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Nos Lecteurs ont la Parole

Y a-t-il des guerres justes ?

« La guerre est le massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas » – Paul Valéry. Les deux guerres mondiales ne nous ont-elles rien appris ? Qu’attendons-nous ? Une troisième ? La fin du monde ? Pourquoi sommes-nous encore humainement capables de prononcer ce mot ? Ne devrait-il pas nous repousser absolument ? À croire que, peut-être, la guerre est inévitable. Comme l’a dit Aldous Huxley dans Le Retour au meilleur des mondes : « L’homme n’apprend rien de l’histoire », et c’est cela la leçon de l’histoire. Sommes-nous donc condamnés à subir cette atrocité perpétuellement ? L’humanité n’a-t-elle pas assez évolué pour comprendre ses erreurs ? Il est certainement temps d’y mettre fin. Nombreux sont ceux qui luttent pour le pacifisme, mais jamais ils ne seront assez. Il faut que toute l’humanité se joigne à eux pour atteindre l’objectif ultime : la paix.

Mais cette dernière se définit-elle absolument comme l’absence de guerre ? L’absence de combats violents ? La présence de l’injustice au sein des populations peut-elle être définie comme un état de paix ? La question du pacifisme est amplement plus complexe qu’elle ne le paraît. Aussi pourrions-nous nous demander si la guerre est bel et bien permise, donc si elle est justifiable, ou si elle est dans tous les cas moralement condamnable...

Dans un premier temps, nous étudierons que la guerre est en pratique inévitable, ou du moins qu’elle l’a été jusqu’à nos jours ; pour ensuite, dans un deuxième temps, prouver que la paix est la seule vraie issue qui sauvera l’humanité ; et enfin, dans un troisième temps, nous montrerons que la guerre peut prendre une forme culturelle, et c’est l’art qui nous sauvera.

Nous devons d’abord établir ce qu’est la guerre. Cette dernière est donc l’emploi de la violence dans un but précis. Ces objectifs précis peuvent aller de la volonté de conquête de territoires, passant par la guerre de religion et même les guerres d’indépendance. Chaque guerre est donc unique dans ses causes et son déroulement, les stratagèmes employés et les armes utilisées. La guerre étant un concept nuancé, elle n’est pas théoriquement définie par la violence uniquement. Deux pays peuvent très bien se déclarer la guerre mais ne jamais s’affronter. D’un autre côté, les guerres idéologiques comme la guerre froide représentent une forme de guerre indirecte où il n’y a pas eu de déclaration officielle de guerre entre les États-Unis et l’Union soviétique, mais il y a certainement eu des tensions et des batailles sous le masque d’autres pays. La guerre dans ce devoir sera plutôt prise sous l’angle de combats se déroulant pratiquement, engendrant inévitablement la mort.

Qu’est-ce que la justice ? À quoi attribue-t-on le caractère de justice ? La justice est définie par ce qui est conforme aux lois ; son sens étymologique étant le même. Mais quelles seraient ces lois ? Qui les dicterait ? Qui les définirait ? Toutes ces lois sont-elles justes ? Malgré l’ambiguïté du concept de justice, nous considérons encore que tout ce qui est conforme à la loi serait juste pratiquement. En théorie, on peut donc dire que l’existence de lois qui justifient la guerre la rend légalement juste. La présence d’une armée, d’armes et d’un ministère de la Défense, et en général d’un pouvoir militaire et des lois qui le justifient, rend la guerre théoriquement correcte et non condamnable par le pouvoir judiciaire. Nous pouvons donc dire que si elle est conforme aux lois d’un pays, quel que soit le régime, la guerre peut être considérée juste en théorie. En effet, le principe de souveraineté d’un État repose essentiellement sur le fait que l’État puisse se défendre des contraintes internes et externes, comme le théorisait Bodin : « La puissance d’une république doit être absolue et perpétuelle. » D’ailleurs, la souveraineté vient étymologiquement du latin super qui signifie au-dessus. Un État doit bel et bien avoir le droit de se défendre contre les autres États qui le menacent, et la guerre pour préserver la souveraineté est parfaitement juste. L’État doit avoir le pouvoir absolu, et s’il juge que la guerre est nécessaire pour le maintenir, alors la guerre est parfaitement juste.

Sous un autre angle, il suffit simplement de regarder et d’étudier notre passé : y a-t-il réellement eu des périodes historiques sans guerre ? La guerre, moteur de l’histoire, n’est-elle pas historiquement légitime ? Les croisades et les jihads pour conquérir des terres religieuses, pour répandre la religion, pour prêcher la foi ? Les guerres d’indépendance, d’Algérie, d’Amérique, la guerre de Sécession, n’ont-elles pas toutes été considérées justes pour ceux qui les menaient ? Le fait qu’un peuple, au-delà du dirigeant, considère que la guerre est juste rend ce principe de guerre juste réel. Les guerres justes existent bel et bien, et elles ont une légitimité absolue, religieuse, culturelle et historique.

En outre, considérer la guerre comme indépendante de la politique est une erreur grave. La guerre n’est autre que la continuation de la politique par d’autres moyens – et les guerres civiles le prouvent bien. C’est la politique qui engendre les tensions entre différentes nations, mais elle le fait aussi au sein d’une même nation. Ce sont les différences entre les opinions politiques et les intérêts des différents partis (qu’ils soient dans des pays différents ou le même, la notion d’espace est indépendante) qui mènent à la guerre. La guerre n’est autre qu’un instrument politique comme les autres, et c’est d’ailleurs le plus tranchant.

Carl Schmitt théorise cela en montrant qu’en politique, on définit l’ami et l’ennemi. Les conflits sont inévitables et la paix n’est qu’un entre-deux-guerres. Le principe même de la politique est l’arrivée au pouvoir et sa protection. Le pouvoir, étymologiquement du mot latin potere, signifie être capable de. Du moment où l’on donne le pouvoir à quelqu’un, il est donc capable de tout ce que ce pouvoir peut lui accorder – surtout dans les régimes où le pouvoir ne limite pas le pouvoir, comme le théorisait Montesquieu. Un dirigeant ayant le pouvoir absolu est donc capable de tout et de rien. La notion de pouvoir rend capable toute personne le détenant d’accomplir ce qui lui est permis. L’appel à la guerre est donc juste comme, si le pouvoir est légitimement accordé, l’emploi de ce pouvoir l’est aussi. Or le pouvoir existe par la politique. Abolir le pouvoir reviendrait à abolir la politique, et sans politique, c’est l’anarchie.

Étymologiquement, « ana » = sans, « arché » = principe, pouvoir, l’anarchie serait d’une certaine façon l’abolition des lois et le retour à l’état de nature. Or ce dernier est un état non souhaitable selon Hobbes, comme c’est un état de guerre perpétuelle. La guerre est donc intrinsèquement inévitable. Elle est au fondement de la politique, mais elle est aussi ce qui domine l’état de nature – en effet, « l’homme est un loup pour l’homme ».

Machiavel d’un autre côté prouve et défend que la guerre est juste, et elle permet d’acquérir le pouvoir et de le préserver. Pour les dirigeants ou même les peuples des pays corrompus (dans Le Prince pour les dirigeants, et dans Florence insurgée pour le peuple), « là où les crimes sont nombreux, on ne punit personne », la guerre se justifie donc elle-même, elle n’a pas besoin de justice ou de lois pour le faire, la lutte devient sa propre maîtresse, son propre alibi. Avec Machiavel, l’audace devient sagesse s’il le faut, et la guerre devient symbole de la sagesse si elle est menée dans le but de préserver le pouvoir.

Sommes-nous donc réellement condamnés à la guerre ? Sommes-nous ses esclaves ? Le fait qu’on n’ait jamais connu de vraie paix rend-il cette théorie invalide ? La paix n’a peut-être pas encore connu le jour, mais un jour viendra où elle seule régnera.

La paix est donc une solution qu’il faut envisager sérieusement, et le plus vite possible. Interdire la guerre, bien que cela me paraisse radical, est la solution. La guerre nous fera perdre toute nature humaine si l’on continue à l’autoriser. La guerre n’est justifiable ni par la raison ni dans une morale déontologique, et il faut le comprendre. « Agis de façon à ce que ta maxime puisse être érigée en loi universelle », nous enseigne Kant. Faire de la guerre une loi universelle est absolument injustifiable et devrait être légalement interdit. Kant croit bel et bien en une paix entre les nations, et propose même la création de Ligue des nations afin d’assurer cette paix.

Il faut comprendre que l’idée de Kant est envisageable, et qu’elle se produit en pratique de nos jours. L’ONU œuvre pour la paix mondiale, et en cela elle est en progrès. Les procès de Tokyo et Nuremberg et l’introduction de la notion de « crimes contre l’humanité » en sont une preuve en soi. Les dirigeants nazis ayant tenté de justifier leurs actions par l’argument que ces lois étaient légales et même forcées en ce temps en Allemagne, ont malgré tout été punis. Des lois qui sont injustes ne justifient moralement pas des actions injustes, même si la force est de leur côté. Pascal développe cette idée et montre que la justice est trop faible sans la force, et qu’il arrive souvent que la force se fasse passer pour justice légitime. Cela n’est quand même pas un argument qui permettrait d’exempter tous ceux qui sans contester obéissent à ces lois injustes. Ne devrions-nous pas renoncer aux armes ? Ne devrions-nous pas condamner ces objets répugnants de nos pays ? Armer toutes les nations jusqu’aux dents et utiliser les politiques de dissuasion nucléaire seraient la solution selon vous ? N’avez-vous pas honte ? Honte de perdre votre humanité ? La liberté ou la paix par le chantage n’en sont pas de vraies. La possibilité d’un anéantissement nucléaire vous rassure-t-elle tellement plus que le désarmement de tous ? Il faudrait suivre la politique du Vatican et abolir toutes les armées. Et c’est là que les partisans du mal rétorquent : Mais il faut se protéger ! Mais se protéger de quoi ? Ne sommes-nous pas tous des êtres humains ? Et n’oublions pas que notre environnement nous détermine bel et bien. Que voulez-vous ? Un monde où tous auraient oublié ce qu’est la paix ? Où nous serons tous condamnés à perpétuellement faire la guerre ? Même les nihilistes devraient l’admettre : la torture et la guerre sont des maux pour l’humanité. Jusqu’où sommes-nous capables d’être nihilistes ? Avons-nous oublié ce qu’est la paix ?

Les réalités vécues comme la guerre israélo-arabe ou même la guerre russo-ukrainienne ont fait de nous des victimes sur le plan moral. L’expérience de Stanford où l’on a emprisonné des élèves dans une prison pour voir si leur comportement allait être modifié l’a bien montré. L’environnement nous détermine qu’on le veuille ou non, et la guerre fait de nous des sauvages sanguinaires. La banalité du mal, comme l’a montré Arendt, a rendu cela encore pire : nous normalisons le mal parce que nous ne réalisons pas quelles sont les conséquences réelles de nos actions. La guerre n’a qu’une seule conséquence : la mort d’innocents. Il faut voir les choses en face : il faut se révolter pacifiquement contre la guerre parce que rien ne légitime moralement la violence. Les conséquentialistes peuvent prolonger leurs discours sur le but de chaque guerre, mais toutes ont la même finalité : l’anéantissement. La guerre est un mal en soi et rien ne la justifie, surtout par des lois dictées injustement.

Albert Camus dans cet esprit dans L’homme révolté parle d’une révolte non violente qui permettrait au peuple de s’affirmer et de se soulever contre des politiques de guerre injustes : « Je me révolte donc nous sommes. » Nombreux sont ceux qui pensent que pour arrêter la guerre, il faut la guerre. Cette pensée est très mal fondée comme les moyens de désobéissance civile sont nombreux. Avant même la notion de désobéissance civile, La Boétie nous invite dans son discours sur la servitude volontaire de « décidez-vous à ne plus servir et vous serez libre ». Nous ne sommes jamais contraints à la guerre ou à la violence. Le fait de penser qu’elle est incontournable ou inévitable ne la rend pas juste. Il faut se révolter pacifiquement en s’abstenant de servir. En effet, comme le dit Martin Luther King, « ceux qui aiment la paix doivent apprendre à s’organiser comme ceux qui aiment la guerre ». La paix s’organise pacifiquement tout comme la guerre s’organise violemment. Nous pouvons prendre l’exemple le plus célèbre, celui de Gandhi, qui a très bien réussi la guerre d’indépendance de l’Inde – qui n’en était pas une car il a réalisé un mouvement pacifique. Les principes d’une lutte pour la paix juste devraient être : la non-violence, la non-évasion (celui qui participe à un mouvement pacifiste qui s’oppose à la loi doit assumer sa volonté d’aller contre des lois justes légalement mais fausses moralement, et doit assumer son emprisonnement), le principe de civilité (cela doit être fait avec respect) et le principe de publicité (il faut avertir avant de réaliser ce mouvement).

Enfin, la philosophie de l’innéisme défendue par Leibniz se base sur le fait que « l’homme est un animal politique » pour montrer que le dialogue peut bel et bien résoudre les conflits. Du grec, irene signifie la paix. Bien que Hobbs pense que l’état de nature est une guerre perpétuelle, il admet que c’est par le langage que les êtres humains ont permis la création de l’État. Dans le Léviathan livre IV, il dit que l’homme sans langage serait tels les ours et les lions. Alors pourquoi ne pas utiliser le langage pour permettre la paix ? Avons-nous réellement besoin d’un Léviathan qui aurait le pouvoir de décider la guerre ? Le langage à lui seul rend la guerre ridicule. Elle nous ramène à notre nature la plus primitive, celle de l’animal. Or ce qui a donné à l’Homo sapiens sa force et lui a permis de persévérer dans l’existence, ce ne sont pas uniquement ses armes, car ces dernières à elles seules provoquent inévitablement la mort. Le langage selon Harari est ce qui a permis à l’Homo sapiens de faire confiance à ses semblables en s’alliant et en se faisant confiance d’après des concepts abstraits créés par le langage. Unissons-nous alors sur ce concept de paix ! Vous dites que la paix n’a jamais vu le jour ? Alors rendons-la réelle, nous avons la capacité de nous unir autour de ce concept ultime qu’est la paix et de la rendre réelle !

D’un autre côté, la guerre est illégitime, selon Marx, car ce sont les prolétaires qui combattent pour les propriétaires. Ces derniers qui eux ont des conflits avec d’autres propriétaires manipulent le peuple pour qu’il se batte pour eux. La guerre n’est pas juste car le seul principe qu’elle défend pratiquement est celui de la propriété qui est, bien que défendue par beaucoup, un des principes les plus moralement condamnables. La guerre n’est pas juste car ce sont les exploités qui combattent les exploitants pour les exploitants, et non pas les exploités qui combattent les exploitants pour eux-mêmes.

Mais s’il y avait d’autres formes de guerre ? Et la paix est-elle réellement l’opposé ou la solution contre la guerre ? Et si c’était l’art qui nous sauverait ?

La vraie guerre à mener est celle contre le pouvoir. Les anarchistes comme Bakounine l’ont compris. Ce sont les symboles et l’idée du pouvoir qu’il faut essentiellement combattre. Dans Dieu et l’État, il déclare : « Et si Dieu existait réellement, il faudrait s’en débarrasser. » Il faut combattre les idées qui nous poussent à obéir au pouvoir mis en place. La paix ne doit pas s’allier au pouvoir, elle doit l’abolir, le détruire. En détruisant le pouvoir, elle détruit avec lui les possibilités de guerre et de massacres sans pitié.

Une autre guerre à mener est la guerre contre la technologie. Cette dernière en est devenue un des éléments les plus abominables. En effet, avec son avènement, ce sont les moyens qui justifient la fin. L’Amérique avait les moyens de bombarder le Japon, donc elle l’a fait ; les moyens ont justifié le bombardement. Il faut y penser profondément : si « la fin justifie les moyens » est une formule immorale, au-delà de cela, « les moyens justifieront la fin » est une formule strictement inhumaine. Günther Anders dans L’Obsolescence de l’homme, dans la dernière partie consacrée à la bombe atomique, montre qu’avec ce progrès destructeur, la question philosophique n’est plus de savoir comment il faudrait vivre, mais si l’humanité survivra. Heidegger développe aussi l’idée qu’avec l’arraisonnement de la nature, l’être humain devient lui-même un objet technologique. Si le progrès technologique nous déshumanise et nous rend plus aptes à vouloir la guerre, il faut l’abolir. D’ailleurs, ce dernier est aussi stimulé par la guerre ; on peut donc dire que la guerre s’auto-stimule indirectement en même temps que le progrès technologique, et cela cause un grand problème : la découverte de nouvelles machines qui, elles, mettraient fin à l’humanité. Comme le dit Thoreau dans La Désobéissance civile, nous sommes hommes avant d’être citoyens, et il faut agir fermement contre cette déshumanisation que nous subissons par la technologie.

Dans une autre perspective, selon Gramsci, le pouvoir qu’il faudrait combattre est la culture. Dans sa théorie de l’hégémonie culturelle, c’est cette dernière qui contrôle le peuple discrètement. Il faut donc, pour lui, cimenter la faille qui sépare le monde intellectuel et le monde pratique. Avec la culture, on pourrait faire soulever un peuple contre le pouvoir ou on pourrait l’encourager à faire la guerre. L’Allemagne nazie fut victime de cela, et la théorie de Gramsci dans ses Cahiers de prison peut être concrétisée par ses exemples. Selon lui, toute grande révolution est précédée par une « pénétration des idées ». Il faut donc des intellectuels organiques qui ont le savoir, donc qui peuvent, selon lui, « comprendre et sentir » avec le peuple. Les intellectuels doivent aider le peuple à connaître ce qui se passe pratiquement et non pas par les médias contrôlés politiquement. La guerre doit alors être culturelle et certainement pas physique. Marxiste, Gramsci suit philosophiquement les pas de ce dernier dans cette vision intéressante de l’intellectuel qui passe à l’action. Comme l’a dit Marx dans sa lettre à Feuerbach : « Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de différentes manières, maintenant il est temps de le transformer. » On peut se demander pourquoi certains philosophes et savants se sont mis à justifier la guerre. Pourquoi Orwell, Alain et même Einstein perdent espoir dans le pacifisme et finissent même par considérer la guerre comme juste. N’est-ce pas absurde ? Pourquoi défendraient-ils des abominations pareilles ? Eh bien Schopenhauer a la réponse à cela. Bien que considérée pessimisme, sa pensée dépasse de loin ces stéréotypes ; il dit : Si la philosophie a longtemps été perdue, c’est parce qu’« on l’a cherchée sur le chemin de la pensée alors qu’elle était sur celui de l’art ». Quand est-ce que la poésie ou l’art ont cessé de défendre la cause humaine ? La philosophie ne devrait-elle pas faire de même ? De Victor Hugo jusqu’à Prévert en passant par Rimbaud et Louis Ferdinand Céline... Ne nous ont-ils pas appris à aimer l’homme et à détester la guerre ? Que ce soit dans le Dormeur du Val, dans Paroles ou dans Voyage au bout de la nuit, la guerre n’est-elle pas méprisée ? « Je refuse la guerre et tout ce qu’il y a dedans », déclare Bardamu dans Voyage au bout de la nuit de Céline. Il faut comme lui refuser la guerre, tout ce qu’il y a dedans, tous les hommes, toutes les femmes, il faut la refuser catégoriquement. L’art nous sauve en se plaçant toujours du côté de l’homme, et le philosophe devait être ainsi.

Ainsi avons-nous montré qu’en théorie une guerre peut être dite juste, mais certainement pas en pratique, où elle est inévitablement moralement condamnable. La paix est une guerre pacifique à mener contre de nombreuses institutions : le pouvoir, la technologie, mais aussi, elle est la conquête de la vérité culturelle. Les intellectuelles sont ceux qui doivent mener le combat pacifiste en pratique et en théorie, mais c’est aussi le peuple qui doit désobéir, civilement. L’art est le moyen ultime de revenir à nos valeurs intimement humaines et de finalement conquérir la pensée qui pourrait être utilisée pour justifier la guerre. Comme le dit Hume, la raison pourrait très bien justifier la préférence de ne pas égratigner notre petit doigt à la destruction du monde. C’est aux passions humaines qu’il faut se confier, parce que ce sont elles qui réfutent dans leur essence la guerre. D’un point de vue stoïcien ou même bouddhiste, « la paix vient de l’intérieur, ne la cherchez pas à l’extérieur » – Bouddha. Le vrai combat à mener est donc celui de notre âme, et comme le dit Épithète : « Il y a des choses qui dépendent de nous, et il y a des choses qui ne dépendent pas de nous. » La guerre ou la paix selon eux devraient nous être des réalités indifférentes, car la vraie paix à rechercher et qui nous soit accessible est celle de notre propre âme, soit l’ataraxie. Mais c’est justement dans cette philosophie de la soumission que nous perdons tout pouvoir et espoir. C’est en croyant en le pouvoir du changement et de notre force que nous changerons le monde. Et si nous ne nous intéressons pas à la politique, c’est elle qui s’intéressera à nous. Nous deviendrons esclaves des guerres. Si nous croyons au changement, il arrivera certainement : nous devons lutter pour notre avenir tout en étant sûrs que nous réussirons à le conquérir.

Céline SABRA

Prix d’honneur de littérature de l’Amicale des anciens de Jamhour 2025

« La guerre est le massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas » – Paul Valéry. Les deux guerres mondiales ne nous ont-elles rien appris ? Qu’attendons-nous ? Une troisième ? La fin du monde ? Pourquoi sommes-nous encore humainement capables de prononcer ce mot ? Ne devrait-il pas nous repousser absolument ? À croire que, peut-être, la guerre est inévitable. Comme l’a dit Aldous Huxley dans Le Retour au meilleur des mondes : « L’homme n’apprend rien de l’histoire », et c’est cela la leçon de l’histoire. Sommes-nous donc condamnés à subir cette atrocité perpétuellement ? L’humanité n’a-t-elle pas assez évolué pour comprendre ses erreurs ? Il est certainement temps d’y mettre fin. Nombreux sont ceux qui luttent pour le pacifisme, mais...
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Jusqu'à présent, seules les démocraties ne se font pas la guerre. Cela veut dire que les autocraties sont éminemment dangereuses alors que les démocraties le sont parfois, voire souvent, mais pas systématiquement. Dans les démocraties , la présence du mal est une dérive presque inévitable en l'absence de perfection. A contrario, la perfection existe dans le mal - le mal absolu - et il s'épanouit dans les autocraties où le peuple est opprimé et le pouvoir cherche à se maintenir par tous les moyens y compris par la guerre. je ne pense donc pas qu'on puisse renvoyer tout le monde dos à dos.

M.E

19 h 29, le 02 juillet 2025

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  • Jusqu'à présent, seules les démocraties ne se font pas la guerre. Cela veut dire que les autocraties sont éminemment dangereuses alors que les démocraties le sont parfois, voire souvent, mais pas systématiquement. Dans les démocraties , la présence du mal est une dérive presque inévitable en l'absence de perfection. A contrario, la perfection existe dans le mal - le mal absolu - et il s'épanouit dans les autocraties où le peuple est opprimé et le pouvoir cherche à se maintenir par tous les moyens y compris par la guerre. je ne pense donc pas qu'on puisse renvoyer tout le monde dos à dos.

    M.E

    19 h 29, le 02 juillet 2025

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