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Actualités - ANALYSE

Le sud, un calvaire perpétuel, un dilemme insoluble

Pour le patriarche Sfeir, «le Liban connaît une gestation difficile, les grandes puissances l’utilisant comme carte de pression, voire de chantage, dans un monde où règne le culte des intérêts...» Ainsi, les Sudistes se demandent jusqu’à quand ils vont rester la proie de ces luttes d’intérêts et qui peut bien détenir entre ses mains les clés de leur délivrance... Se faisant, leur porte-parole, le député Abdel Latif Zein affirme que, «le pire, c’est bien cette situation de ni guerre ni paix, cette hémorragie perpétuelle qui, depuis des décennies, fauche régulièrement son lot de victimes et sème la destruction...»

Est-il possible d’envisager aujourd’hui, en ces temps d’escalade, une solution pour le Sud?
Selon un dignitaire religieux, «il faut se tourner du côté des Etats-Unis. La responsabilité du problème leur incombe et, de plus, elle leur est imputable. Auteurs de la résolution 425, qui date de 1978, ils n’ont jamais rien fait pour qu’elle devienne réalité et ils se sont même évertué à en empêcher l’exécution quand cela paraissait faisable. La FINUL envoyée par leurs soins pour servir de plaque tournante lors du retrait dans l’opération de relève de l’occupant par l’armée libanaise s’est transformée en association de bienfaisance sociale, aidant la population qui est dans sa zone, ce dont on lui sait gré mais qui ne correspond pas à sa mission. Israël en empêche toujours les 6.000 hommes de se déployer sur toute la ligne frontalière au Sud et dans la Békaa-Ouest pour préparer le terrain à l’armée libanaise, comme le veulent les résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU. On a dès lors l’impression que les Casques bleus ne sont au Liban que pour gérer, réguler, observer la crise et contribuer par là-même à sa persistance. Il est clair en effet, on l’a dit un million de fois, qu’on attribue au Liban maillon faible de la chaîne, et plus particulièrement au Sud, un rôle de soupape, de lice où s’entrechoquent les intérêts régionaux et internationaux en conflit. Pour s’expliquer entre eux, les autres pays tapent à coups de bâton sur le dos des Libanais ou les chargent de porter à d’autres Libanais, des coups qui visent indirectement des parties étrangères adverses... Dans ces conditions, commodes pour tous, ces protagonistes étrangers n’ont pas intérêt à laisser le Sud tranquille et ils y ont même organisé les affrontements par des accords, comme des promoteurs qui signent des contrats pour des matchs de boxe!»

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«Il y a eu ainsi, rappelle cette personnalité religieuse, les accords de juillet 93 qui ont établi des règles fixant des limites déterminées, en autorisant toutefois la poursuite du cycle de violences, des attaques et des ripostes. Il y a eu ainsi trois ans plus tard la vaste offensive israélienne dite «les raisins de la colère» qui a été la cause du massacre de Cana et l’on a alors établi l’entente d’avril 96, pour protéger les civils sous la prétendue surveillance d’un comité international qui, bien évidemment, n’a pas été en mesure de faire respecter les accords conclus, violés à plusieurs reprises. Ce qui a abouti fatalement à la grave flambée actuelle où des deux côtés des innocents, pareillement libanais, sont fauchés tandis que les militaires ou combattants touchés sont rares... Il s’agit de savoir si cette explosion signe l’annulation des accords d’avril, si on va les rétablir, si on va se passer de toute réglementation ou si on va négocier un nouveau système de «jeu». Jusqu’où ira la confrontation sur le terrain, quelle dimension prendront les agressions israéliennes, quel prix va-t-on encore faire payer aux Libanais, à quel exode va-t-on les pousser?»
Cette personnalité défend ensuite, une fois n’est pas coutume, les autorités locales «soumises au chantage des Israéliens qui prétendent les obliger à mettre au pas la résistance et les rendent responsables des actions du Hezbollah, comme si c’étaient les dirigeants libanais qui ordonnaient les tirs de Katioucha sur la Galilée ou qui faisaient poser des mines antipersonnel sur les routes de la région de Jezzine... De plus, sans craindre la contradiction, quand cela leur convient, les Israéliens affirment qu’ils n’ont pas à traiter avec un Etat libanais fantoche qui n’a aucune liberté de mouvement et aucune autonomie de décision. Ils ajoutent qu’ils savent parfaitement quelles sont les parties qui manipulent le Hezbollah et lui font tirer, quand elles le jugent bon, des missiles sur la Galilée. Dans ces conditions, pourquoi s’acharner sur le Liban et pourquoi ne pas s’en prendre directement à ces présumés «instigateurs» des opérations du Hezb?»
Sans doute parce que, depuis le temps des Palestiniens et de leur Fathland dans le Arkoub, l’habitude a été prise de se servir du Liban comme bouc émissaire. Et malheureusement ce pays est si affaibli par la longue guerre domestique qui l’a déchiré qu’il n’est pas en mesure de s’immuniser contre le destin de punching ball qu’on lui assigne. C’est ainsi que, contrairement à toute logique d’intérêt national, la politique officielle elle-même, quoiqu’elle s’en défende, a renoncé à la 425 pour se rabattre en pratique sur les 242-338, au nom d’une indéfectible association du Sud et du Golan... C’est ainsi également que, théoriquement bénie par l’Etat libanais, la résistance active à l’occupant israélien se développe sans aucune concertation avec ce même Etat et sans se soucier des lignes qu’il voudrait suivre pour promouvoir l’intérêt du pays et rendre vraiment possible, par la diplomatie, la récupération du Sud. Le système politique en place est trop faible pour contrôler la résistance ou même pour faire équipe, à plus forte raison (si l’on peut dire), pour la neutraliser, comme l’exigent les Israéliens mais aussi les Américains qui laissent entendre que cette résistance est en fait illégitime car elle n’a rien de libanais.

E.K.
Pour le patriarche Sfeir, «le Liban connaît une gestation difficile, les grandes puissances l’utilisant comme carte de pression, voire de chantage, dans un monde où règne le culte des intérêts...» Ainsi, les Sudistes se demandent jusqu’à quand ils vont rester la proie de ces luttes d’intérêts et qui peut bien détenir entre ses mains les clés de leur délivrance... Se...