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Actualités - ANALYSE

Nationalité : vive controverse mais dossier gelé

Comment va-t-on régler la question de la restitution de la nationalité aux émigrés, qui a divisé le gouvernement et soulevé une vive polémique dans le pays? On le sait: des ministres soutiennent que le projet de loi a bel et bien été approuvé en Conseil des ministres, alors que d’autres affirment le contraire. Les réfractaires veulent donc que l’on reprenne l’étude du texte pour y introduire des modifications, avant sa transmission à la Chambre, tandis que les hraouistes ne voient pas l’utilité d’un tel réexamen.
Mais en pratique, ce sont les réticents qui ont l’avantage: si le projet n’est pas revu, s’il n’y a pas un consensus à son propos au niveau de l’Exécutif, il n’en sera que plus facile au président de la Chambre, qui y est lui-même hostile, de le faire dormir pour de bon dans ses tiroirs, sans le faire débattre par l’Assemblée. De plus, dans sa forme initiale, le texte risque fort d’être renvoyé au gouvernement par les députés, s’ils étaient appelés à voter à son propos. Il est connu en effet que le bloc mahométan, qui contrôle Place de l’Etoile bien plus de députés chrétiens que le bloc chrétien ne contrôle de mahométans, est politiquement majoritaire et détenteur grosso modo du pouvoir législatif.
Toujours est-il que certains ministres proposent, pour qu’on sorte du conflit, de mettre sur pied une commission ministérielle qui établirait un nouveau code de la nationalité, conformément du reste au vœu émis dans le «document d’entente nationale» approuvé à Taëf. La nouvelle législation fixerait les modalités d’attribution et ou de restitution de la nationalité, sans laisser la question soumise au gré des intérêts, des arrangements ou des humeurs, confessionnelles et autres, des dirigeants.
On serait tenté de relever qu’une telle démarche rationnelle il aurait fallu l’adopter d’entrée de jeu lors de la naissance de la présente République: cela aurait sans doute permis d’éviter le grave dérapage des décrets qui en 1994 ont naturalisé quelque 150.000 étrangers, Palestiniens ou autres, dont bon nombre comme cela s’est vérifié par la suite, ne sont même pas installés dans ce pays.

Suspension

Toujours est-il que l’on a parlé d’un nouveau train de décrets «de compensation» au profit d’une majorité qui cette fois serait chrétienne. Mais, conséquente avec elle-même, l’opposition de l’Est a refusé ce bazar en soulignant que pour atteindre le quota nécessaire, on devrait encore une fois puiser dans les réserves des minorités chrétiennes de la région sans tenir compte de l’obligation de résidence. Autrement dit, il faudrait, pour faire nombre à peu près égal avec les musulmans de 1994 et vu qu’il n’en y a pas assez dans le pays même, naturaliser par exemple des coptes égyptiens ou syriaques irakiens qui résident en réalité en Egypte ou en Irak. Pour le reste, sur place il n’y aurait que quelques petits milliers de Philippins ou de Sri Lankais...
Quoi qu’il en soit, en attendant le règlement du différend actuel et la promulgation d’une nouvelle loi, le dossier de la réintégration des expatriés, ou plutôt des Libanais d’origine, reste gelé, ainsi d’ailleurs que les demandes de naturalisation présentées par des ressortissants étrangers résidant au Liban.
Du côté des hraouistes, on indique que le chef de l’Etat a été surpris, voire choqué par le tollé que sa proposition, faite avant son voyage au Brésil, a provoqué. Il ne voit pas le bien- fondé des objections, du moment qu’il ne s’agit pas d’accorder à des étrangers le privilège de la nationalité libanaise mais de la reconnaître à de vrais ayants-droit qui l’ont perdue par inadvertance.
Les hraouistes soulignent qu’on ne fait que suivre ainsi l’exemple de la Syrie, qui redonne la nationalité syrienne à tout expatrié qui en exprime le désir après en avoir été privé par suite des lapsus de communication ayant suivi la signature de la Convention de 1924 concernant les peuples de l’ancien Empire ottoman.
D’ailleurs, ajoutent les loyalistes proches de Baabda, le président Hraoui avait fait part de son projet au président Assad qui l’avait approuvé. Les hraouistes reconnaissent cependant que les décideurs n’étaient plus tellement d’accord par la suite et ils accusent leurs contempteurs d’avoir présenté l’affaire à Damas sous un angle partisan déterminé, pour se lancer ensuite dans des diatribes d’une incroyable violence et d’une rare grossièreté contre le régime.

Ventilation touristique

Il n’empêche que selon ses proches, le chef de l’Etat reste déterminé à mener son projet à bien et à faire redonner la nationalité libanaise aux Libanais d’origine qui en exprimeraient le souhait. Allant dans ce sens, il a demandé, lors de son voyage au Brésil, aux émigrés qui sont toujours détenteurs de la nationalité libanaise d’inscrire sans tarder leurs enfants comme Libanais auprès des ambassades et des consulats du Liban à l’étranger auxquels il enjoint de faciliter au maximum de telles formalités.
Il s’agit alors, conformément au droit du sang, de transmettre à Beyrouth pour enregistrement sur les bordereaux de l’état-civil les extraits de naissance des enfants d’émigrés.
Quant à ceux qui ont perdu la nationalité, le projet de loi prévoit de la leur redonner sur demande de leur part, à condition qu’ils aient gardé des racines au Liban, entendre des proches ou des biens. Faute de quoi ils peuvent quand même se faire déclarer comme résidents, s’ils achètent une parcelle d’une valeur minimale de 25.000 dollars et s’ils séjournent dans le pays d’origine au moins un mois tous les deux ans. Un système qui ferait rentrer beaucoup d’argent au Liban et lui assurerait une bonne ventilation touristique, affirment les hraouistes. Qui ajoutent qu’il serait contre-productif d’exiger, comme le fait le camp d’en face, que pour récupérer la nationalité libanaise, les expatriés reviennent définitivement au pays car beaucoup ne peuvent s’y résoudre.

E.K.
Comment va-t-on régler la question de la restitution de la nationalité aux émigrés, qui a divisé le gouvernement et soulevé une vive polémique dans le pays? On le sait: des ministres soutiennent que le projet de loi a bel et bien été approuvé en Conseil des ministres, alors que d’autres affirment le contraire. Les réfractaires veulent donc que l’on reprenne l’étude du...