
Un bâtiment à Téhéran touché lors d’une frappe israélienne dans la capitale iranienne. Photo AFP / SEPAH NEWS
On savait le scénario possible depuis des années, on l’estimait très probable depuis quelques mois et l’on ne parlait que de cela depuis quelques jours. Et pourtant : l’attaque israélienne contre l’Iran dans la nuit de jeudi à vendredi a provoqué stupeur et tremblements dans tout le Moyen-Orient. La région est non seulement dans un état de choc, mais surtout plongée dans une terrible inconnue tant les conséquences de cette escalade peuvent être nombreuses et sont dans le même temps très difficiles à anticiper.
Le Moyen-Orient n’est plus le même depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023. Mais c’est comme si tous les événements que l’on avait vécus depuis, de la destruction totale de la bande de Gaza en passant par la décapitation du Hezbollah, la chute du régime Assad ou encore l’effondrement de « l’Axe de la Résistance », devaient mener à ce moment. Le régime iranien est la dernière pièce du puzzle. Celle qui déterminera le visage du nouveau Moyen-Orient ou plutôt ce qu’il en restera à la suite de ce conflit. On fait le point.
Les faits
Israël a mené une série d’attaques sans précédent contre l’Iran dans la nuit de jeudi à vendredi. L’État hébreu a frappé l’usine d’enrichissement d’uranium de Natanz, la plus importante du pays, mais aussi, selon le NYT, au moins six bases militaires autour de Téhéran, dont Parchin, ainsi que des résidences dans deux complexes ultra-sécurisés abritant des commandants militaires, en plus de plusieurs immeubles d’habitation à Téhéran, dans ce qui semble être des assassinats ciblés.
Les frappes israéliennes ont tué des membres de l’état-major général iranien, y compris le chef des Gardiens de la Révolution, Hossein Salami, ainsi que plusieurs hauts scientifiques nucléaires, a déclaré un responsable de la défense israélienne.
« Cette opération se poursuivra autant de jours qu’il sera nécessaire pour éliminer cette menace » a déclaré le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. Le secrétaire d’État américain, Marco Rubio, a indiqué pour sa part que les États-Unis n’étaient pas impliqués dans ces frappes. Le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a déclaré dans un communiqué qu’Israël « doit s’attendre à une punition sévère ». Plusieurs pays ont annoncé la fermeture de leur espace aérien tandis que les cours du pétrole flambent.
Le contexte
Cela fait des années qu’Israël menace de mener une attaque « préventive » contre les installations nucléaires iraniennes. L’affaiblissement du Hezbollah, l’effondrement de l’ « Axe de la Résistance », et la destruction – même s’il aurait été en partie reconstruit depuis – du système de défense anti-aérienne de l’Iran lors des précédentes frappes israéliennes en octobre 2024 lui ont ouvert une fenêtre d’opportunité pour agir. La volonté de Donald Trump, principal allié d’Israël, de privilégier l’option diplomatique a sans doute retardé les plans israéliens, alors que Benjamin Netanyahu a répété à de multiples reprises qu’il ne croyait pas à cette option. Mais le fait que les négociations n’aient mené à rien – bien qu’un nouveau round devait se dérouler dimanche à Oman – a probablement incité Israël à agir. Les négociations bloquaient en particulier sur le droit ou non de la République islamique d’enrichir de l’uranium sur son sol. Fin mai, deux rapports de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) soulignaient par ailleurs l’accélération de l’enrichissement iranien et le manque de coopération de Téhéran.
Le département d’État et le Pentagone ont confirmé mercredi préparer le départ du personnel non essentiel de l’ambassade américaine à Bagdad et avoir autorisé le départ volontaire des proches de soldats du Moyen-Orient. Cette mesure a été perçue comme une anticipation d’une forte escalade et d’une potentielle réponse iranienne contre des bases américaines. Les pétro-monarchies du Golfe, Arabie saoudite en tête, militent depuis des mois pour éviter ce scénario, craignant d’en être elles aussi les victimes.
Les possibles conséquences
La séquence est loin d’être terminée et déjà les questions affluent. Quand et comment va répondre l’Iran ? En a-t-il encore les capacités ? À quel point l’opération a-t-elle été coordonnée avec les États-Unis et quelle sera la réaction de Donald Trump ? Qui des alliés de l’Iran, des houthis au Hezbollah en passant par les milices irakiennes, participera à la riposte ?
L’attaque israélienne intervient à un moment où la République islamique apparaît plus affaiblie que jamais depuis sa création en 1979 ou au moins depuis le début des années 1990. L’Iran est isolé diplomatiquement, fragilisé en interne, la succession de l’ayatollah Khamenei est loin d’être assurée et le pays subit de plein fouet le poids des sanctions économiques. Son réseau d’alliances, qui constituait son principal bouclier contre une attaque israélienne, est très affaibli, en particulier le Hezbollah, et son arsenal de missiles balistiques, sa principale arme, semble avoir été touché lors de l’attaque israélienne.
L’ampleur de l’attaque et la précision des cibles visées supposent que l’opération était préparée de longue date. Elle peut être comparée en ce sens à la guerre menée par Israël contre le Hezbollah qui avait mis à nu la fragilité du parti chiite, son infiltration par les renseignements israéliens et la supériorité technologique de l’État hébreu. Le Hezbollah avait été pris de court et la décimation de son haut-commandement ainsi que la destruction de ses systèmes de communication l’avaient quasiment paralysé lors des premiers jours du conflit. Si la riposte iranienne apparaît inévitable, elle pourrait être retardée par le fait qu’une partie de l’état-major semble avoir été éliminée.
Les États-Unis ont affirmé qu’ils n’avaient pas participé à l’opération. Un responsable israélien a pour sa part déclaré à la chaîne publique KAN qu’Israël avait coordonné ses opérations avec Washington. Il a également précisé que les États-Unis avaient été informés avant l’attaque contre l’Iran. Ce dernier a affirmé qu’Israël a bénéficié du soutien des États-Unis.
C’est l’une des principales questions que pose cette escalade. Israël a-t-il reçu un feu vert américain alors que Donald Trump a laissé entendre que l’attaque pouvait être imminente tout en soulignant qu’il continuait de privilégier l’option diplomatique ? Le président américain, qui n’a aucune intention d’embarquer son pays dans une guerre de grande ampleur au Moyen-Orient, s’est-il fait entraîner par Benjamin Netanyahu ou a-t-il estimé, compte tenu de l’inflexibilité iranienne dans les négociations, que c’était la seule solution pour sinon détruire, au moins freiner le programme nucléaire iranien ?
Donald Trump devrait parler dans quelques heures et la tonalité de son discours devrait nous donner plus d’indications à ce sujet. Il est toutefois clair que les États-Unis refusent d’être associés publiquement à cette attaque. Alors qu’ils n’ont pas déployé de renforts en amont dans la région, participeront-ils massivement, comme lors des deux attaques iraniennes précédentes, à la défense israélienne ?
En avril et en octobre 2024, l’Iran avait attaqué directement et pour la première fois de son histoire son ennemi historique en envoyant des centaines de missiles balistiques sur Israël. Plusieurs pays avaient participé, directement ou non, à la destruction de ces missiles, ce qui pourrait ne pas être le cas cette fois-ci. Les Israéliens semblent attendre pourtant une attaque plus importante alors que les précédentes avaient eu des effets assez limités.
Même en étant affaibli, l’Iran peut faire mal à Israël et viser les intérêts américains au Moyen-Orient, d’autant plus si ses alliés sont impliqués dans la riposte. Mais l’on a du mal à voir quel peut être le plan de sortie de crise du régime iranien, face à un adversaire plus puissant que lui, alors qu’il joue rien de moins que sa survie.
L’opération israélienne ne vise pas directement à changer le régime mais elle pourrait participer à terme à son extrême fragilisation, d’autant plus si une guerre ouverte et durable est déclarée. Si tel est le cas, quel sera le plan israélien ? L’État hébreu peut-il supporter une guerre contre l’Iran et ses alliés sans le soutien total des États-Unis ? La voie de la désescalade paraît extrêmement difficile à percevoir pour le moment. Dans ce contexte, le Liban peut-il être épargné par la tempête ?
BonjourDepuis octobre 2023 l'Iran a entraîné le suicide politique et militaire du Hamas et du Hozballah par son incompétence et sa mauvaise lecture régionale et internationale.pour moi le régime iranien est le premier responsable des catastrophes subies et de la paranoïa actuelle israélienne et américaine.Que peut on espérer encore qd ce régime continue a menacer alors qu'il est réduit au plus de bas et détesté a l'intérieur et a l'extérieur et qu'il continue a essayer d'engager les pauvres qui croient en Lui ?
15 h 32, le 13 juin 2025