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Actualités - ANALYSE

Corruption, fraude, concussion : un interminable chapelet d'exploits impunis

Netanyahu éclaboussé, déstabilisé politiquement pour un bazar politico-judiciaire qui, vu d’ici, paraît des plus «ordinaires»... Toute cette tempête pour «trois fois rien»... Mais que dirait-on, que ferait-on donc en Israël si on y était confronté comme ici à de vrais gros scandales?... Dont le moindre n’est sans doute pas que les accusations de concussion portées au plus haut niveau restent sans suite, paroles en l’air, fleurs-flocons de coton d’arbre, que le vent chaud du faux printemps effeuille puis disperse...
Un diplomate occidental relève à ce propos que «le terme de «corruption» a perdu de sa force au Liban. L’opinion, sursaturée de «révélations», n’y prête plus qu’une attention distraite car elle sait que le corrupteur ne sera pas poursuivi et que le corrompu ne sera pas jugé».
Et de dévider l’édifiant chapelet suivant:
— «Voici quelque temps, une personnalité de marque a accusé un ancien responsable d’avoir trompé le fisc en enregistrant un appartement qu’il venait d’acquérir au dixième de sa valeur effective.
— Une accusation similaire, mais pour des terrains, a été portée par la même source informée contre un responsable en exercice...
— En plein Conseil des ministres, le chef de l’Etat en personne a révélé que des ministres et des députés ne paient pas leurs factures d’électricité.
— Parallèlement, un député a été accusé d’avoir touché une forte prime pour saborder une enquête sur un contrat public véreux dans lequel était impliqué un ancien dirigeant.
— Le président de la Chambre en personne a affirmé par ailleurs que la troïka, dont il faisait partie, avait couvert des opérations de concussion et de détournement de fonds.
— Le ministre Walid Joumblatt de son côté a avoué qu’il faisait partie «des requins de la finance» et que, comme tout le monde, il utilisait dans ses sociétés une double comptabilité pour échapper à l’impôt».
«Et le reste à l’avenant, le point commun étant que tout cela n’entraîne aucune enquête, judiciaire ou parlementaire, comme si de rien n’était... Une règle perverse qui déteint sur la politique: on a pu ainsi voir un ministre, M. Chawki Fakhoury, accuser le chef du gouvernement d’avoir violé la Constitution, ce qui n’est pas peu, sans démissionner pour protester ni être révoqué pour manquement grave à la cohésion ministérielle...».

Opacité

«Dans cette purée de poix, poursuit le diplomate occidental, l’opinion locale n’y voit pas clair, ne parvient pas à savoir quelles charges sont fondées et quelles autres sont fausses. Pourtant, le Liban est doté d’un solide appareil de lois. Il dispose d’une instance spéciale pour juger les présidents et les ministres. Mais rien n’est appliqué. Chaque affaire qui se déclare, on s’empresse de l’étouffer à coups d’immixtions et de pressions, comme on l’a vu pour les invalidations de mandats parlementaires, ce qui a provoqué la démission du président du Conseil constitutionnel, M. Wajdi Mallat».
«Dans tout pays démocratique, ajoute le diplomate, on voue un véritable culte à la justice en tant que pouvoir véritablement autonome et impartial. Comme le souligne M. Hussein Husseini, il n’y a tout simplement pas d’Etat quand il n’y a pas un pouvoir judiciaire indépendant qui veille à ce que les lois soient respectées de tous, en réclamant des comptes aux corrupteurs et aux corrompus».
Cependant, une source judiciaire fait remarquer pour sa part qu’il existe également des barrières qui proviennent des textes. Elle cite le cas d’un ancien ministre, accusé d’avoir détourné des fonds lors de son passage au ministère et contre lequel on avait dû renoncer à engager des poursuites, car l’article 70 de la Constitution y fait obstacle. Cet article stipule en effet que, même en cas de délit de droit commun commis dans l’exercice de fonctions officielles, seule la Chambre des députés peut inculper un responsable, l’acte d’accusation devant être obligatoirement entériné par une majorité parlementaire des deux tiers... Dernièrement, on a fait du progrès... sur le papier. On sait en effet qu’après avoir été mise au frigo pendant de longues années, une Haute Cour habilitée à juger les présidents et les ministres a été mise sur pied, conformément à l’article 80 de la Constitution. Elle se compose de sept députés désignés par leur pairs et des huit plus hauts magistrats. Les inculpations doivent se faire à une majorité de dix membres sur quinze. Une condition que la source judiciaire citée trouve «trop restrictive» en estimant que la Haute Cour ne va probablement jamais fonctionner pour de vrai... Cette personnalité pense qu’il est préférable de laisser agir la justice ordinaire et note que «si on empêche par exemple le Parquet financier de poursuivre les ministres malhonnêtes, sous prétexte qu’ils ne relèvent que de la Haute Cour, l’Etat ne pourra jamais récupérer les fonds qu’ils auraient volés. Sans compter qu’on ne voit pas comment on peut mener à bien des enquêtes mettant en cause nombre de gens quand certains inculpés jouiraient pratiquement de l’immunité politique et d’autres pas... Et, dans le même ordre d’idées, comment peut-on instruire deux fois et juger simultanément deux fois une même affaire devant deux instances distinctes»... «Certes, conclut ce juriste, la Haute Cour peut siéger pour juger un ministre qui a failli à titre disciplinaire si l’on peut dire; mais il ne faut pas que cela empêche qu’il soit également poursuivi au pénal et ou au civil, le cas échéant».
E.K.
Netanyahu éclaboussé, déstabilisé politiquement pour un bazar politico-judiciaire qui, vu d’ici, paraît des plus «ordinaires»... Toute cette tempête pour «trois fois rien»... Mais que dirait-on, que ferait-on donc en Israël si on y était confronté comme ici à de vrais gros scandales?... Dont le moindre n’est sans doute pas que les accusations de concussion portées au...