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Actualités - OPINION

Carnet de route Entre ficus et mimosa

J’appelle un institut qui promet à la fois de vous faire maigrir sainement, de redresser votre colonne vertébrale, de vous soumettre à la liposuccion (sic) à votre guise, et de vous assurer une bonne humeur du réveil au coucher.
— Quelle est votre adresse?
— C’est très facile Madame, vous connaissez le rond-point de Tayyouné?
Chic, je le connais, c’est là que ma mère avait appris, par une Palestinienne, à traiter la patate douce en vigne vierge galopante, je l’avais accompagnée une fois. Mais ce n’était qu’un bon début car mon interlocutrice me demanda:
— Vous connaissez l’avenue Baba Sami?
— Heu…
— Vous la prenez en tournant le dos au rond-point de Tayyouné (comment tourner le dos à un cercle, c’est une autre histoire). Vous continuez jusqu’à la première rue à droite, et vous prenez la rue. Vous allez tout droit, tout droit, à deux cents mètres elle est barrée par un mur; vous n’en tenez pas compte, allez toujours tout droit. A gauche, il y a une station d’essence, vous allez toujours tout droit. Attention, cinquante mètre après il y a un coiffeur. Il s’appelle «Garo», son enseigne est en réfection, mais vous verrez des séchoirs dedans. Vous regardez bien la route et vous tournez à gauche, puis à droite. C’est le quatrième immeuble à gauche, les volets sont verts. Là c’est indiqué: «Institut de rénovation», couleur mimosa.
— Mimosa?
— Tamam
Je ne suis toujours pas rénovée. J’attends qu’ils déménagent à Tabaris, rue Gergi Zeidan, près de la statue de la vierge, mais dans la zaroubé perpendiculaire à la librairie Ziad, en laissant le néflier sur leur droite et qu’ils crient «Abou Anis». Une armoire à glace se présentera à eux et leur indiquera mon appartement dont la porte est cachée par un ficus géant; la sonnerie se situe entre la troisième et la quatrième branche, à droite!

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Ce n’est plus comme dans les années soixante où un agent américain de la CIA en mission à Beyrouth, avec pour seules indications le nom de son correspondant libanais, celui de son immeuble et le mot de code «Do you like black tulips?», arrive dans le hall de l’immeuble en question, et trouve, à côté de l’interphone, cinq noms homonymes: cinq Haddad. Lequel de ces cinq est-il son homme? On a l’esprit rapide quand on est espion, et l’Américain se dit qu’il suffit d’utiliser le nom de code pour les départager. Alors il sonne au premier et y va de son «do you like black tulips?»Une voix d’homme lui répond: «Eza baddak Haddad al jassous, tlaa ala al rabé» («Si vous cherchez Haddad l’espion, c’est au quatrième»).
C’est vrai qu’il était joli le Liban de papa!

Amal NACCACHE
J’appelle un institut qui promet à la fois de vous faire maigrir sainement, de redresser votre colonne vertébrale, de vous soumettre à la liposuccion (sic) à votre guise, et de vous assurer une bonne humeur du réveil au coucher.— Quelle est votre adresse?— C’est très facile Madame, vous connaissez le rond-point de Tayyouné?Chic, je le connais, c’est là que ma mère...