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Actualités - COMMUNIQUES ET DECLARATIONS

Réactions partagées dans la classe politique après la révolte des affamés Les milieux gouvernementaux s'émeuvent de l'atteinte à l'ordre Les opposants réclament une autre politique

La «révolte des affamés» vendredi à Baalbeck et l’appel de son chef, cheikh Sobhi Toufayli, à la désobéissance civile ont suscité des réactions partagées dans la classe politique. Des ministres se sont élevés contre ce qui a constitué, selon eux, une atteinte à l’ordre et à la loi, alors qu’à l’extérieur du gouvernement, on imputait fréquemment la responsabilité de la situation à la politique suivie par les responsables. Le ministre de la Défense Mohsen Dalloul a estimé que «la révolte des affamés» s’était transformée en «une révolte des humiliations et des insultes» et a mis en garde cheikh Toufayli contre toute tentation de donner à son mouvement une «dimension autre que revendicative».
M. Dalloul, qui s’exprimait lors d’une rencontre avec des notables à Ain Arab (caza de Rachaya), a souligné par ailleurs que la Békaa «étant une région négligée depuis des dizaines d’années, il est injuste d’imputer la responsabilité de cette négligence au régime et au gouvernement actuels». Selon lui, l’actuelle équipe gouvernementale a «beaucoup donné aux habitants de la Békaa».
«Nous sommes avec le droit à la revendication, mais à condition qu’il soit pratiqué conformément aux normes en vigueur. Si quelqu’un cherche à faire tomber le régime, qu’il le dise franchement», a ajouté M. Dalloul, avant de préciser que les autorités ne permettront à personne de «transgresser le système».

L’anarchie, c’est fini

«Nous allons nous occuper de cette affaire avec responsabilité, car l’anarchie, c’est fini», a-t-il encore dit, avertissant contre les risques de nuire à la saison touristique d’été.
Il a en outre souhaité que le gouvernement remette sur le tapis le projet relatif aux ressources financières des médias. «Il faut que l’on sache comment sont financés les médias car nous commençons à constater chez certains d’entre eux des tentatives irresponsables de nuire à la paix civile», a-t-il assuré.
Pour sa part, le ministre de la Justice Bahige Tabbarah a souligné dans une interview à la radio que l’appel à la désobéissance civile était «contraire à la loi». Face à une telle initiative, «l’Etat ne saurait demeurer les bras croisés», a-t-il averti, rendant hommage à l’action des forces de l’ordre.
Selon M. Tabbarah, «rien dans la Constitution ne prévoit la liberté de manifester». «En revanche, la liberté d’expression est garantie», a-t-il noté.
Le ministre de la Justice a d’autre part expliqué que l’Etat de droit, auquel aspire selon lui le Liban, est «contraire à l’Etat policier». Cependant, «il ne nous est pas possible de juger à partir de l’expérience libanaise comme nous le ferions pour un pays de longue tradition démocratique et qui n’a pas connu la guerre que le Liban a vécu», a-t-il ajouté.
De son côté, le ministre des Transports Omar Meskaoui a voulu ironiser au cours d’une conférence de presse sur la «révolte des affamés», l’appelant «révolte des affamés du pouvoir» ou «révolte des égarés».
M. Meskaoui a toutefois estimé que les torts étaient partagés dans cette affaire où, selon lui, «tout le monde s’est égaré, à la fois dans le diagnostic des problèmes et dans le traitement qui doit leur être consacré».
«S’il y a un problème, a-t-il précisé, ce n’est pas dans l’existence de difficultés sociales, mais c’est dans la manière de les traiter».

Issam Farès: construire
le pays sans «démolir»
les citoyens

M. Issam Farès, député du Akkar, a quant à lui critiqué la manière «improvisée» avec laquelle le gouvernement menait sa politique économique et sociale. «Il y a sans aucun doute un mauvais climat dans le pays. Pourquoi ne pas tenter de trouver des solutions?», s’est-il interrogé.
«On demande aux citoyens de ployer sous les impôts, alors que les opportunités de travail manquent, les moissons ne sont pas écoulées et l’équilibre social est totalement absent et alors que le pouvoir est lui-même absorbé par des questions marginales, comme le nom de la Cité sportive, la censure sur les émissions par satellite ou la question des Forces de sécurité intérieure», a souligné M. Farès.
«La leçon qui doit être tirée commande de changer la manière dont on traite les problèmes économiques et sociaux. Notre objectif est de construire le pays sans «démolir» le citoyen», a-t-il dit.
Critiquant le «gaspillage» pratiqué selon lui par le gouvernement, il a enfin appelé à «un dialogue national franc mettant un terme à la légèreté avec laquelle les problèmes sont envisagés».

Aoun: la pauvreté
a atteint
le pays tout entier

Le général Michel Aoun a pour sa part souligné que «le peuple libanais tout entier commence à avoir faim», dans une interview qu’il a accordée en France à l’agence «Al-Markazia».
«Les Libanais sont aujourd’hui contraints de vendre leurs terrains et leurs biens afin de pouvoir continuer à vivre dans la dignité. Cette situation profite aux courtiers qui vendent ces terres aux étrangers et à des compagnies dont on ne connaît pas les propriétaires», a-t-il dit.
Selon lui, «affamer les gens est dans la nature du pouvoir actuel au Liban. Voilà pourquoi il n’y a aucun espoir de voir ce pouvoir prendre des mesures susceptibles de sauver les Libanais».
«Le pouvoir a vendu le marché du travail libanais à la Syrie et a ouvert le marché de consommation aux produits syriens. Il a stoppé tout développement dans le pays en dépensant les montants des prêts sur de la pierre et non sur le développement réel. Pour ces raisons, il faut immédiatement mettre un terme à cette politique», a-t-il préconisé, estimant que le «salut réside dans le départ de la classe dirigeante».
Interrogé sur l’éventualité d’une coordination avec cheikh Toufayli, le général Aoun a répondu: «Nous n’avons pas été officiellement invités à prendre part à la Journée de la révolte des affamés à Baalbeck. Pour notre part, nous n’avions vu aucun inconvénient à y participer et nous avions laissé le choix aux citoyens».
L’ancien chef du gouvernement a toutefois souligné que, «pour élargir la révolte des affamés à tout le Liban, il ne faut pas se contenter de réclamer du pain, mais aussi la liberté, la tranquillité individuelle et collective et la libération du sol et du pouvoir de décision». «Les animaux des fermes mangent à leur faim. Mais cela ne suffit pas, car ils ne sont pas libres», a-t-il dit.
Evitant de se prononcer directement sur l’appel à la désobéissance civile, le général Aoun a estimé, en réponse à une question, que son allié, le Parti national libéral, n’avait pas expressément appelé à une telle attitude dans son dernier communiqué. «De toutes les façons, a-t-il souligné, les gens démunis ne pourront plus s’acquitter de leurs impôts même s’ils n’ont aucune intention d’observer un mot d’ordre de désobéissance civile».
La «révolte des affamés» vendredi à Baalbeck et l’appel de son chef, cheikh Sobhi Toufayli, à la désobéissance civile ont suscité des réactions partagées dans la classe politique. Des ministres se sont élevés contre ce qui a constitué, selon eux, une atteinte à l’ordre et à la loi, alors qu’à l’extérieur du gouvernement, on imputait fréquemment la...