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Actualités - ANALYSE

Processus régional : quelles chances pour le double volet syro-libanais? ...

Après l’accord sur Hébron, les spéculations vont bon train mais tous les analystes s’accordent sur un point: Netanyahu n’en démord toujours pas pour ce qui est de sa ligne politique de fond, qu’il résume dans le slogan «la sécurité d’Israël avant toute chose, paix comprise». A preuve que ce même accord sur Hébron prévoit une présence sécuritaire israélienne constante dans la ville, ainsi que le maintien des 400 colons juifs (en réalité 278, 122 leur venant en renfort tous les jours sans résider à Hébron) qui défient fusil-mitrailleur au poing 120.000 Arabes désarmés.
Dans cette optique crispée, Netanyahu a obligé les Palestiniens à accepter un report de plus d’un an pour le redéploiement israélien en Cisjordanie, mouvement dont il réduit d’ailleurs, et de beaucoup, l’étendue. Quant aux autorités palestiniennes, elles se voient sommées d’intensifier leur «lutte contre le terrorisme», pour la mise au pas du Hamas, sous peine de voir Netanyahu dénoncer les accords d’Oslo en bloc, reprendre ses billes et replacer Gaza-Jéricho sous le contrôle de ses forces. Cette pression israélienne, Arafat en fait les frais à l’intérieur face aux courants palestiniens qui se déclarent opposés à l’accord sur Hébron qu’il vient de signer, courants qui débordent le cadre des intégristes ou de l’opposition traditionnelle tant Abou Ammar s’est laissé arracher des concessions.
Ceci étant, on se demande à Beyrouth si cet accord de Hébron représente un coup d’arrêt «préventif» en ce qui concerne le restant du processus régional ou si au contraire il annonce la prochaine reprise des négociations syro-israéliennes sur le Golan qui elles-mêmes doivent préluder au redémarrage des pourparlers libano-israéliens sur la libération du Sud.
Un diplomate local en retraite souligne à ce sujet «qu’en ce qui concerne la position israélienne, elle obéit de toute évidence à une tactique ponctuelle de douche écossaise. Netanyahu souffle le chaud et le froid, en alternant menaces et propos rassurants voire prometteurs. Et l’on finit par se demander ce qu’il veut dire au juste quand dans une même déclaration il répète que le Golan est stratégiquement essentiel pour Israël et affirme qu’il est prêt à négocier avec la Syrie».

Conditions

Et de souligner que si Netanyahu «veut «dialoguer» pour mieux boucler encore le secteur frontalier et pour en partager les eaux, en continuant à rejeter toute idée de restitution du territoire, il est évident que la Syrie refusera de reprendre les pourparlers. Damas tient en effet à ce qu’on reparte du point où on était arrivé à Wye Plantation du temps des travaillistes en février 1996. Cependant tout prête à croire qu’avec la complicité tacite des Américains, Netanyahu intensifiera ses pressions d’intimidation sur la Syrie pour discuter de ce dispositif sécuritaire frontalier dont on avait effectivement commencé à parler au Maryland l’an dernier, mais seulement après l’engagement public pris par le gouvernement israélien de l’époque en ce qui concerne le principe d’un retrait total du Golan. Même alors, rappelle cette source, l’on avait débouché techniquement sur une impasse, à cause du problème des stations israéliennes de pré-alerte et de l’étendue du no man’s land démilitarisé, comme de la profondeur de champ militaire (espace, armement et effectifs) attribué à chacun des deux pays en bordure de cette zone neutralisée».
Cet ancien de la Carrière craint que «Madeleine Albright, tout feu tout flamme comme on la connaît, ne mette tellement le paquet que les pourparlers ne finissent effectivement par reprendre sur le dispositif sécuritaire, sous prétexte qu’un arrangement sur ce pont faciliterait ensuite des retraits... que Netanyahu n’exécuterait jamais. Tout indique en effet que le chef du Likoud n’accepterait de rétrocéder dans le meilleur des cas, — sous les pressions combinées des Etats-Unis, de l’Europe et de l’Egypte — que quelques pics du Golan qui donnent directement sur la vallée syrienne en contrebas. Il garderait pour lui les hauteurs surplombant la Galilée, toujours sous prétexte de défense et le processus de paix s’arrêterait là».
— Concernant le Liban-Sud, cette personnalité relève que «l’ambassadeur U.S., M. Richard Jones, croit pouvoir annoncer qu’il y aura du progrès dans les mois à venir autant pour cette région que sur le plan du processus régional de paix. Quelques jours auparavant, le numéro deux de l’ambassade M. Ron Schlicker avait évoqué pour sa part la dissociation des deux volets libanais et syrien dans ce processus régional. Ce qui laisse à penser qu’on reprendra des pourparlers bilatéraux sur la base des principes de Madrid — reconfirmés par les Américains en dépit du mépris dans lequel Netanyahu veut les tenir —, mais en donnant de prime abord la priorité aux mesures de sécurité, non aux retraits. Les Etats-Unis devront en tout cas naviguer au plus près et prouver que sur le point des retraits ils peuvent faire changer d’avis Netanyahu comme ils l’ont fait pour les accords d’Oslo qu’initialement il rejettait totalement et qu’il a fini par admettre, ou pour Hébron «ville de ses ancêtres» qu’il restitue à 80%. Washington peut donc influer sur ce radical, peut-être moins entêté qu’il n’y paraît de prime abord. Mais il y faudra les formes. Et le temps, beaucoup de temps, surtout en ce qui concerne le Golan et partant, le Liban-Sud, lié malgré lui au reste du dossier».

Entraves

Cet ancien diplomate passe ensuite en revue les éléments «de retardement:
— Netanyahu a d’entrée de jeu, et tout à fait officiellement notifié Warren Christopher qu’il ne reconnaît pas les engagements de ses prédécesseurs travaillistes concernant la restitution du Golan, promesses «nulles et non avenues au regard des lois internationales» affirme-t-il dans une lettre au secrétaire d’Etat U.S. sortant. Il a confirmé par ailleurs qu’il n’est pas question pour lui de reprendre les pourparlers avec les Syriens au point où ils étaient arrivés l’an dernier, ajoutant qu’il faut négocier «sans conditions préalables», entendre les conditions posées par les principes de Madrid sur la restitution des territoires arabes envahis en 1967.
— Lors d’une récente réunion du comité de surveillance du cessez-le-feu au Sud, les Français ont pris une position remarquée en s’alignant sur les thèses américaines qui réclament en préalable à un retrait israélien l’arrêt des actions de la résistance active libanaise. Parallèlement, l’ambassadeur français à Beyrouth a déclaré en substance que l’intérêt même du Liban commande qu’il n’y ait plus d’opérations pouvant ébranler la stabilité du pays. Le diplomate peut certes signifier par là également les actions israéliennes, il n’empêche que cette recherche de «zéro-activité» sur le terrain convient parfaitement à Tel-Aviv qui en fait même depuis longtemps une condition pour commencer à songer à rendre son droit territorial au Liban... Du côté occidental, il n’y a donc pratiquement plus personne qui veuille respecter vraiment la 425 et nous aider à la faire appliquer.
— Dans le même sens, on note qu’on tente maintenant de donner des accords d’avril (qui consacrent uniquement le respect des civils de part et d’autre) une interprétation élargie, pour en faire une trêve totale jusqu’à la conclusion des éventuelles négociations de paix. C’est là la position ancienne des Israéliens, soutenus à fond par les Américains, à cause de la phobie que ces derniers éprouvent à l’encontre du Hezbollah.
— Parallèlement, on signale un dialogue officieux franco-israélien sur la situation au Liban-Sud. Ces échanges, que Paris dément, auraient porté sur la constitution d’une nouvelle force multinationale qui se chargerait du maintien de l’ordre dans cette région, (et peut-être même au Golan) de l’application des mesures de sécurité souhaitées par l’Etat hébreu, en prélude à des pourparlers sur les retraits, en base d’un calendrier-programme. Si la Syrie refuse un tel plan, en insistant pour obtenir d’abord confirmation de l’engagement israélien à lui rendre tout le Golan, les pressions exercées sur elle se traduiraient par la dissociation du dossier Sud où une sorte de «trêve de fer» serait imposée par la force, la conclusion d’un traité de paix devant intervenir après le règlement du contentieux syro-israélien. Mais si par contre Damas adopte une attitude souple, il pourrait être invité à participer aux discussions sur le dispositif de sécurité au Liban-Sud, tout comme il l’a été pour les arrangements d’avril...»
En tout cas rien ne sera clair avant que Madeleine Albright débarque dans la région. Et même alors il faudra sans doute attendre de longs mois avant que la situation ne se décante vraiment...
E.K.
Après l’accord sur Hébron, les spéculations vont bon train mais tous les analystes s’accordent sur un point: Netanyahu n’en démord toujours pas pour ce qui est de sa ligne politique de fond, qu’il résume dans le slogan «la sécurité d’Israël avant toute chose, paix comprise». A preuve que ce même accord sur Hébron prévoit une présence sécuritaire israélienne...