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Actualités - CONFERENCES INTERNATIONALES

Malte 97 : les arabes ont dû se contenter du minimum Israël réussit à empêcher la moindre condamnation de sa politique La deuxième conférence euro-méditerranéenne se termine sur un communiqué tronqué

La Valette, de notre envoyé spécial Roger Gehchan.
(...) «Dans ce contexte, ils expriment leurs profondes inquiétudes à l’égard des obstacles qui entravent le processus de paix en raison de la politique du fait accompli, et appellent à la nécessité de s’abstenir de prendre toute attitude négative ou d’entreprendre des initiatives unilatérales en violation des conventions internationales qui sont de nature à entraver la réalisation d’un règlement pacifique, juste, global et durable au Moyen-Orient dans le cadre du processus de paix tel que convenu à Madrid le 31 octobre 1991».
Aussi incroyable que cela puisse paraître, ces lignes anodines ont failli faire capoter la conférence euro-méditerranéenne de Malte. Il a fallu six heures de négociations mardi soir (jusqu’à 3 heures du matin) et de nouveau dix heures de tractations mercredi (jusqu’à 16 heures 30) pour trouver un accord sur un texte de remplacement, le président de l’Union européenne, le Hollandais Hans van Mierlo, l’ayant jugé inacceptable par Israël et le texte ayant été effectivement considéré comme tel par les représentants de l’Etat hébreu. Il a donc fallu d’interminables tractations, qui ont provoqué un retard de deux heures trente de la cérémonie de clôture de la conférence et au cours desquelles la rumeur d’un possible fiasco a couru à plus d’une reprise, pour qu’un accord sur un nouveau texte soit enfin conclu (en grande partie grâce aux démarches du ministre français des Affaires étrangères, M. Hervé de Charette).
Le texte finalement agréé se présente comme suit:
(...) «Exprimant, dans ce contexte, leur profonde inquiétude devant les obstacles qui entravent le processus de paix au Moyen-Orient, et soulignant la nécessité de réaliser un règlement juste, global et durable au Moyen-Orient dans le cadre du processus de paix tel que convenu à Madrid le 31 octobre 1991». (VOIR ENCADRE).
Ainsi les termes «fait accompli», «attitude négative» «initiatives unilatérales» et «violations des conventions internationales», qui font tous allusion à la politique d’implantation de colonies de peuplement juif suivie par le Likoud, et que les Arabes tenaient absolument à faire figurer dans le communiqué final parce que la politique du Likoud représente la négation même des principes sur lesquels est fondé le processus de paix, ces termes ont dû être abandonnés. Les Européens ont fait valoir que le processus de paix lancé à Madrid en 1991 et le partenariat euro-méditerranéen initié à Barcelone en 1995 sont deux choses différentes, indépendantes, bien que le blocage du premier se répercute forcément sur le cours du second. Finalement, les Arabes, qui espéraient obtenir à Malte une condamnation indirecte du blocage du processus de Madrid par Israël, ont dû déchanter et se contenter du minimum. Après bien des hésitations et des conciliabules, ils ont préféré accepter ce minimum, plutôt que de maintenir leurs exigences et risquer, en provoquant l’échec de la conférence, d’irriter les Européens, qui comprennent leur point de vue, mais ne veulent pas pour autant indisposer Israël, d’une part en raison des pressions que les Américains exercent sur eux et, d’autre part, pour conserver la possibilité de jouer un rôle d’arbitre au Proche-Orient, si un jour ils en avaient l’occasion.
Le préambule du communiqué final de la conférence de Malte, dans son volet politique, reprend les termes du communiqué de Barcelone, avec tout juste un petit plus (l’expression de la «profonde inquiétude»). Au lieu d’avancer dans son volet politique, le partenariat euro-méditerranéen (les quinze de l’Union européenne, plus Malte, Chypre, la Turquie, Israël, le Liban, la Syrie, la Jordanie, les territoires palestiniens, le Maroc, la Tunisie, l’Algérie et l’Egypte) ont dû reculer. Mais c’était apparemment le seul moyen de sauver la rencontre, Israël ayant menacé de se retirer si le communiqué final devait comporter des termes lui faisant assumer la responsabilité du blocage du processus de Madrid. Pour trouver une solution, il a fallu alors s’en remettre à une plate-forme conforme à l’esprit du partenariat et agréée par tous. Ce plus petit commun dénominateur ne pouvait être que la déclaration de Barcelone, à laquelle aussi bien Israël que les Arabes avaient adhéré.

L’ombre tutélaire de l’Amérique

En réalité, dès avant l’ouverture de la conférence de Malte, tous les observateurs avaient prévu que le conflit du Proche-Orient dominerait les débats et empêcherait des progrès d’être enregistrés sur le volet politique. Cependant, les Européens ont fait valoir que le processus de Barcelone était un projet à très long terme, comportant, outre le volet politique, deux autres très importants, l’un économique et financier, l’autre culturel et social. Ces deux derniers volets, ont-ils plaidé, sont très importants pour le développement du Maghreb et des pays du sud de la Méditerranée et il ne faut pas, à cause d’un facteur qui est peut-être conjoncturel (le blocage du processus de paix) torpiller le partenariat, dont les objectifs sont différents et à long terme.
Malgré tous les arguments développés par les Européens, il reste ceci: à Malte, il y avait, en gros, 26 pays d’un côté, avec des sensibilités et des convictions certes largement différentes, mais ayant malgré tout une analyse convergente de la situation au Proche-Orient, et il y avait, de l’autre côté, Israël tout seul. Et c’est ce dernier qui est parvenu à imposer ses conditions.
Israël a bénéficié de plusieurs facteurs favorables. En premier lieu, il faut citer l’ombre tutélaire de la toute-puissante et glaciale Amérique. Ensuite, il faut évoquer les nuances des positions des huit Etats arabes présents à Malte. Ceux éloignés géographiquement de la scène du Proche-Orient voient dans le partenariat surtout un moyen d’aider au développement de leur économie. Ils sont dès lors particulièrement soucieux de ménager l’Union européenne. Les autres pays, eux, voudraient infléchir davantage le partenariat vers le politique et le conflit du Proche-Orient. L’attitude arabe n’est donc pas véritablement unifiée.
Il en est de même au sein de l’Union européenne. La Hollande, qui préside actuellement l’U.E., est connue pour sa sympathie inconditionnelle à l’égard de l’Etat hébreu. Le président hollandais de l’U.E. aurait donné à Israël l’engagement que le communiqué final ne comporterait aucun terme hostile à son égard. C’est du reste à cette condition que David Lévy aurait accepté de venir à Malte. S’il avait fait défection, la conférence aurait dû probablement être ajournée. Selon certaines informations, l’attitude trop indulgente à l’égard d’Israël de M. Hans Van Mierlo aurait provoqué des prises de bec entre lui et les chefs des délégations française et espagnole.
Les difficultés et les obstacles auxquels s’est heurtée la conférence ont abouti d’ailleurs à la publication d’un communiqué tronqué. Seul, en effet, le préambule a été rendu public. Les parties relatives aux volets politique, financier, économique, culturel et social, qui ne font pas l’objet de divergences sérieuses, mais que les experts n’ont pas eu le temps de mettre au point, ne paraîtront que plus tard. Il existe encore des points à régler à ce niveau et les hauts fonctionnaires devront se réunir de nouveau pour en venir à bout. Cependant, aucune date n’a été fixée pour ces réunions, ce qui est significatif du flou dans lequel a pris fin la réunion de Malte.
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