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Actualités - CHRONOLOGIE

Les organismes économiques se prononceront aujourd'hui sur les mesures protectionnistes Hariri, pour sa part, maintient une intransigeance de façade (photo)

Les récentes mesures protectionnistes prises par le gouvernement continuent d’être vivement contestées dans les milieux politiques, économiques et syndicaux. Ces critiques, et le vent de fronde qui les accompagne, perceptible en particulier dans les milieux des importateurs de voitures, ont rendu nécessaire, hier, une réunion entre le chef de l’Etat et le président du Conseil. En quittant Baabda, M. Hariri a admis qu’il a été question de cette crise, comme de la nouvelle échelle des salaires dans le secteur public .


Interrogé au sujet des mesures protectionnistes prises par le gouvernement, la semaine dernière, M. Hariri a déclaré «qu’il n’est pas question d’y renoncer». En réalité, des «ajustements» aux nouvelles mesures seraient envisageables. De source informée, on apprenait que le chef du gouvernement, sensible aux critiques qui se sont exprimées, aurait décidé de consacrer à la définition d’une politique économique globale des séances de travail qui se tiendront les 4 et 5 juillet prochain, et auxquelles seront associés les organismes économiques.
Ce projet ne manquera pas de soulever les critiques de certains milieux politiques, qui soulignent que ce rôle revient au Conseil économique et social, dont l’existence juridique date déjà de deux ans, mais qui attend toujours la nomination de ses membres. M. Sélim Hoss a adressé à ce sujet une question au gouvernement, dans laquelle il souligne que le décret d’application relatif au Conseil économique et social aurait dû être pris, légalement, dans une période de six mois tout au plus après le vote de la loi instituant cet organisme à vocation consultative.
Ce que la crise actuelle reflète, en particulier, c’est un grave manque de liquidités de la part de l’Etat, à un moment où le déficit budgétaire a atteint une proportion imprévue (55% fin mai) et où l’Etat fait face à une échéance financière, l’adoption d’une nouvelle échelle des salaires dans le secteur public, avec effet rétroactif à partir du 1er janvier 1996. Le coût annuel de cette nouvelle échelle est de 600 milliards de L.L. Mais l’Etat cherche toujours les ressources nécessaires pour honorer cet engagement sans grever le budget.
Car si la nouvelle politique protectionniste se présente avec de nobles objectifs, comme la protection de l’agriculture et une réorientation des dépenses, elle en cache aussi de moins avouables: le renflouement du Trésor, grâce à de nouvelles taxes indirectes. Auxquelles les milieux syndicaux et populaires redoutent que viennent s’ajouter d’autres taxes, notamment sur l’essence et sur les communications cellulaires, et peut-être même de nouvelles mesures protectionnistes.
C’est au point que des parlementaires comme M. Issam Farès ont fini par mettre en question la notion de capitalisme mise en œuvre par M. Hariri et son acharnement à faire survivre au respirateur son «paradis fiscal». Pour M. Farès, les ressources dont il a besoin, l’Etat devrait les trouver dans une révision du système fiscal, et l’instauration d’un impôt progressif sur le revenu ou la fixation à 20%, au lieu de 10%, des taxes directes sur les sociétés.
Les organismes économiques se réunissent, aujourd’hui, au siège de la Chambre de commerce et d’industrie de Beyrouth, pour prendre une position unifiée au sujet de toutes ces questions. M. Adnan Kassar, président de la CCIB, estime pour sa part «intempestives et prises sans consultation» les mesures décidées par le gouvernement. «Ces mesures ne se basent pas sur des chiffres sérieux et n’aideront pas l’agriculture. Ils touchent aux fondements mêmes du système économique», a déclaré M. Kassar.
La nécessité d’une concertation sur ces questions est d’autant plus urgente que les critiques adressées à la nouvelle politique mélangent les genres et mêlent objections de fond, critiques techniques et accusations de mauvaise foi.
En fait, sur le soutien au secteur agricole, tout le monde est d’accord. Les divergences sont sur les moyens que le gouvernement prend pour le faire. Pour les milieux économiques, l’interdiction pure et simple de l’importation de certains produits porte atteinte au passage du préambule de la Constitution qui assure que «le régime économique est libre et garantit l’initiative personnelle et la propriétée privée». Cette interdiction doit être remplacée par des barrières douanières qui mettront certains produits importés hors de portée des budgets moyens, tout en contribuant à l’augmentation des droits de douane, ajoutent les milieux économiques.
Dans d’autres secteurs, notamment dans le secteur agricole, on redoute la faiblesse de la politique d’orientation de l’Etat et un développement anarchique de la production agricole, ce qui provoquera surproductions et méventes, les barrières douanières entraînant, de la part des Etats tiers, des mesures de réciprocité. Faute de planification, les nouvelles orientations agricoles pourraient donc desservir ceux-là mêmes pour lesquels on les a, en principe, adoptées.
Autres conséquences à redouter: l’apparition d’un favoritisme économique, et même son institutionnalisation, par le biais des exceptions délivrées, de temps en temps, pour l’importation de produits agricoles de base dont l’absence porterait préjudice à l’industrie ou à d’autres secteurs.
En cherchant à aider l’agriculture, la nouvelle politique économique porterait, en fait, préjudice à d’autres secteurs, et ne résoudrait un problème que pour en créer d’autres, au niveau économique d’abord, mais aussi au niveau social. Ce serait là le résultat de l’improvisation et de l’amateurisme qui ont si souvent, par le passé, caractérisé l’action du gouvernement.
Les importateurs alimentaires, pour leur part, prédisent une flambée des prix et affirment que les producteurs locaux seront incapables de fournir le marché. «On peut s’attendre à une poussée inflationniste», affirment les experts.
Pour le ministre de l’Economie, M. Yassine Jaber, le plan présenté ne toucherait pas que l’agriculture «mais aussi l’industrie, les finances et le commerce avec nos partenaires étrangers».
Officiellement, rappelle-t-on, le plan vise à réduire la dépendance agricole du pays qui importe chaque année 1,5 milliard de dollars pour assurer 80% de ses besoins alimentaires, alors qu’il n’expose que l’équivalent de 300 millions USD.
Dès le 1er octobre prochain, les agrumes, la plupart des fruits et des légumes, certains produits en conserve et les dérivés de ces produits (jus de fruits, la plupart des fromages) seront interdits à l’importation.
Et outre, certaines denrées seront fortement taxées et d’autres seront importables uniquement pour des périodes limitées de l’année.
Dans la foulée, le gouvernement a alourdi sensiblement les taxes sur les voitures, ce qui a provoqué la colère des professionnels.


F. N.
Les récentes mesures protectionnistes prises par le gouvernement continuent d’être vivement contestées dans les milieux politiques, économiques et syndicaux. Ces critiques, et le vent de fronde qui les accompagne, perceptible en particulier dans les milieux des importateurs de voitures, ont rendu nécessaire, hier, une réunion entre le chef de l’Etat et le président du...