Rechercher
Rechercher

Actualités - ANALYSE

L'inquiétude est à son paroxysme Le sud dans l'attente des options de Netanyahu...

«L’impasse, dit Chirac parlant du Proche-Orient, risque de conduire à la violence». C’est une évidence. Et peut-être un euphémisme. Car la présente tension, qui s’accompagne d’un très distinct bruit de bottes peut virtuellement provoquer une guerre en bonne et due forme entre la Syrie et Israël, voire entre ce dernier et tous ses voisins arabes. Une éventualité qui s’explique d’abord par le fait — malheureusement trop bien connu des Libanais — qu’une dynamique d’escalade finit par échapper à tout contrôle, à toute ligne rouge. Mais qui s’explique aussi, et surtout, par la volonté manifeste de Netanyahu de pacifier la région plutôt que d’y conclure la paix, objectif qui en bonne logique implique nécessairement une épreuve de force, d’armes et de feu. Pour faire plier l’échine à un ennemi il faut le combattre. Et quand il s’agit d’un roc qui n’a rien de grimaldien, en l’occurrence de la Syrie, il est absurde de penser que la diplomatie, les pressions ou les menaces pourraient y suffire. Si l’on admet donc, et toutes ses déclarations le prouvent, que Netanyahu ne veut pas de la paix mais se propose de fonder «la sécurité d’Israël» sur une hégémonie quasi impériale, on peut effectivement craindre qu’il ne mette bientôt le feu aux poudres...
Sans aller jusque là, un ancien ministre libanais connu pour la pertinence de ses analyses, se met un peu à la place du personnage pour souligner que «Netanyahu se trouve objectivement à l’heure des choix difficiles:
— Soit il se rabat sur une position modérée, proche de celle des travaillistes, en se mettant à dos les ministres ultras de son Cabinet. Pour se réengager sur la voie de Madrid, renouer le dialogue avec la Syrie, parachever sans report ni grignotement l’application des accords d’Oslo, il lui faudrait larguer ces compagnons radicaux, ne laisser à ses côtés que les modérés du Likoud et accepter de former un gouvernement de coalition avec les travaillistes... Un peu trop élévée cette barre, bien qu’elle bénéficie du soutien sans faille des Etats-Unis, très favorables à l’idée d’un Cabinet israélien d’union nationale qu’ils ont eux-même lancée dès la fin des élections législatives en Israël. Netanyahu peut-il aussi facilement renoncer à son idéologie même, à son rêve d’un Eretz Israël dominateur, pour laisser s’exprimer le pragmatiste qu’il sait être parfois?
— Soit il œuvre à conforter un statu quo de ni guerre ni paix, avec des flambées épisodiques de violence, d’actions et de réactions mettant en présence au Liban-Sud les forces d’occupation, leurs auxiliaires lahdistes et les résistants tandis que dans les territoires palestiniens comme en Israël le Hamas et les terroristes sionistes se déchaîneraient à tour de rôle. Mais si Netanyahu retenait une telle option, il ne serait plus aux yeux de son électorat qu’un deuxième Pérès, un simple gestionnaire notarial d’une crise à secousses syncopées, et il aurait renoncé à son slogan majeur «la sécurité d’Israël avant tout, paix comprise». Un pari qui serait du reste risqué puisqu’il aurait de fortes probabilités de voir d’une part le Likoud prendre ses distances avec son propre chef, et d’autre part d’ouvrir la voie à la reprise de l’intifada en Cisjordanie. On peut en effet estimer que grosso modo, vu sous un angle israélien, Pérès a réalisé en partie la paix mais pas la sécurité; tandis qu’en pratiquant une politique de «ni guerre ni paix», Netanyahu n’apporterait à son opinion ni paix ni sécurité. Sa position politique intérieure deviendrait alors extrêmement précaire, d’autant que son camp est déjà déchiré par de graves divisions et son gouvernement pourrait sauter».

La fuite en avant

— «Soit encore, reprend l’ancien ministre en énumérant les choix qui s’offrent à Netanyahu, il prend la tête du courant belliciste au sein de son parti et de son gouvernement, pour tenter de résoudre les contradictions qu’il affronte en créant une situation régionale nouvelle par l’action militaire. Il n’est pas interdit de penser que c’est avec de telles arrière-pensées préparatoires qu’Israël connecte le système électronique de son aviation de chasse et son réseau radar de préalerte au satellite U.S. spécialisé dans la détection des rampes, fixes ou mobiles, de missiles sol-sol. Un tel accord implique que les USA donnent aux Israéliens accès à leurs moyens de défense les plus sophistiqués en matière de missiles, ce qui accroît considérablement la suprématie militaire israélienne dans la région. Depuis la guerre du Golfe, les Israéliens n’ont cessé de jouer les pleureuses auprès de Washington, en soulignant la peur que leur cause l’armement en missiles de certains pays arabes, pour obtenir une aide leur permettant de mieux se protéger, et ils ont fini par avoir ce qu’ils veulent. Ils étaient auparavant reliés au système d’alarme américain mais de manière indirecte, les informations leur étant répercutées par une station U.S. à terre qui pouvait donc faire un tri, ne pas tout décrypter à leur usage. Aujourd’hui en se trouvant branchés directement sur le satellite-espion, les Israéliens gagnent du temps et gagnent en quantité de données militaires, ce qui peut leur permettre soit de détruire en vol des missiles tirés dans leur direction, soit d’attaquer préventivement les bases adverses. Ils n’ont plus besoin des «Patriot» américains qu’ils avaient dû emprunter durant la guerre du Golfe pour contrer les «Scud» irakiens. En principe, leur avantage militaire devient tel qu’ils peuvent se laisser plus facilement tenter par une aventure guerrière, en espérant rééditer la guerre-éclair de 67. Mais à dire vrai, ajoute cette personnalité, certains spécialistes estiment que les moyens de défense hautement technologiques précités ne sont pas très efficients quand la distance de tir des missiles est courte, ce qui est le cas pour la Syrie. Les experts croient en outre savoir que le nouveau réseau israélien de missiles antimissiles, toujours en voie d’expérimentation et de mise au point, ne sera pleinement opérationnel qu’en 1999... Quoi qu’il en soit, le plus important dans tout cela est de savoir si les Américains laisseront les Israéliens déclencher la guerre, et s’ils le font sur un coup de tête, sans demander de feu vert, si Washington ne les obligera pas à reculer immédiatement, comme Eisenhower l’avait fait en 56 lors de l’attaque franco-anglo-israélienne sur le canal de Suez».
— «Un autre choix pour Netanyahu, conclut l’ancien ministre, serait de continuer à riposter — sous prétexte de «réciprocité» — aux opérations de résistance par des actions terroristes, des explosions et des assassinats qu’organiseraient ses S.R., au Liban mais aussi en Syrie. Il pourrait en effet penser qu’ainsi il provoquerait des troubles intérieurs, créerait des problèmes relationnels entre ses deux voisins du nord et les amènerait à reconsidérer leur soutien au Hezbollah».
Toujours est-il que Netanyahu doit en principe faire ses choix, si tant est qu’ils ne sont pas encore arrêtés, sous huitaine car, comme on sait, Madeleine Albright entre en jeu à partir du 20 janvier. Et l’on dit qu’elle sera bien plus ferme que Warren Christopher, ce qui reste à vérifier...
E.K.
«L’impasse, dit Chirac parlant du Proche-Orient, risque de conduire à la violence». C’est une évidence. Et peut-être un euphémisme. Car la présente tension, qui s’accompagne d’un très distinct bruit de bottes peut virtuellement provoquer une guerre en bonne et due forme entre la Syrie et Israël, voire entre ce dernier et tous ses voisins arabes. Une éventualité qui...