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Actualités - OPINION

Vient de paraître Poésie et information, deux ouvrages du colonel Ali Awad (photos)

La vie militaire et l’élan littéraire n’ont rien d’incompatible. Au contraire, parfois de la fusion des deux jaillissent des étincelles insoupçonnées… Comment présenter les écrits du colonel Ali Awad qui s’inscrivent dans cette lignée et qui oscillent avec aisance de la poésie à l’essai? On se penche volontiers d’abord sur cette mince plaquette intitulée «Majamer al-leil» (Brasiers de nuit) — 104 pages — éditée chez «Technopress» et illustrée pour la couverture par le peintre Wagih Nahlé. L’auteur y dévoile les tourments d’un cœur épris. De la vie et d’une femme — reflet d’une éternelle Eve troublante — dont les atours sont chantés en termes dissolvants. Sensualité, émotion, images, étreintes, désirs, tendresse, noblesse des sentiments tout est évoqué dans un flot de mots qui jouent avec subtilité sur le rythme et la narration d’une poésie libre emportée au gré de l’inspiration et du moment. Né d’une promenade à Charleville lors d’un séjour en France, ce recueil sonne dans un arabe imagé et châtié. Il est aussi imprégné de propos existentiels qui sont autant d’interrogations aux jours qui passent, au mystère de l’avenir, aux sensations innombrables dont nous sommes l’objet. Parlant des feux de l’amour, des intermittences du cœur, rêvant des espoirs de bonheur des amants chavirés, le poète est animé d’un souffle véhément. Ecoutons le clamer dans sa candide douceur: «Mon amour est comme les vagues de la mer, tantôt il se calme tantôt il se révolte, mais il ne s’assoupit jamais…»

L’information

De la tornade des mots portés par les vents du Parnasse, on débarque en terre plus calme, plus prosaïque et cartésienne, celle de l’information. Car le colonel Awad, à part taquiner les muses, a des fonctions d’information au sein de l’armée. Après de sérieuses études supérieures à l’université de Paris II, il signe un ouvrage traitant avec objectivité d’un thème de brûlante «Information et opinion publique» (aux éditions Nazih Karaki — 528 pages — avec une illustration du caricaturiste Pierre Sadek en couverture). Ce livre volumineux et documenté dénonce toute information tendancieuse ou outrancière. En exergue, l’auteur souligne l’importance capitale de l’information dans toute société et inscrit cette pensée: «La destruction des nations ne se passe pas sur les champs de bataille mais généralement dans les domaines de la pensée et de la culture».
Voilà le ton donné, et partant de cette réflexion, l’auteur entreprend une étude diversifiée et profonde sur la notion, l’étendue, les aléas, la conception et le rôle de «la propagande» et sa perception par l’opinion publique. Il est normal de vouloir faire tout d’abord le point de ces notions au Liban même où les distorsions en tous sens ont été multiples durant les années de guerre dominées par le chaos, l’anarchie, la peur et la déroute. L’auteur fait une approche «scientifique» de la psychologie des foules en temps de guerre, notamment libanaise. Ensuite sont abordés avec force détails, documents à l’appui, les divers aspects de propagande où sont répertoriés les thèmes du lavage de cerceau, de la rumeur, du rôle des services secrets, de la guerre psychologique et de son impact, du moral des forces armées, de la fragilité des foules en temps de crise… Tout ceci est illustré d’exemples d’événements et de personnages locaux et régionaux sériés, analysés commentés, qui ne manquent ni de pertinence ni d’intérêt. Rédigé dans une langue arabe claire et précise, épinglant avec une remarquable vivacité d’esprit les «fuites» et les déviances d’un pouvoir redoutable — celui de l’information bien entendu — l’auteur étrille les idées reçues et prône une communication équitable et responsable rendant à l’Etat sa souveraineté et son image de marque tout en respectant son entité et son identité. En ce temps de controverse et de conflit sur la liberté de la presse et des média audiovisuels, voilà un ouvrage instructif à garder comme référence utile.

Edgar DAVIDIAN
La vie militaire et l’élan littéraire n’ont rien d’incompatible. Au contraire, parfois de la fusion des deux jaillissent des étincelles insoupçonnées… Comment présenter les écrits du colonel Ali Awad qui s’inscrivent dans cette lignée et qui oscillent avec aisance de la poésie à l’essai? On se penche volontiers d’abord sur cette mince plaquette intitulée...