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Actualités - ANALYSE

Pour l'heure rien n'irait sans la Syrie, estiment les modérés

«C’est une évidence, s’il n’y avait la Syrie comme garde-fou (c’est bien le mot), les divisions démentes de nos gouvernants auraient fait voler ce pays en éclats. L’anarchie se serait installée et très vite la paix civile aurait déménagé... C’est là un constat sec, objectif, immédiat que tout un chacun peut faire indépendamment de tout idéal, de toute idéologie, de tout sentiment et de tout ressentiment...»
L’ancien responsable qui tient ces propos n’est pas spécialement un fana de l’allégeance. Généralement il défend comme tout le monde, n’est-ce pas, le principe de relations privilégiées dans un cadre mutuellement indépendant. Dans un apparent paradoxe, il reproche aujourd’hui aux dirigeants «de vouloir cacher que s’ils se succèdent à Damas c’est pour supplier les Syriens d’intervenir... en leur faveur respective, bien entendu. Ils soutiennent l’un après l’autre qu’ils ne sollicitent pas l’arbitrage de l’autorité syrienne, qu’ils s’en voudraient de l’immiscer à son corps défendant dans nos affaires intérieures. Tout d’abord les responsables se rendent ainsi ridicules, car tout le monde sait pourquoi ils galopent l’un après l’autre sur le chemin de Damas. Ensuite le manque de transparence affaiblit encore le crédit de l’Etat qu’ils sont censés représenter et servir. Enfin si jamais l’opinion est prête à admettre une intervention, comme pour l’arrêt de la guerre, c’est quand elle vise à colmater les brèches provoquées par nos turbulents chefs-adversaires. Surtout quand, comme aujourd’hui, la crise est aussi grave que double, économique et politique à la fois. Il faut donc, si l’on veut être sincère et en répétant que c’est pour l’occasion seulement, remercier la Providence que nos preux chevaliers ne soient pas laissés à eux-mêmes, à s’entre-déchirer sur la lice devant nos yeux».
Finassant ensuite un peu, cette même personnalité ajoute que «cela tombe bien: dans la phase régionalo-internationale actuelle, et après le passage mi-figue mi-raisin d’Albright qui a paru contester à la Syrie la carte libanaise, cette puissance a sans doute elle-même besoin de montrer combien le Liban a besoin d’elle... Du même coup la fraction accusée de mettre en cause la présence syrienne doit un peu baisser le ton et adopter un profil bas car si le facteur syrien — pondérateur au niveau de la gestion de nos officiels — venait à s’effacer ce serait un chaos dont l’Est, devenu le plus faible dans l’équation locale, paierait certainement le prix le plus lourd».
Toujours est-il qu’après MM. Rafic Hariri et Nabih Berry, c’est M. Walid Joumblatt qui est allé à Damas expliciter son point de vue dans le conflit intergouvernemental sur le plan de développement, sur l’emprunt de huit cents millions de dollars et sur les moyens de le financer. Il a sans doute évoqué également, comme il l’a fait dans ses récentes déclarations, le passage d’Albright et la campagne que cette visite aurait ranimée dans les rangs des indépendantistes. Tout naturellement M. Joumblatt, ministre des Déplacés, a dû traiter de ce dossier si important sur le plan national, le retour devant être gage d’union et d’entente. Un retour pour lequel il manque encore, selon lui, plusieurs dizaines de millions de dollars, raison pour laquelle il apporte son soutien aux vues financières du président Hariri...
Mais comme M. Joumblatt insiste sur la répartition communautaire des crédits, les pôles de l’Est, se référant à un rapport de ses propres services qui indique que les fonds sont allés fifty fifty entre chrétiens et mahométans, lui rappellent que selon les nombreuses études de terrain, en réalité la proportion de sinistrés dans la montagne s’établit à 80% en faveur (si l’on peut ainsi s’exprimer) des chrétiens. Ce qui fait, concluent-ils, que la distribution est peut-être égale mais sûrement inéquitable...
Sur ce point aussi, les sources modérées citées plus haut croient savoir que «les autorités syriennes auraient conseillé à M. Joumblatt de réfréner ses élans d’attaque, l’essentiel étant pour le moment de calmer le jeu, d’arrondir les angles dans la mesure du possible, pour parvenir à un consensus global permettant d’éviter une crise ministérielle ouverte...»

Ph. A.-A.
«C’est une évidence, s’il n’y avait la Syrie comme garde-fou (c’est bien le mot), les divisions démentes de nos gouvernants auraient fait voler ce pays en éclats. L’anarchie se serait installée et très vite la paix civile aurait déménagé... C’est là un constat sec, objectif, immédiat que tout un chacun peut faire indépendamment de tout idéal, de toute...