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Actualités - CHRONOLOGIE

Le pouvoir chercherait à limiter les prérogatives du conseil constitutionnel

Maintenant que le pays a franchi (avec un succès relatif) l’étape du verdict portant sur les recours en invalidation de certains mandats parlementaires, le pouvoir semble s’apprêter à mettre en place une offensive politique afin de tenter de rogner les ailes au Conseil constitutionnel. Une telle campagne pourrait se manifester à un double niveau: modifier le statut interne de cette instance juridique afin de limiter ses prérogatives et sa liberté d’action; désigner cinq nouveaux membres du Conseil susceptibles d’être, sinon «dociles», du moins «coopératifs» avec les hautes sphères.
Deux indices sont venus confirmer hier cette orientation: un commentaire attribué par une source officielle aux «milieux de la présidence de la République», d’une part, et le report, d’autre part, de l’élection par la Chambre de trois membres du Conseil constitutionnel en remplacement du président démissionnaire Wajdi Mallat et des deux autres membres dont le mandat est venu à expiration par «tirage au sort», effectué mercredi dernier.
Lors de la séance parlementaire ordinaire qui s’est tenue hier matin Place de l’Etoile, les députés devaient élire des remplaçants au président Mallat ainsi qu’à MM. Pierre Ghannagé et Jawad Osseirane, tous deux désignés par le «tirage au sort». Ces trois membres du Conseil avaient été élus par le Parlement. Leurs remplaçants doivent, par conséquent, être désignés par ce même pouvoir législatif. Comme prévu, ce vote a été reporté au 7 juillet prochain, soit après l’expiration officielle, le 4 juillet, du mandat de cinq des dix membres du Conseil (VOIR EN PAGE 5 LE COMPTE RENDU DE LA SEANCE PARLEMENTAIRE).
Selon diverses sources toutes concordantes, l’ajournement du vote est dû à la volonté de certains pôles du pouvoir de mijoter un projet d’amendement du statut interne du Conseil constitutionnel. Depuis l’invalidation par cette instance, l’été dernier, de la loi électorale approuvée par le gouvernement et l’Assemblée — en dépit de son caractère anticonstitutionnel — plusieurs voix s’étaient élevées dans les cercles parlementaires afin de redéfinir les prérogatives du Conseil. Les instigateurs de cette campagne — estimant sans doute que le Conseil prenait son rôle un peu trop au «sérieux» — ont souligné qu’il était nécessaire d’imposer des limites strictes et restrictives à la mission de l’instance juridique en question.
Certains milieux parlementaires souhaitent dans ce cadre que les membres du Conseil ne puissent pas faire jurisprudence en envisageant leurs prérogatives sous un angle élargi. A titre d’exemple, de nombreux députés avaient critiqué, l’été dernier, l’initiative prise par le Conseil de déclarer anticonstitutionnelle la décision du gouvernement et du Parlement de proroger de huit mois le mandat de l’actuelle Chambre. Les membres de l’instance juridique avaient alors estimé qu’il était de leur devoir de rejeter cette clause de la loi électorale en dépit du fait que le recours en invalidation qui avait été déposé contre cette loi par dix députés n’avait pas relevé l’illégalité d’une prorogation injustifiée du mandat de la Chambre.
Cette vision élargie de la mission du Conseil constitutionnel ne sied évidemment pas aux pôles d’influence du pouvoir. La récente décision prise par cette instance d’invalider les mandats de quatre députés et de réclamer l’organisation d’élections partielles afin de pourvoir à ces quatre sièges a ainsi été critiquée par les milieux officiels et parlementaires. Après le chef du Législatif Nabih Berry qui avait exprimé, mercredi, des «réserves» au sujet de la tenue du scrutin partiel, ce fut au tour, hier, des sources de la présidence de la République d’accuser les membres du Conseil d’avoir outrepassé leurs prérogatives.
Les milieux de Baabda, cités par l’ANI (officielle), ont donné dans ce cadre leur propre interprétation des prérogatives et de la mission du Conseil. Ils ont souligné que ce dernier n’a nullement le droit de décider de la tenue d’élections partielles «qui coûtent cher à l’Etat» ni de proclamer vainqueur le candidat qui a déposé le recours en invalidation. Pour les sources de la présidence, c’est le candidat qui a obtenu le plus grand nombre de voix face au député dont le mandat a été invalidé qui devrait être proclamé vainqueur des élections. Et comme pour mettre en relief leur conception très restrictive de la mission du Conseil constitutionnel, les sources susmentionnées ont ajouté que les membres du Conseil devraient se baser uniquement sur la législation libanaise dans leur mission et s’abstenir ainsi de se référer à des jurisprudences ou des lois étrangères pour prendre leurs décisions.
Le débat tourne ainsi autour de l’étendue des prérogatives du Conseil constitutionnel. Doivent-elles être restrictives ou perçues, au contraire, sous leur angle le plus large? De la réponse à cette question dépend, en réalité, l’existence ou non d’un véritable Etat de droit au Liban.
Maintenant que le pays a franchi (avec un succès relatif) l’étape du verdict portant sur les recours en invalidation de certains mandats parlementaires, le pouvoir semble s’apprêter à mettre en place une offensive politique afin de tenter de rogner les ailes au Conseil constitutionnel. Une telle campagne pourrait se manifester à un double niveau: modifier le statut interne de...