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Actualités - CHRONOLOGIE

Après le tollé provoqué par les mesures protectionnistes Hariri tente de rassurer l'opinion Ni changement du système économique, ni complémentarité avec la Syrie , affirme le chef du gouvernement (photo)

Concilier le respect de la liberté avec les impératifs de la solidarité sociale ne sera pas facile. C’est dans ce grand débat que les récentes mesures protectionnistes prises par le gouvernement, en faveur de l’agriculture, et qui doivent entrer en vigueur le 1er octobre, ainsi que les surtaxes sur les voitures, ont engagé le pays.
Ce débat ne fait que commencer, à en juger par les vives réactions qui se manifestent dans différents secteurs, et spécialement parmi les commerçants et importateurs de voitures, qui crient au dirigisme .
Car n’en doutons pas, il s’agit d’un pari d’autant plus difficile à tenir qu’on minimisera l’ampleur des sacrifices qu’il exige et la délicatesse des rouages à mettre en œuvre pour son succès, et qui sont loin d’être exclusivement techniques ou économiques.
Au sujet des craintes de nature politique qui agitent certains esprits, M. Hariri, prenant le taureau par les cornes, a affirmé hier au cours d’une cérémonie marquant l’achèvement des travaux de rénovation de la place Sassine: «Notre économie est libre et le restera (...) ces mesures ne sont pas le prélude au changement de notre système économique, ni à la complémentarité économique avec la Syrie, comme certains le pensent. La Syrie a son économie et son mode de vie. Notre économie est différente de la sienne, et je le dis sans détour: nous n’adoptons pas ces mesures pour que notre économie ressemble à l’économie syrienne».
Par ailleurs, M. Hariri a expliqué ce qui rend les mesures prises nécessaires. Selon lui, l’objectif principal de la surtaxe sur les voitures est de «limiter le nombre de véhicules d’occasion affluant au Liban». «Cette limitation, a-t-il expliqué, s’impose car la croissance du parc automobile au Liban va plus vite que les travaux d’infrastructure, ce qui rend les déplacements et la vie très difficiles». Et de préciser qu’au cours des cinq dernières années, le parc automobile libanais a augmenté de 400.000 unités. «Nous avions à choisir entre l’interdiction de l’importation ou sa limitation», a-t-il dit en substance, avant de répéter que le but est de limiter l’importation d’épaves à 1.000 ou 2.000 dollars qui encombrent les trottoirs quelques mois après leur achat.

Protéger les
agriculteurs

En ce qui concerne l’importation de certains produits alimentaires, M. Hariri a affirmé que «tous les pays du monde libre, l’Europe, les Etats-Unis, protègent leurs agriculteurs, pour leur permettre de vivre du produit du sol». Et d’ajouter qu’il s’agit de mettre un terme à l’exode rural.
«La construction de routes, d’écoles et d’hôpitaux, l’eau courante, l’électricité et le téléphone ne suffisent pas, a-t-il précisé. De quoi vivront les agriculteurs? Pour les fixer dans leurs régions, nous n’avons d’autre choix que d’encourager l’industrie et l’agriculture (...) Il faut créer des emplois».
«Certes, je suis en faveur d’un Liban pays de services touristiques, financiers, économiques, commerciaux. Mais pouvons-nous être exclusivement cela? Nous pouvons l’être à 70%, mais parmi les 30% restants, il faut compter l’agriculture», a encore dit le chef du gouvernement.
«Je sais qu’il s’agit d’une décision difficile et que son application sera difficile, a enchaîné M. Hariri. J’entends beaucoup parler de hausse des prix. Nous sommes là pour agir en conséquence, mais j’admets que la chose n’est pas facile. Tous les gouvernements qui nous ont précédés ont reculé devant ce dossier. Mais de l’ajourner n’a fait que compliquer les choses. Je dis donc au peuple libanais qu’une période difficile d’un an et demi ou deux ans nous attend. Le gouvernement et la population doivent coopérer afin de créer des emplois dans les régions et d’empêcher l’exode rural. Nous avons éliminé la culture du haschisch, mais nous ne pouvons pas éliminer cette culture pluriséculaire, et dire aux agriculteurs: il faut descendre à Beyrouth. Il faut leur trouver du travail sur place. Nous sommes très francs; nous ne voulons pas qu’ils viennent à Beyrouth, et d’ailleurs, ils ne le souhaitent pas non plus. Mais il faut leur trouver des emplois dans l’agriculture ou l’industrie, et nous invitons les Libanais à investir dans ces secteurs».
Et le président du Conseil d’ajouter: «L’important, ce n’est pas que quelques-uns s’enrichissent, mais de trouver des emplois pour tout le monde (...) Cette tâche est considérée comme l’une des priorités de tout gouvernement. Cela exige des sacrifices. Si nous ne le faisons pas, les agriculteurs planteront du tabac, des betteraves ou du blé, mais l’Etat devra en subventionner les prix avec l’argent du contribuable, aggravant le déficit budgétaire, les pressions sur l’économie et augmentant le chômage. Je souhaite que la population comprenne les raisons qui ont poussé le gouvernement à adopter ces mesures impopulaires, mais sache qu’elles sont indispensables et qu’elles ne sont pas un prélude à un changement de la nature du système économique».
Promesses hâtives

Un an ou deux «difficiles», le chef du gouvernement ne minimise-t-il pas les choses à l’image de ce qui s’est produit avec d’autres printemps promis hâtivement? De plus dit-il vraiment tout? S’exprimant devant une délégation d’importateurs de voitures d’occasion, le président de l’Assemblée nationale, M. Nabih Berry, a dénoncé hier «l’arrogante ostentation» de ceux qui achètent des voitures à 150.000 dollars, soulignant que ces sommes énormes sont autant de «devises rares» qui fuient ainsi le pays.
M. Berry a promis par ailleurs que les voitures importées avant la décision du Conseil des ministres seront soumises aux anciens barèmes douaniers, et ne paieront pas la nouvelle taxe forfaitaire de 5 millions de L.L., et que le plafond de 10.000 dollars pour les voitures neuves dont la taxe demeure inchangée, pourrait être relevé.
A travers l’Association des commerçants d’Achrafieh, qui organisait la cérémonie, M. Hariri s’adressait à la nation tout entière. Par la voix de M. Georges Jazra, président de cette association, c’est tout le secteur commercial qui s’exprimait.
Tout en remerciant le chef du gouvernement pour les 3 millions de dollars et les dix mois d’efforts nécessaires aux travaux de réhabilitation entrepris par le CEGPB, qui ont fait un endroit réellement coquet de la Place Sassine, M. Jazra a déclaré: «En tant qu’association des commerçants, nous ne laisserons pas passer cette occasion sans répéter que nous croyons à l’initiative privée et à l’économie de marché. Les récentes décisions du Conseil des ministres (...) portent atteinte à la réputation du Liban et comportent des conséquences négatives pour de larges tranches de la population. Nous souhaitons, dans l’intérêt de tous, la révision de ces mesures».
Le ministre de l’Agriculture, M. Chaouki Fakhoury, a défendu hier, dans une conférence de presse «ses» mesures. Il a déclaré, notamment, que les produits agricoles interdits représentent seulement 20% de ce que le Liban importe. Il a annoncé en outre que 25 experts allaient être engagés pour adapter les mesures décidées aux besoins et 10 contrôleurs engagés pour un meilleur contrôle des prix. Mais M. Fakhoury a été très flou au sujet des produits de contrebande affluant de Syrie qui pourraient concurrencer les produits équivalents libanais. Des réunions avec les responsables syriens pour coordonner l’application des mesures protectionnistes sont prévues les 22 et 23 juin. M. Fakhoury a reconnu candidement que le Liban ne peut compter sur un crédit agricole significatif, et que les mesures décidées étaient les seules qui sont dans ses moyens, à l’heure actuelle.
Dix contrôleurs! Ce sont de telles déclarations qui effraient le Libanais moyen. Que peuvent dix contrôleurs contre une flambée des prix orchestrée par les profiteurs? Que peuvent-ils contre l’accaparement? Que peuvent-ils dans l’état actuel des lois?
Recevant les importateurs de voitures d’occasion, qui ont décidé de frapper à toutes les portes, le patriarche maronite s’est demandé hier, pour sa part, si pour protéger certains, l’Etat avait le droit d’en appauvrir d’autres? Il a soulevé opportunément, par ailleurs, la question du Conseil économique et social. C’est indirectement dire qu’un bouleversement économique de cette ampleur, qui va entraîner des changements drastiques dans les habitudes de consommation, ne peut être laissé à la décision de quelques-uns, mais doit être le fruit d’une politique acceptée, sinon par tous, du moins par une large majorité, ce qui est loin d’être le cas.
La position du chef de l’Eglise maronite rejoint, en un certain sens, celle des nombreux Libanais, et en particulier des propriétaires d’industries agroalimentaires, qui se sont interrogés hier sur la possibilité de faire bien fonctionner une machine complexe, modulant interdictions et autorisations, de façon à ne pas nuire d’abord à ceux qu’on prétend protéger. Le débat, on le voit, est appelé à rester encore très longtemps ouvert.
Protéger les
agriculteurs

En ce qui concerne l’importation de certains produits alimentaires, M. Hariri a affirmé que «tous les pays du monde libre, l’Europe, les Etats-Unis, protègent leurs agriculteurs, pour leur permettre de vivre du produit du sol». Et d’ajouter qu’il s’agit de mettre un terme à l’exode rural.
«La construction de routes, d’écoles et d’hôpitaux, l’eau courante, l’électricité et le téléphone ne suffisent pas, a-t-il précisé. De quoi vivront les agriculteurs? Pour les fixer dans leurs régions, nous n’avons d’autre choix que d’encourager l’industrie et l’agriculture (...) Il faut créer des emplois».
«Certes, je suis en faveur d’un Liban pays de services touristiques, financiers, économiques, commerciaux. Mais pouvons-nous être exclusivement cela? Nous pouvons l’être à 70%, mais parmi les 30% restants, il faut compter l’agriculture», a encore dit le chef du gouvernement.
«Je sais qu’il s’agit d’une décision difficile et que son application sera difficile, a enchaîné M. Hariri. J’entends beaucoup parler de hausse des prix. Nous sommes là pour agir en conséquence, mais j’admets que la chose n’est pas facile. Tous les gouvernements qui nous ont précédés ont reculé devant ce dossier. Mais de l’ajourner n’a fait que compliquer les choses. Je dis donc au peuple libanais qu’une période difficile d’un an et demi ou deux ans nous attend. Le gouvernement et la population doivent coopérer afin de créer des emplois dans les régions et d’empêcher l’exode rural. Nous avons éliminé la culture du haschisch, mais nous ne pouvons pas éliminer cette culture pluriséculaire, et dire aux agriculteurs: il faut descendre à Beyrouth. Il faut leur trouver du travail sur place. Nous sommes très francs; nous ne voulons pas qu’ils viennent à Beyrouth, et d’ailleurs, ils ne le souhaitent pas non plus. Mais il faut leur trouver des emplois dans l’agriculture ou l’industrie, et nous invitons les Libanais à investir dans ces secteurs».
Et le président du Conseil d’ajouter: «L’important, ce n’est pas que quelques-uns s’enrichissent, mais de trouver des emplois pour tout le monde (...) Cette tâche est considérée comme l’une des priorités de tout gouvernement. Cela exige des sacrifices. Si nous ne le faisons pas, les agriculteurs planteront du tabac, des betteraves ou du blé, mais l’Etat devra en subventionner les prix avec l’argent du contribuable, aggravant le déficit budgétaire, les pressions sur l’économie et augmentant le chômage. Je souhaite que la population comprenne les raisons qui ont poussé le gouvernement à adopter ces mesures impopulaires, mais sache qu’elles sont indispensables et qu’elles ne sont pas un prélude à un changement de la nature du système économique».

Un an ou deux «difficiles», le chef du gouvernement ne minimise-t-il pas les choses à l’image de ce qui s’est produit avec d’autres printemps promis hâtivement? De plus dit-il vraiment tout? S’exprimant devant une délégation d’importateurs de voitures d’occasion, le président de l’Assemblée nationale, M. Nabih Berry, a dénoncé hier «l’arrogante ostentation» de ceux qui achètent des voitures à 150.000 dollars, soulignant que ces sommes énormes sont autant de «devises rares» qui fuient ainsi le pays.
M. Berry a promis par ailleurs que les voitures importées avant la décision du Conseil des ministres seront soumises aux anciens barèmes douaniers, et ne paieront pas la nouvelle taxe forfaitaire de 5 millions de L.L., et que le plafond de 10.000 dollars pour les voitures neuves dont la taxe demeure inchangée, pourrait être relevé.
A travers l’Association des commerçants d’Achrafieh, qui organisait la cérémonie, M. Hariri s’adressait à la nation tout entière. Par la voix de M. Georges Jazra, président de cette association, c’est tout le secteur commercial qui s’exprimait.
Tout en remerciant le chef du gouvernement pour les 3 millions de dollars et les dix mois d’efforts nécessaires aux travaux de réhabilitation entrepris par le CEGPB, qui ont fait un endroit réellement coquet de la Place Sassine, M. Jazra a déclaré: «En tant qu’association des commerçants, nous ne laisserons pas passer cette occasion sans répéter que nous croyons à l’initiative privée et à l’économie de marché. Les récentes décisions du Conseil des ministres (...) portent atteinte à la réputation du Liban et comportent des conséquences négatives pour de larges tranches de la population. Nous souhaitons, dans l’intérêt de tous, la révision de ces mesures».
Le ministre de l’Agriculture, M. Chaouki Fakhoury, a défendu hier, dans une conférence de presse «ses» mesures. Il a déclaré, notamment, que les produits agricoles interdits représentent seulement 20% de ce que le Liban importe. Il a annoncé en outre que 25 experts allaient être engagés pour adapter les mesures décidées aux besoins et 10 contrôleurs engagés pour un meilleur contrôle des prix. Mais M. Fakhoury a été très flou au sujet des produits de contrebande affluant de Syrie qui pourraient concurrencer les produits équivalents libanais. Des réunions avec les responsables syriens pour coordonner l’application des mesures protectionnistes sont prévues les 22 et 23 juin. M. Fakhoury a reconnu candidement que le Liban ne peut compter sur un crédit agricole significatif, et que les mesures décidées étaient les seules qui sont dans ses moyens, à l’heure actuelle.
Dix contrôleurs! Ce sont de telles déclarations qui effraient le Libanais moyen. Que peuvent dix contrôleurs contre une flambée des prix orchestrée par les profiteurs? Que peuvent-ils contre l’accaparement? Que peuvent-ils dans l’état actuel des lois?
Recevant les importateurs de voitures d’occasion, qui ont décidé de frapper à toutes les portes, le patriarche maronite s’est demandé hier, pour sa part, si pour protéger certains, l’Etat avait le droit d’en appauvrir d’autres? Il a soulevé opportunément, par ailleurs, la question du Conseil économique et social. C’est indirectement dire qu’un bouleversement économique de cette ampleur, qui va entraîner des changements drastiques dans les habitudes de consommation, ne peut être laissé à la décision de quelques-uns, mais doit être le fruit d’une politique acceptée, sinon par tous, du moins par une large majorité, ce qui est loin d’être le cas.
La position du chef de l’Eglise maronite rejoint, en un certain sens, celle des nombreux Libanais, et en particulier des propriétaires d’industries agroalimentaires, qui se sont interrogés hier sur la possibilité de faire bien fonctionner une machine complexe, modulant interdictions et autorisations, de façon à ne pas nuire d’abord à ceux qu’on prétend protéger. Le débat, on le voit, est appelé à rester encore très longtemps ouvert.

F.N.
F.N.
Concilier le respect de la liberté avec les impératifs de la solidarité sociale ne sera pas facile. C’est dans ce grand débat que les récentes mesures protectionnistes prises par le gouvernement, en faveur de l’agriculture, et qui doivent entrer en vigueur le 1er octobre, ainsi que les surtaxes sur les voitures, ont engagé le pays.Ce débat ne fait que commencer, à en juger...