
Vue de la Syrie depuis une maison de Qanafez dans le Hermel, le 13 février 2025. Photo d'illustration Matthieu Karam/L’Orient-Le Jour
Après une nuit de tensions dimanche au Hermel, à la frontière entre le Liban et la Syrie, l’armée libanaise a affirmé lundi soir avoir riposté aux sources de tirs en provenance de Syrie, après que le président libanais Joseph Aoun ait donné des ordres dans ce sens. « Les contacts se poursuivent entre le commandement de l'armée libanaise et les autorités syriennes afin de rétablir le calme et de maîtriser la situation dans la zone frontalière », a également indiqué l'armée. « Ce qui se passe aux frontières orientales et nord-est ne peut plus durer, et nous ne (le) tolérerons pas », avait déclaré plus tôt, M. Aoun.
Que sait-on sur cette nouvelle escalade à la frontière libano-syrienne ? Quelles sont les zones d'ombre sur les faits de ces dernières 48 heures ? L'Orient-Le Jour fait le point sur fond de confusions dues partiellement à la terminologie utilisée par les différentes parties, Damas accusant le Hezbollah d'être derrière les tirs et frappes en direction du territoire syrien, tandis que l'armée libanaise, le parti chiite lui-même et des sources locales ont jusqu'à présent démenti toute implication du mouvement dirigé par Naïm Kassem.
Les faits ce lundi à la frontière libano-syrienne
- Le ministère libanais de la Santé a annoncé lundi soir, qu'au cours des deux derniers jours, les affrontements à la frontière libano-syrienne ont fait sept morts et 52 blessés. « Aujourd'hui, six personnes ont été tuées et 42 autres blessées. Hier, une personne de 15 ans a été tuée et dix autres ont été blessées, dont une fillette de 4 ans », a indiqué le ministère.
- Lundi matin, deux obus lancés depuis la région de Qousseir en Syrie sont tombés dans les environs d'al-Qasr (Baalbeck-Hermel), selon notre correspondante, alors que des drones de reconnaissance syriens de type « Chahine » survolaient la frontière.
- Peu avant midi, un tir de roquette, cette fois en provenance du Liban, a blessé un journaliste et un photographe près du barrage de Zaïta (rif de Homs), selon l’agence de presse officielle syrienne Sana. La roquette s'est abattue près d'équipes des chaînes saoudiennes al-Arabiya et al-Hadath qui accompagnaient l'armée syrienne à la frontière. Selon al-Arabiya, cette attaque aurait tué au moins deux soldats syriens. Les médias arabes, citant Sana, ont imputé ce tir au Hezbollah.
- Commentant ces tirs, le ministère syrien de l'Information a dénoncé un « ciblage » de journalistes et appelé l'État libanais à demander des comptes aux auteurs de l'attaque, évoquant également une implication du Hezbollah.
- L'armée syrienne s'est par ailleurs déployée le long de la frontière avec le Liban après avoir envoyé des renforts militaires, rapporte al-Arabiya.
- Al-Jazeera rapportait pour sa part lundi que huit membres du ministère syrien de la Défense et deux civils ont été tués dans un bombardement du Hezbollah sur le rif de Homs, sans que l'on sache avec précision s'il s'agissait de la même frappe ayant blessé des journalistes. L'agence de presse syrienne n'a pas communiqué sur ce tir. Contactée par L'Orient-Le Jour, l'armée libanaise n'était pas en mesure de fournir des informations sur cette frappe.
- Lundi soir, selon notre correspondante dans la Békaa, les affrontements à la frontière ont fait plusieurs blessés parmi les habitants des localités libanaises de Machrafé et Hoch el-Sayyed Ali. En outre, l'artillerie de l'armée syrienne a ciblé la localité de Machrafé, bombardant toutes les maisons présentes dans le village. Parallèlement, l’intensité des affrontements s'est accrue aux abords de la localité frontalière d’al-Qasr.
- Les forces syriennes ont arrêté à l'aube deux personnes de nationalité syrienne qui se trouvaient à leur domicile à Fadiliyé, en territoire libanais, près de la frontière avec la Syrie, ont indiqué deux sources locales à notre correspondante. Leurs dépouilles ont ensuite été retrouvées dans la localité frontalière libanaise de Sad Matraba, sans plus de détails. On ignore pour le moment si l’arrestation et la mort de ces individus sont en relation avec les incidents qui ont secoué la zone frontalière dimanche.
Comment ont commencé ces tensions dimanche
- Dimanche, des violences ont éclaté entre des habitants libanais majoritairement chiites et réputés proches du Hezbollah et des membres des forces armées syriennes, lorsque quatre hommes armés, affiliés aux nouvelles forces syriennes selon des sources sécuritaires, auraient tenté de s'infiltrer en territoire libanais au niveau de la localité frontalière d'al-Qasr. Ils ont finalement été repoussés par un groupe de combattants de clans libanais dans des accrochages qui ont fait deux morts et deux blessés côté libanais. Ces derniers ont été transportés dans les hôpitaux de la région par la Croix-Rouge libanaise (CRL).
- Dimanche également, la Croix-Rouge libanaise a retrouvé trois corps près du remblai de terre frontalier au niveau du village de Qasr et dans la soirée, les corps ont été remis aux autorités syriennes via le passage de Joussi, en présence de l'armée libanaise. Le ministère syrien de la Santé avait affirmé que ce sont des combattants du Hezbollah qui ont « piégé et enlevé trois soldats syriens à la frontière, à l'ouest de Homs », au niveau du Hermel avant de les « exécuter ». Le ministre libanais de l'Information, Paul Morcos, a confirmé que « trois Syriens avaient été remis aux autorités syriennes » »Les instructions nécessaires ont été données pour renforcer le contrôle des frontières », a-t-il ajouté.
- Malgré la restitution aux autorités syriennes des dépouilles, Damas avait haussé le ton en soirée, accusant le Hezbollah d'avoir « piégé et liquidé » ces militaires syriens et dénonçant une « escalade dangereuse » de la part du parti chiite. Ce dernier s'est rapidement dédouané, dans un communiqué, de toute implication.
- Une source militaire contactée par L'Orient-Le Jour estime fort probable que les militaires ont été liquidés par « d'autres miliciens syriens », et non pas par les clans libanais, avant d'être abandonnés à la frontière avec le Liban. « La situation est chaotique. Nous sommes en train de coordonner avec les forces syriennes, mais ces dernières n'arrivent pas encore à tout contrôler sur le terrain », explique ce responsable qui a requis l'anonymat.
- Ces tensions ont provoqué des échanges et tirs et bombardements au mortier en provenance de Syrie. Ils ont visé notamment l'est de la rivière Assi et les environs de la localité de Mecherfé, ainsi qu'al-Qasr, Kaouakh, Sahlet el-May et Hoch el-Sayyed Ali. L'escalade a provoqué un mouvement de panique parmi les habitants des zones frontalières, qui se sont réfugiés dans la région du Hermel, selon notre correspondante.
Le Hezbollah est-il impliqué ?
- Jusqu'à présent, seules les autorités syriennes ont accusé le parti chiite de lancer des tirs en direction de la Syrie.
- Une source au sein de l'armée libanaise a démenti l'implication du Hezbollah dans l'escalade à la frontière, affirmant que ce sont jusque là uniquement des membres des clans libanais qui sont impliqués.
- Le député du Hezbollah Hussein Hajj Hassan a nié « toute responsabilité » de son parti, dans une déclaration à l'agence de presse russe Sputnik.
Quelles réactions au Liban ?
- Réagissant à l'escalade à la frontière libano-syrienne, le député du Hezbollah Ihab Hamadé a appelé dimanche le président Joseph Aoun et l'armée libanaise à protéger les Libanais dans les zones frontalières.
- Naji Hayek, le vice-président du Courant patriotique libre (CPL, aouniste) qui a longtemps été un allié du Hezbollah, a pour sa part salué « l'armée libanaise qui défend le Hermel ». « Si vous essayez à nouveau d'entrer au Liban, nous vous combattrons à nouveau, quel que soit le nom de votre régime », a-t-il écrit sur X.
- Le secrétaire général du parti Baas au Liban, Ali Hijazi, a réclamé une « position officielle claire de l'Etat libanais », notamment du président Joseph Aoun et du chef de la diplomatie Joe Raggi. Il a principalement commenté l'information relative au meurtre présumé de deux frères à Fadiliyé, imputée dans la région aux forces de sécurité syriennes. Affirmant à son tour que le Hezbollah n'est pas impliqué, il a estimé qu'il n'y a pas « d'armée syrienne » dans le sens propre du terme, mais plutôt des « formations armées indisciplinées ».
- Le vice-président du Conseil supérieur chiite (CSC), Ali el-Khatib, a de son côté appelé, lors d'un entretien téléphonique avec Joseph Aoun, à un renforcement de l'armée libanaise dans la région des affrontements pour « empêcher que la situation ne dégénère ».
Bon nous avons une version plus ou moins officielle mais la cause officieuse est plutôt a regarder du coté des trafiques de drogues et autres combines de la sorte. En 2006 la guerre a commencé en raison de ce genre d'embrouille d'ou le "Si je savais" de Hassouna. Le Hezbollah n'est peut être pas directement derrière cette histoire, mais indirectement surement sinon d'ou un clan peut il posséder des missiles et de l'artillerie de ce calibre? L’armée devrait en profiter pour désarmer ces clans et s'imposer tout autant a la Syrie si n'importe laquelle de ses milices transgresse nos frontière.
11 h 39, le 18 mars 2025