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Actualités - ANALYSE

La souveraineté, objet d'une controverse sans fin

Une personnalité religieuse se demande «pourquoi chaque fois qu’un responsable ou un autre évoque la présence militaire syrienne c’est le tollé et les hauts cris qu’on pousse, en traitant l’intervenant d’agent à la solde d’Israël... Ou en l’accusant de menacer la paix civile, d’ouvrir la voie des conflits et des polémiques sans fin. Réclamer la souveraineté est ainsi assimilé, cuisant paradoxe, à de la haute trahison. Pourtant à Taëf les Libanais se sont entendus pour que les forces syriennes quittent le territoire, en étant dûment remerciées pour avoir aidé à mettre fin à la guerre domestique et pour avoir soutenu l’Etat libanais dans son redressement, dans un délai maximal de deux ans après approbation des réformes constitutionnelles. Ce pacte de base a été dénoncé en pratique par le pouvoir local en place et aujourd’hui les Libanais ne sont plus d’accord sur la date du départ de ces forces, de la fin de leur mission dans un pays qui en tout cas leur reste reconnaissant».
«Le contingent syrien, poursuit cette source, formait jadis le gros de la Force de frappe arabe mise sur pied à l’issue des sommets arabes de Ryad et du Caire tenus sous le mandat du président Elias Sarkis. Une force qui, sur le papier, était mise à la disposition personnelle du chef de l’Etat libanais pour l’aider à sauvegarder la paix et la sécurité au Liban. La mission de la FFA était de six mois renouvelables. Au bout de quelque temps, les différents pays arabes qui y contribuaient se sont retirés et la FFA n’était plus que syrienne. il lui arrivait d’intervenir avec ou contre tel des camps en présence, comme il lui arrivait de rester de côté, selon les développements, les circonstances et les régions. Le président Sarkis, voyant son propre mandat approcher de sa fin, a tenté, avec le concours du Cabinet que dirigeait le président Chafic Wazzan, de mettre en vigueur un plan de normalisation qui lui aurait permis de transmettre le pouvoir à son successeur en lui laissant un pays contrôlé uniquement par les forces régulières libanaises. Un calendrier-programme avait été présenté à la conférence des ministres arabes des affaires étrangères réunie à Beiteddine. Le ministre syrien des A.E., M. Abdel Halim Khaddam, avait mal pris la chose et attaqué le président Wazzan qui était présent en affirmant qu’il ne représentait pas la volonté de la majorité des Libanais. Et, comme on sait, M. Wazzan a payé le prix de son «audace» par la suite au niveau de sa carrière politique qu’il a dû interrompre avant terme».

Insistance

«Sans en démordre, rappelle encore le dignitaire religieux, le président Sarkis avait adressé au sommet arabe de Fès un mémoire le priant de» prendre note de la décision du Liban concernant la nécessité d’un retrait de toutes les forces armées non libanaises, d’une cessation de la présence armée des organisations palestiniennes, de la proclamation de la fin de la mission de la Force de frappe arabe, le sommet étant invité à offrir toute son aide au gouvernement libanais afin qu’il puisse exercer son autorité sur l’ensemble du territoire national sans exception par le truchement de l’armée et des Forces de sécurité intérieures.
«Effectivement, le sommet a pris acte de cette décision libanaise, recommandant» aux deux gouvernements de la Syrie et du Liban de se réunir dans les meilleurs délais pour mettre au point les mécanismes techniques du retrait syrien à la lumière du retrait israélien. «La délégation libanaise avait inscrit ses réserves concernant cette résolution qui ne répondait pas à ses attentes car elle mélangeait les torchons et les serviettes, liant le départ syrien au retrait israélien».
«Plus tard, en septembre 1983, poursuit cet infatigable mémorialiste, le président Amine Gemayel a informé par lettre le président Assad qu’il avait réitéré auprès du secrétariat général de la Ligue arabe la position officielle du Liban: évacuation de l’armée israélienne et retrait de toutes les forces non libanaises du Liban. Le chef de l’Etat se déclarait certain que» le président Assad accueillerait favorablement la teneur de la lettre, en prenant les mesures susceptibles d’ôter à Israël tout prétexte pour maintenir son occupation du Liban, et ce afin d’aider ce pays à recouvrer son indépendance, son unité et sa souveraineté.
«Sans attendre la réponse du chef de l’Etat syrien, le gouvernement libanais a annoncé qu’il mettait fin à la mission de la Force de frappe arabe sur son sol, notifiant de cette décision la Ligue et les Nations Unies. Mais évidemment il ne s’est rien passé. Ou plutôt, la démarche impétueuse autant que maladroite du pouvoir libanais n’a probablement pas été pour peu dans les chapitres sanglants qui ont pu suivre en montagne... Cela n’a pas empêché, plus tard encore, le général Michel Aoun de revenir à la charge en réclamant le retrait des forces syriennes. Là aussi il n’y a pas eu de suites et il faut reconnaître que du temps du général cela se discutait, car la situation était des plus instables et les circonstances régionalo-internationales tout à fait défavorables».
«Des efforts avaient donc été déployés, notamment par les Américains à travers les missions de Richard Murphy et d’April Glasby, pour un accord de paix au Liban. Dans ce cadre, des leaders politiques proposaient un troc: les réformes constitutionnelles contre les retraits. Le comité de souverains et de chefs d’Etat arabes avait alors proposé un délai de six mois pour le retrait syrien mais Damas y avait opposé une fin de non recevoir et finalement on avait abouti au compromis de deux ans contenu dans les accords de Taëf, à l’issue d’une mission menée auprès du président Assad par le ministre séoudien des A.E. l’Emir Séoud al-Fayçal. On avait pris soin ensuite de préciser aux députés libanais présents à Taëf qu’ils n’avaient qu’à ratifier l’accord et qu’on ne les autorisait pas à en modifier un iota. Au bout du délai fixé, comme on sait, les forces syriennes devaient se replier sur la Békaa dans un premier temps et ensuite les deux gouvernements négocieraient la durée de ce séjour dans la plaine, ainsi que les rapports qu’elles devraient y avoir avec les autorités locales. Les parlementaires, dont plusieurs étaient réticents, avaient été obligés d’avaliser le texte, faute de quoi la guerre n’aurait pas cessé».
«Mais, également comme on sait, le redéploiement n’a pas eu lieu en septembre 92 comme prévu, malgré les protestations de James Baker, le secrétaire d’Etat U.S. de l’époque, venu sur place en Syrie et au Liban demander des comptes à ce sujet. On lui avait alors répondu que cette question ne concernait que les gouvernements des deux pays et nulle autre partie. En pratique, tout comme Israël avait refusé d’appliquer l’accord dit du 17 mai et de se retirer sans lier ce retrait à celui des Syriens, il paraît aujourd’hui évident qu’il ne pourra pas y avoir de départ syrien sans une libération du Sud occupé. Cette équation, il faut le reconnaître, est admise comme logique par la majorité des Libanais. Mais, conclut cette personnalité, techniquement qu’est-ce qui empêche le redéploiement sur la Békaa où militairement une présence syrienne peut se justifier, tandis qu’ailleurs à l’intérieur on peut constater que les forces régulières libanaises sont parfaitement en mesure de veiller seules au maintien de l’ordre».

E.K.
Une personnalité religieuse se demande «pourquoi chaque fois qu’un responsable ou un autre évoque la présence militaire syrienne c’est le tollé et les hauts cris qu’on pousse, en traitant l’intervenant d’agent à la solde d’Israël... Ou en l’accusant de menacer la paix civile, d’ouvrir la voie des conflits et des polémiques sans fin. Réclamer la souveraineté...