que pas une piastre ne soit dépensée sans nécessité, qu’elle provienne du Trésor ou des prêts qui nous viennent de l’étranger».
Si M. Hariri a tellement insisté sur les recettes, affirment ses proches, c’est que les recettes prévues pour l’exercice budgétaire en cours ont été très en-deçà de celles qu’il prévoyait. C’est ainsi que le ministère de l’Intérieur a enregistré des recettes de 20 milliards de L.L. alors que les recettes escomptées étaient de... 115 milliards de L.L. Même déception au service mécanique et à l’EDL, où la moitié environ des recettes d’électricité ne sont pas perçues. Même déception pour les recettes provenant de la régularisation des dérogations à la loi sur le bâtiment, qui n’a permis de collecter que 60 milliards de L.L.
La seule satisfaction que M. Hariri aurait eu, dans ce domaine, proviendrait, du ministère des P. et T. où les recettes ont atteint, en six mois, 10 milliards de L.L.

Partie délicate

Les débats en Conseil des ministres ont été marqués par les interventions insistantes des ministres MM. Mahmoud Abou Hamdan et Ayoub Houmayed, appartenant tous deux au mouvement Amal, présidé par M. Nabih Berry, président du Parlement. Les deux ministres ont cherché à savoir dans le détail, les raisons qui ont justifié les coupes dans les budgets de leurs départements respectifs. Les coupes dans les budgets du Conseil du Sud, du ministère de l’Habitat et du ministère des Affaires sociales ne sont-elles pas jusqu’à un certain point, des mesures de rétorsion exercées par le chef du gouvernement à l’encontre des ministres proches de M. Berry, qui ont voté contre le plan d’emprunt de 800 millions de dollars que voulait lancer M. Hariri? se demandent les milieux proches du chef du mouvement Amal.
Par ailleurs, les deux ministres du mouvement Amal ont demandé que le plan d’emprunt de 800 millions de dollars figure dans le cadre du projet de budget, ce à quoi s’est opposé fermement M. Hariri. Il s’en est suivi une discussion qui a allongé la réunion du Conseil des ministres. Selon les milieux de M. Hariri, l’attitude de MM. Houmayed et Abou Hamdan, avait pour but principal de prolonger la discussion, et de retarder l’approbation d’un budget à laquelle il sera difficile de se soustraire, en fin de compte.
Les choses sont toutefois plus nuancées. En effet, une partie délicate s’est engagée entre M. Berry et Hariri, qui ont des vues divergentes sur la manière de conduire le programme de reconstruction. Le chef du mouvement Amal s’oppose en particulier, et il l’a redit hier avant la séance du Conseil des ministres, à toute hausse du prix de l’essence, et en général à toute — nouvelle — taxe indirecte qui toucherait les catégories sociales à revenu limité.
M. Berry ne cache pas non plus que le clientélisme politique, responsable d’une grande partie du gaspillage au sein de l’administration publique, se poursuit comme si de rien n’était. Alors même qu’on se plaint d’une pléthore de fonctionnaires (plus de 10.000 d’entre eux seraient pratiquement inutiles, sur un total d’environ 125.000), voilà que les Finances engagent 300 nouveaux inspecteurs, sans que l’Inspection centrale n’ait son mot à dire, a-t-il révélé.
Plus généralement, M. Berry déclare à qui veut l’entendre que l’Assemblée nationale compte pleinement jouer son rôle, lors du débat budgétaire, et qu’il existe 10 interpellations et 44 questions en souffrance au bureau de la Chambre. De quoi facilement transformer, au besoin, le débat budgétaire en débat de politique générale.
M. Berry est bien déterminé, aussi, à empêcher que le plan d’emprunt de 800 millions de dollars ne soit habilement amené sur le tapis par M. Hariri, et finalement approuvé, indépendamment du budget. Le président de l’Assemblée craint en effet que, ce faisant, il ne soit plus possible, dans un proche avenir, de lever les taxes nécessaires au financement de la nouvelle échelle des salaires dans le secteur public, qui prévoit une augmentation de 20%, et à laquelle il accorde la priorité sur tout autre investissement.
Dans ce combat de géants, les responsables se neutraliseront-ils les uns les autres pour, enfin, laisser le peuple respirer?
BRAS DE FER HARIRI-BERRY AU SUJET DE LA POLITIQUE FISCALEAmélioration de la perception des recettes publiques, ou en d’autres termes, égalité de tous les Libanais devant l’impôt, arrêt du gaspillage, voire du pillage du Trésor, réforme administrative dont l’une des clefs est une moralisation de la vie publique à laquelle les responsables devront être les premiers à...