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Actualités - CHRONOLOGIE

Affirmant que les accusations portées contre le conseil constitutionnel sont infondées Hariri contre-attaque et dénonce la campagne menée par ses détracteurs

Les circonstances et les tiraillements qui entourent les délibérations du Conseil constitutionnel, et qui portent sur les recours en invalidation de certains mandats parlementaires, continuent de susciter de vifs remous à plus d’un niveau. Ce dossier a été au centre de la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, hier. Et pour cause: de nombreuses sources d’information ainsi que plusieurs députés font état de pressions exercées sur les membres du Conseil constitutionnel afin de les amener à orienter leur verdict dans un sens conforme à la volonté du pouvoir central (VOIR AUSSI PAGE 3). Le premier ministre Rafic Hariri a été plus particulièrement mis en cause sur ce plan, ce qui l’a poussé à prendre la parole longuement, hier, au début de la séance du Cabinet afin de dénoncer la campagne menée contre cette haute instance judiciaire. M. Hariri a été plus loin en affirmant que «l’ensemble des institutions étatiques sont la cible d’une guerre à outrance» visant à discréditer l’action menée par le gouvernement en place.
En tout état de cause, les divergences qui opposent les membres du Conseil constitutionnel au sujet du sort qui devrait être réservé à certains recours en invalidation ne sont plus un secret pour personne. Il est désormais acquis que, sur les 19 recours dont a été saisi le Conseil (portant sur 17 sièges parlementaires), trois ont été définitivement acceptés. Il s’agit de ceux de MM. Robert Ghanem (contre le député maronite de la Békaa-Ouest Henry Chédid), Nazem Khoury (contre le député maronite de Jbeil Emile Nawfal) et Mohammed Yahya (contre le député sunnite du Liban-Nord Khaled Daher). Les trois parlementaires en question devraient donc perdre leur siège.

Malaise

Les divergences qui ont retardé jusqu’à présent le verdict du Conseil portent sur les recours présentés par MM. Albert Moukheiber (contre le député grec-orthodoxe du Metn-Nord Ragi Abou Haïdar), Mikhaël Daher (contre le député maronite du Akkar Fawzi Hobeiche), Issam Naaman (contre le député druze de Beyrouth Khaled Saab) et Habib Sadek (contre le député chiite du Liban-Sud Ali Hassan Khalil). D’aucuns affirment que des pressions ont été exercées par les hautes sphères du pouvoir sur plusieurs membres du Conseil constitutionnel afin que ces quatre derniers recours ne soient pas retenus. Certains députés ont même affirmé qu’un membre du Conseil a bénéficié d’avantages financiers en contrepartie de démarches qu’il aurait entreprises auprès de plusieurs de ses collègues afin qu’ils fassent pencher la balance en faveur d’un verdict conforme aux vœux du pouvoir.
Ces informations ont été démenties hier par le premier ministre qui a affirmé qu’elles s’inscrivent dans le cadre de «la guerre à outrance» menée contre les institutions de l’Etat. M. Hariri a invoqué «la conjoncture régionale délicate» et les «tentatives israéliennes de saper le processus de paix» pour souligner que la priorité devrait être accordée à «la stabilité interne sur le double plan politique et économique». Il reste que tout en dénonçant la campagne menée par divers milieux d’opposition, le Conseil des ministres s’est évidemment abstenu d’évoquer, de près ou de loin, la possibilité d’ouvrir une enquête afin de déterminer les causes de la démission du président du Conseil constitutionnel. Ce dernier a ouvertement accusé certains hauts responsables de chercher à inféoder le Conseil à leur volonté. Est-il concevable que cette affaire ne soit pas tirée au clair? Compte tenu du caractère sacré de la mission du Conseil, est-il possible qu’aucune instruction ne soit menée au sujet des accusations lancées par certains députés?

L’intervention de Hariri

L’ensemble de ce dossier a incontestablement laissé planer un malaise au sein même de l’instance en question. Contrairement à ce qui était prévu, le Conseil n’a pas tenu hier de réunion. Des concertations informelles ont simplement eu lieu entre certains membres. Selon diverses sources, le Conseil devrait se réunir à nouveau demain, vendredi. Il devrait, en tout vraisemblance, rendre public son verdict d’ici lundi prochain, au maximum. De fait, entre le 4 mai et le 4 juin, un tirage au sort devra être effectué afin de remplacer quatre des membres du Conseil. En clair, cela signifie que le mandat de certains membres devrait venir à expiration à partir du 4 mai, ce qui laisse peu de temps au Conseil pour rendre son verdict.
Pour en revenir à la séance du Cabinet, qui s’est tenue de 17 heures 45 à 19h45 au palais gouvernemental de Sanayeh (VOIR PAR AILLEURS), le ministre de l’Information Bassem el-Sabeh a annoncé qu’au début de la réunion, le chef du gouvernement a évoqué «le climat politique qui a sévi dans le pays au cours des dernières semaines». «Certaines parties, a souligné M. Hariri, ont tenté de focaliser l’attention sur divers sujets qui ne servent pas la stabilité interne et qui occultent, par ailleurs, de nombreux acquis qui sont le fruit de cette stabilité».
Et le ministre de l’Information d’ajouter: «Le président Hariri a évoqué le tapage fait autour de l’action du Conseil constitutionnel. Il a mis l’accent sur les tentatives déployées afin de semer le doute autour de l’action de cette instance. Certains ont même été jusqu’à douter de l’action de la justice. M. Hariri a déploré un tel climat. Il a souligné que c’est le gouvernement qui a élaboré le projet de loi portant création du Conseil constitutionnel. Il l’a transmis au Parlement qui l’a examiné et approuvé. Le statut interne qui a été approuvé dans ce cadre a accordé toutes les prérogatives nécessaires à ce Conseil de manière à empêcher toute ingérence dans les affaires internes du Conseil ou toute pression qui serait exercée contre les membres de cette instance».
«L’indépendance du Conseil constitutionnel ne saurait être discutée, a poursuivi M. Hariri. Aucune des institutions de l’Etat ne bénéficie de la même immunité consentie par la loi à cette instance. Mais en dépit de ces faits, certaines parties se plaisent à jeter de la poudre aux yeux, à discréditer l’image du pays et à porter atteinte à cette institution ainsi qu’aux autres institutions».
Le ministre de l’Information a ajouté que M. Hariri a mis en garde contre «les dangers des campagnes de suspicion qui visent l’ordre public et la Justice libanaise, en particulier». «Une guerre à outrance est menée contre toutes les institutions de l’Etat, a affirmé le premier ministre. Certaines parties désirent refléter une image erronée de la situation dans le pays en prétendant que rien ne va. Nous reconnaissons que certaines erreurs sont commises. Nous ne prétendons pas que la situation dans le pays soit devenue idéale. Mais il est surprenant de constater que certaines fractions se livrent à un ciblage quotidien et continu qui ne met en relief que les aspects négatifs sans jamais évoquer les acquis importants réalisés à plus d’un niveau».
Et M. Hariri d’ajouter: «Ce qui se passe souvent n’est pas normal. Nous nous adressons au monde extérieur afin qu’il participe à la reconstruction et qu’il investisse dans le pays. La confiance du monde dans la résurrection du Liban se renforce de jour en jour. Pendant ce temps, certaines parties s’emploient, sur le plan interne, à ternir l’image du Liban. Nous faisons face à de nombreux problèmes à différents niveaux, à commencer par la conjoncture régionale et les tentatives israéliennes de saper le processus de paix, sans compter la poursuite de l’occupation israélienne au Liban-Sud et dans la Békaa-Ouest. Ces graves problèmes imposent de consolider la stabilité interne, laquelle passe nécessairement par la stabilité politique et économique».
«Ce qui se dit au sujet du Conseil constitutionnel est totalement infondé, a ajouté M. Hariri. Nul n’a autorité pour établir un quelconque contact avec l’un des membres du Conseil constitutionnel, ni le président de la République, ni le premier ministre, ni le ministre de la Justice, ni tout autre responsable. Tout ce qui se dit sur des divergences entre les membres du Conseil ne nous concerne pas. Cela ne concerne que les membres du Conseil lequel est, seul, habilité à trancher de telles divergences».
M. Hariri a, par ailleurs, évoqué les critiques qui ont été formulées au sujet de la décision du gouvernement d’approuver un projet de loi visant à proroger de huit mois le mandat de la Chambre. Ce projet a été qualifié d’anticonstitutionnel par de nombreux juristes et experts en droit constitutionnel. «Ce qui importe au gouvernement sur ce plan, a précisé M. Hariri, est d’éviter que les élections législatives aient lieu en été. Peu importe, par conséquent, que le mandat soit prorogé de huit mois ou raccourci de quatre mois. Cela est d’autant plus nécessaire que le mandat de la Chambre actuelle vient à expiration durant l’été de l’an 2000. Or durant cette période, le Liban doit accueillir les Jeux asiatiques qui entraîneront une série d’impératifs tourisitiques, économiques, sportifs et sécuritaires».
Les circonstances et les tiraillements qui entourent les délibérations du Conseil constitutionnel, et qui portent sur les recours en invalidation de certains mandats parlementaires, continuent de susciter de vifs remous à plus d’un niveau. Ce dossier a été au centre de la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres, hier. Et pour cause: de nombreuses sources d’information...