
Le président libanais Joseph Aoun (dr.) lors d'une réunion avec le président du Parlement iranien Mohammad Ghalibaf,à Baabda, le 23 février 2025. Photo X/ @LebanesePresidency
« Le Liban est épuisé par les guerres des autres sur son territoire », a déclaré dimanche le président libanais Joseph Aoun à une délégation de responsables iraniens présente à Beyrouth pour les funérailles de l'ex-chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Le président du Parlement iranien Mohammad-Bagher Ghalibaf, le chef de la diplomatie Abbas Araghchi, et l'ambassadeur d'Iran à Beyrouth Mojtaba Amani, faisaient partie de la délégation.
Le président du Parlement iranien a exprimé durant la réunion « le soutien de l’Iran à l’unité territoriale du Liban, à son intégrité et à sa souveraineté » soulignant que son pays souhaite « voir un Liban stable, sûr et prospère », rapporte l'agence nationale d'information (ANI, officielle).
À l'affirmation de M. Ghalibaf selon laquelle l'Iran soutient « les décisions souveraines du Liban, sans aucune ingérence externe », le président Aoun a répondu partager ce point de vue sur « la non ingérence d'un pays dans les affaires d'un autre », estimant que « la meilleure réponse à toute perte et toute agression reste l’unité des Libanais ». Et de lancer : « Le Liban est épuisé par les guerres des autres sur son territoire. Aucun pays ne devrait s’ingérer dans les affaires internes d’un autre ». Pour appuyer ses propos, le président Aoun a cité, devant la délégation, l'article 9 de la Constitution iranienne stipulant que « la liberté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale d’un pays sont indivisibles ».
« Lourd tribut » pour la cause palestinienne
Le président Aoun a également salué les conclusions du sommet arabe à Riyad vendredi, auquel l’Iran avait pris part, en particulier « la solution à deux États pour la question palestinienne », ainsi que « la reconnaissance de l’Autorité palestinienne comme représentant légitime du peuple palestinien », rapporte l'ANI. Il a ajouté que « le Liban a payé un lourd tribut en défendant la cause palestinienne », et réaffirmé « le souci du Liban d’établir les meilleures relations avec l’Iran, dans l’intérêt des deux pays et de leurs peuples ».
Le président du Parlement iranien a, dans ce contexte, exprimé la « disponibilité (de son pays) à collaborer avec les pays arabes et musulmans pour participer à la reconstruction des infrastructures détruites par l’agression israélienne contre le Liban ».
M. Ghalibaf et la délégation qu'il préside ont été reçus à 19h au Grand Sérail par le Premier ministre Nawaf Salam, puis par Nabih Berry à Aïn el-Tiné. À l'issue de son entretien avec ce-dernier, M. Ghalibaf a affirmé que l'Iran « soutient toute décision venant du gouvernement libanais, du peuple et de la résistance au Liban ».
Et d’ajouter : « J’espère que cette visite contribuera à renforcer les relations de coopération entre la République islamique et le Liban, surtout avec le début du mandat du nouveau gouvernement. Pour que le Liban redevienne prospère et stable, il est nécessaire qu’il y ait harmonie entre les différentes factions du peuple libanais, notamment le gouvernement, le peuple et la résistance. » M. Ghalibaf a assuré que Hassan Nasrallah « était une personnalité nationale au Liban mais aussi au niveau des nations islamiques », soulignant qu’outre la participation de centaines de milliers de personnes à ses funérailles, « les cœurs de centaines de milliers d’autres battaient pour lui ».
La visite de la délégation iranienne intervient alors que le gouvernement Salam a annoncé lundi dernier la suspension sine die des vols entre Beyrouth et Téhéran. Une décision qui fait suite au refus des autorités libanaises d’autoriser l’atterrissage de deux avions de la compagnie iranienne Mahan Air, après plusieurs avertissements américains laissant entendre qu’Israël pourrait bombarder l'Aéroport international de Beyrouth (AIB) si ces vols étaient maintenus. Ces interdictions ont provoqué la colère de partisans du Hezbollah, qui ont bloqué la route menant à l’aéroport, situé aux abords de la banlieue-sud de la capitale libanaise, un bastion du parti chiite.
Mi-octobre 2024, des déclarations de Mohammad-Bagher Ghalibaf au Figaro, pendant les négociations pour le cessez-le-feu entre le Hezbollah et Israël, avaient été une source de tensions entre Beyrouth et Téhéran, alors que le parti chiite, allié du régime iranien, est en perte de vitesse sur la scène locale. Le président du Parlement iranien avait alors laissé entendre que Téhéran serait prêt à négocier avec Paris une application de la résolution 1701 du Conseil de sécurité sur le Liban-Sud. Une phrase largement critiquée par les responsables libanais, qui avaient dénoncé une ingérence flagrante, voire une « tentative de mise sous tutelle », comme l'avait reproché le Premier ministre sortant d'alors, Nagib Mikati. Des responsables iraniens avaient ensuite tenté de nuancer les propos de M. Ghalibaf. Le cessez-le-feu avait fini par être conclu et mis en application dans la nuit du 26 au 27 novembre, sous le parrainage de la France et des États-Unis.
Bien parlé président !
13 h 29, le 24 février 2025