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Actualités - OPINION

Carnet de route Lady Di ou la part du rêve

Il n’était pas fatal que Philippe Sollers, grand écrivain et intellectuel français s’il en est, cite Guy Debord et sa «Société du spectacle» dans un article (1) sur la mort de Lady Di. Parce que l’événement à lui seul s’inscrivait tant, et si immédiatement dans la réflexion théorique des situationnistes que s’y référer devenait quasiment inutile, pour les intellectuels qui n’en avaient pas besoin, et encore plus pour les rares midinettes qui ont dû sauter le passage. Ceci dit, le texte en question dominait de loin tout ce qui avait été écrit «à chaud» sur la disparition subite d’une jeune femme-jeune fille-princesse dont, depuis des semaines, les journaux nous donnaient des nouvelles quotidiennes.
Plus simplement, que s’est-il passé d’autre que la suppression brutale de la part du rêve qui habite tout un chacun, et à laquelle n’échappent ni les éboueurs ni les patriarches? Quelle qu’ait été la personnalité de la princesse de Galles, qu’elle ait été intelligente, un peu naïve ou tout à fait paumée, elle détenait, au physique et au moral, ce charme encore juvénile qui séduisait d’autant plus la presse et les foules que Diana leur apparaissait à la fois comme victime de la sécheresse monarchique et comme une «belle et bonne fille d’Angleterre» penchée sur les malades, qui venait de rencontrer le bonheur, après tant de vicissitudes, et qui, maquée ou pas avec un Arabe, était enfin resplendissante. La part du rêve s’était encore dilatée depuis Dodi (amour, argent, idylle inespérée, etc.). Et puis la mort. Les obsèques firent encore partie du rêve, ses enfants à Westminster, les monceaux de fleurs, le peuple amassé sur le cortège. Et puis c’est tout. Comme le disait un auteur insoupçonné «Vive le mélodrame où Margot a pleuré». Car il est moins grave, et plus libérateur de «faire pleurer Margot» sur Lady Diana que sur Tchernobyl, voire sur la purification ethnique ou les morts de notre frontière Sud. Ce n’est pas là adopter une position morale. C’est reconnaître simplement la supériorité thérapeutique de l’imaginaire sur un réel sans échappatoire. Garbo contre Hiroshima, Chaplin contre 1929, enfin Lady Di et Elton Jones contre la morosité britannique, monarchie en tête.

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Nous savons que Sa Béatitude le patriarche Nasrallah Sfeir, n’est pas flanqué, et ce n’est pas dans ses attributions, d’un aéropage d’économistes et de statisticiens. D’où ses déclarations sur la main- d’œuvre immigrée et son exhortation à ce que les Libanais fassent, sans honte, les sales boulots. En l’absence de statistiques «qualitatives», on peut se demander s’il est bon pour la dignité des pauvres qui se sont un tant soit peu élevés dans la pyramide sociale, de devoir renoncer à leur progrès. Et, en attendant un relevé exact de la situation, évitons que les déclarations de Bkerké, dont ce n’est sûrement pas l’intention, ne portent ses ouailles à la xénophobie.

Amal NACCACHE

(1) Le Nouvel Observateur, 4 septembre 1997.
Il n’était pas fatal que Philippe Sollers, grand écrivain et intellectuel français s’il en est, cite Guy Debord et sa «Société du spectacle» dans un article (1) sur la mort de Lady Di. Parce que l’événement à lui seul s’inscrivait tant, et si immédiatement dans la réflexion théorique des situationnistes que s’y référer devenait quasiment inutile, pour les...