Israël-palestiniens : le mur d'incompréhension demeure total Ross se rendrait à Damas et Albright préparerait une relance globale du processus de paix

Malgré une timide reprise de contact sur les questions de sécurité grâce à l’émissaire américain Dennis Ross, Palestiniens et Israéliens ne s’entendaient apparemment hier que sur un seul point: tout reste à faire pour sauver le processus de paix.
Une première réunion israélo-palestinienne dans la nuit de dimanche, puis une deuxième hier en soirée n’ont pas permis de faire tomber le mur d’incompréhension entre les deux parties, ni sur le plan de la coopération sécuritaire — préalable incontournable posé par les Israéliens à toute reprise de véritables pourparlers — ni sur le plan politique concernant le calendrier des retraits gelé depuis la reprise des colonisations.
M. Ross, lui même, au second jour de ses efforts, a reconnu les limites de sa médiation: «Ce qui est important, a-t-il dit, ce n’est pas de se réunir, mais d’arriver à des résultats tangibles».
Tel, en effet, ne semble pas être le cas et tout semble accréditer l’hypothèse que la mission actuelle de l’émissaire américain n’est en fait qu’une tentative de déblayer tout simplement le terrain en prévision d’une visite — la première depuis sa nomination — du secrétaire d’Etat Madeleine Albright dans la région.

Amr Moussa

Une telle éventualité a été d’ailleurs confirmée par le ministre égyptien des Affaires étrangères, M. Amr Moussa, qui a affirmé hier que tous les aspects stratégiques du processus de paix, y compris la colonisation, seraient évoqués lors de la visite de Madeleine Albright au Proche-Orient.
«La question de la sécurité a été évoquée en premier lieu en raison des allégations israéliennes et des réponses palestiniennes à ces allégations», a déclaré à la presse M. Moussa. Il faisait allusion aux accusations israéliennes sur les responsabilités de l’Autorité palestinienne dans le double attentat de Jérusalem du 30 juillet (15 morts dont les deux kamikazes, 150 blessés).
«Mais toutes les questions stratégiques liées au processus de paix seront évoquées lors de la visite de Mme Albright», a ajouté M. Moussa précisant que cette visite devait intervenir fin août ou début septembre.
«La question de la sécurité est importante pour les deux parties palestinienne et israélienne, tout comme l’application des accords conclus», a-t-il estimé.
«Et l’on peut en dire tout autant des autres questions qui seront évoquées (avec Mme Albright) comme la colonisation, les négociations sur le statut définitif (des territoires et de Jérusalem) et l’application des accords de la période intérimaire», a ajouté le chef de la diplomatie égyptienne.D’ailleurs, à Beyrouth, des indiscrétions puisées à des sources proches du chef du gouvernement Rafic Hariri — à l’issue de ses entretiens dimanche avec le président el-Assad —, laissaient entendre que M. Ross, qui a prolongé de deux jours sa visite, pourrait se rendre à Damas afin de tater le terrain concernant une possible visite de Mme Albright dans la capitale syrienne lors de sa tournée déjà plusieurs fois annoncée.
Cette analyse si elle se confirmait refléterait la volonté des Etats-Unis de relancer le processus de paix dans tous ses volets palestinien, syrien et libanais.

Les rencontres de Ross

Mais il y a encore lois de la coupe aux lèvres, d’autant plus que déjà Palestiniens et Israéliens n’arrivent pas à s’entendre malgré la présence de M. Ross.
Ainsi le ministre israélien de la Défense Yitzhak Mordehaï a souligné que les Palestiniens n’avaient pas répondu au préalable posé par Israël pour reprendre le processus de paix: une répression sévère des islamistes armés, tenus pour responsables d’un attentat à la bombe il y a treize jours à Jérusalem.
«Malheureusement, cela n’a pas commencé», a déclaré M. Mordehaï après un entretien avec M. Ross à Jérusalem. «Nous espérons que le président Arafat en donnera l’ordre», a-t-il ajouté.
M. Ross s’est également entretenu avec le ministre israélien des Affaires étrangères David Lévy, l’émissaire européen au Proche-Orient Miguel Angel Moratinos et l’ambassadeur égyptien à Tel-Aviv Mohammed Bassiouny. Il a rencontré dans la soirée M. Arafat à Ramallah. A l’issue de l’entretien, M. Ross a critiqué certaines mesures qui ne sont pas liées réellement à la sécurité d’Israël et ne contribuent pas au processus de paix; elles sont même contre-productives.
L’Autorité palestinienne estime cependant qu’aucune coopération sérieuse dans le domaine de la sécurité ne peut avoir lieu tant qu’Israël bloque le processus de paix, maintient le blocus des territoires et poursuit la colonisation.
«Jusqu’à présent, il n’y a pas de progrès concrets, ni dans le domaine de la sécurité, ni sur le terrain politique», a affirmé M. Nabil Abou Roudeina, porte-parole du président Arafat.
Israël accuse M. Arafat de ne pas respecter ses engagements de lutter contre le terrorisme et a redoublé ses pressions depuis le double attentat suicide qui a fait 16 morts le 30 juillet à Jérusalem, après le décès lundi d’un quatorzième Israélien gravement blessé.
Les deux auteurs de l’attentat, qui font partie des tués, n’ont pas été identifiés, et les Palestiniens soulignent qu’Israël n’a toujours pas apporté la preuve qu’ils venaient des territoires.
De son côté, le mouvement de la Résistance islamique (Hamas) a averti lundi l’Autorité palestinienne qu’une campagne d’arrestation de ses militants dans les territoires palestiniens conduirait à une explosion.
«Nous espérons que Yasser Arafat ne se pliera pas aux exigences israéliennes. Mais s’il le fait (...) cela mettra le feu aux poudres et la situation peut devenir incontrôlable», a déclaré le porte-parole du Hamas en Jordanie, M. Ibrahim Ghoshé. (AFP, Reuter)