
Le président français Emmanuel Macron s'exprime lors d'une conférence de presse au palais présidentiel de Baabda, le 17 janvier 2025. Photo Mohammad Yassine/OLJ
Le président français, Emmanuel Macron, a appelé vendredi depuis Beyrouth à « accélérer » la mise en œuvre du cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, entré en vigueur fin novembre et arrivant à expiration le 26 janvier prochain. « Des résultats ont été obtenus (...) mais ils doivent s'accélérer, se confirmer dans la durée. Il faut un retrait total des forces israéliennes, un monopole total de l'armée libanaise sur les armes », a déclaré le chef de l'État lors d'une conférence de presse conjointe avec son homologue libanais Joseph Aoun, au palais présidentiel de Baabda.
M. Macron a aussi félicité son homologue libanais pour avoir mis fin au vide politique au Liban : « Vous avez mis fin au vide politique au Liban et vous mettez le pays sur la voie du redressement. Nous mobiliserons la communauté internationale pour aider le Liban dans tous les domaines », a-t-il souligné, renouvelant l’engagement de la France auprès des Libanais et son soutien de leur « objectif d’un Liban souverain ». Emmanuel Macron a dans ce cadre annoncé la tenue d'une nouvelle conférence internationale à Paris « pour la reconstruction » du Liban.
« L'authentique Liban est revenu »
Le Liban « doit se tenir à l'écart des ingérences extérieures, c'est une condition pour pouvoir perpétuer l'application du cessez-le-feu », a ajouté M. Macron. « Nous continuerons à soutenir l'armée pour son déploiement au Liban-Sud et travaillerons avec le Liban pour le tracé des frontières le long de la Ligne bleue », a-t-il aussi affirmé.
« Je pourrais parler longuement des besoins de mon pays en matière de politique, d’économie, de sécurité, etc., mais aujourd’hui, je voudrais, au nom de mon peuple et en mon nom personnel, formuler un seul vœu, Monsieur le président : témoigner au monde entier que la confiance des Libanais dans leur pays et leur État a été restaurée, et que la confiance du monde dans le Liban doit également l’être. Quant au reste, nous pourrons, avec votre aide et celle de nos amis à travers le monde, nous en charger », a déclaré de son côté le président Joseph Aoun, dans une intervention brève mais riche en références littéraires.
Après la rencontre entre les deux chefs d'État, une réunion élargie se tenait entre eux mais aussi le président du Parlement Nabih Berry et le Premier ministre sortant Nagib Mikati. M. Macron s'est également entretenu avec M. Berry au palais présidentiel de Baabda.
Phase nouvelle
Plus tôt dans la matinée, le président français Emmanuel Macron avait affirmé que « les choses avancent, la dynamique est positive » sur l'application du cessez-le-feu. Ces propos ont été tenus dans une déclaration faite aux journalistes à l'issue de son entretien avec le chef d'état-major de la force de paix de l'ONU au Liban (Finul), le général Jean-Jacques Fatinet, ainsi qu'avec les chefs du mécanisme mis en place sous l'égide de Paris et de Washington pour vérifier l'application du cessez-le-feu. Emmanuel Macron avait été accueilli à sa descente d'avion à Beyrouth par Nagib Mikati, ainsi que par l'ambassadeur de France au Liban Hervé Magro.
Le président français est arrivé à Beyrouth peu avant 7h pour une visite où il rencontrera divers responsables politiques et militaires libanais. Celle-ci advient une semaine après l'élection du général Joseph Aoun à la présidence de la République du Liban, et quelques jours après la nomination de Nawaf Salam comme Premier ministre.
« Je suis heureux d'être au Liban qui est entré dans une phase nouvelle », a déclaré M. Macron aux journalistes sur place, rapportait un communiqué du Sérail. Il a salué le travail effectué par Nagib Mikati « pendant toutes ces années au service de tous les Libanais, surtout dans la récente période difficile de la guerre. » Il a ensuite rappelé qu'il s'entretiendra avec les membres du comité de surveillance du cessez-le-feu ainsi qu'avec Joseph Aoun, Nabih Berry et M. Mikati de nouveau.
Le président français Emmanuel Macron salue des passants lors de sa visite au Liban, dans le quartier beyrouthin de Gemmayzé, le 17 janvier 2025. Photo Lisa Goursaud/OLJ
Le président Macron et la délégation qui l'accompagne se sont rendus en fin de matinée dans le quartier beyrouthin de Gemmayzé, où ils ont rencontré des volontaires de la Croix-Rouge libanaise, ainsi que des membres d'autres associations humanitaires. Prochaine étape : le centre de don Nation Station, puis l'école des Trois Docteurs, dans le centre-ville.
Vers « un retrait conforme » d'Israël du Liban-Sud
Le Premier ministre sortant a indiqué de son côté avoir discuté avec le président français « des enjeux économiques et de la reconstruction » du Liban, après la guerre destructrice entre le Hezbollah et Israël. Selon Nagib Mikati, le chef de l’Élysée « s'est montré très compréhensif de la situation libanaise et a promis de poursuivre le travail et le soutien au nouveau gouvernement », qui doit être formé par Nawaf Salam.
Concernant le retrait israélien du Liban-Sud et le respect de l'accord de cessez-le-feu, qui arrive à expiration le 26 janvier, M. Mikati a affirmé : « Je pense que les choses vont vers un retrait conforme, à l'échéance fixée. Quant au sujet des violations israéliennes, il sera abordé lors de la réunion du comité d'application de la résolution 1701 » du Conseil de sécurité de l'ONU, qui avait mis fin en 2006 à la guerre entre le Hezbollah et Israël. « Les plaintes nécessaires seront déposées. Il y a des promesses selon lesquelles les violations cesseront avec la fin des 60 jours. J'espère que c'est ce qui arrivera », a lancé le Premier ministre sortant.
M. Macron s'est ensuite rendu au palais présidentiel de Baabda y pour rencontrer son nouvel homologue, élu par les députés du Parlement libanais après plus de deux ans de vacance à la tête de l'État. Emmanuel Macron doit en outre revenir dans le quartier dévasté par la gigantesque explosion au port de Beyrouth le 4 août 2020, où il avait été accueilli en sauveur par une population remontée contre ses dirigeants de l'époque.
Dans sa dernière allocution prononcée ensuite au cours d'une réception à la Résidence des pins, Emmanuel Macron est revenu sur la plupart des thèmes abordés dans son discours à Baabda, assurant que la France n'avait « rien lâché » en ce qui concerne son soutien au Liban.
L'explosion, provoquée par le stockage de plusieurs tonnes de nitrate d'ammonium, avait défiguré la capitale libanaise et fait plus de 220 morts. Le président français était revenu trois semaines plus tard pour arracher à la classe politique un engagement à former un gouvernement réformateur, promesse qu'elle n'a jamais tenue.
En amont de sa visite, Emmanuel Macron a accordé un entretien exclusif à L’Orient-Le Jour depuis l’Élysée. « Le sursaut auquel on assiste au Liban est un espoir incroyable », a entre autres affirmé le président français. Sa visite express de 12 heures coïncide avec celle du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, arrivé jeudi soir à Beyrouth, et il est possible que les deux hommes se voient sur place, selon une source diplomatique française.
Ce déplacement du président français vise à « aider » son homologue Joseph Aoun, élu il y a une semaine après deux ans de vacance à la présidence de la République, et le Premier ministre désigné Nawaf Salam « à consolider la souveraineté du Liban, à assurer sa prospérité et à maintenir son unité », a déclaré l’Élysée. « Au Liban, on est passé en quelques mois d'une situation d’escalade dramatique à une situation d’espoir de possible redressement. C'est une dynamique à laquelle la France a fortement contribué », souligne une source diplomatique française. Elle ajoute que Nawaf Salam, un juge international respecté, « bénéficie d'une aura internationale et représente une vraie figure réformatrice », mais elle estime que « cet espoir » doit encore se concrétiser « avec un gouvernement et des réformes ».
Cet article sera actualisé au cours de la journée.
Macron vient chercher au Liban les miettes de la gloire qu’il a fini par perdre dans son pays, jouant le rôle de maître d’un jeu dans lequel n’a rien à faire sauf le simulacre d’un droit de regard sur les affaires d’un pays indépendant
08 h 00, le 18 janvier 2025