Être libanais, c’est porter sur ses épaules le poids d’une histoire riche, complexe et tumultueuse. C’est vivre dans un pays qui incarne à la fois la beauté d’un paradis perdu et la brutalité d’une réalité souvent chaotique. C’est être le témoin d’une culture millénaire, vibrante et unique, tout en affrontant les crises récurrentes économiques, politiques et sociales. Être libanais, c’est ressentir une fierté profonde pour ses racines, tout en éprouvant une frustration incessante face aux épreuves du quotidien.
Vivre au Liban, c’est comme jouer à un jeu vidéo en mode extrême, mais avec des bugs systématiques. Imaginez un pays à la nature splendide, à la culture foisonnante et à la gastronomie incomparable. Maintenant, ajoutez une poignée de politiciens qui se chamaillent comme des enfants dans une cour de récréation, une économie qui fond plus vite qu’un sorbet sous le soleil et une infrastructure digne du Moyen Âge. Bienvenue au Liban !
Ici, l’électricité est un luxe, l’eau potable une chance et les emplois une chimère. Les jeunes, pleins de talent et d’ambition, rêvent d’avenir. Mais pour beaucoup, le seul rêve accessible est celui d’un visa pour échapper à cette spirale infernale.
Au niveau économique, la situation financière est digne d’un film catastrophe. Imaginez une monnaie qui décide d’être championne du plongeon synchronisé, des prix qui grimpent plus vite qu’une étoile filante et des emplois qui jouent à cache-cache. Oui, c’est notre réalité. Les jeunes rêvent d’avenir, mais le seul « rêve » à portée de main, c’est celui d’un visa pour un ailleurs.
Alourdie par une structure politique, vétuste, basée sur le confessionnalisme, la prise de décision devient compliquée. On dirait un système, droit sorti d’une comédie absurde. Sans président solide, le pays erre comme un cadavre fraîchement décapité. Et que dire de nos dirigeants ?
Une classe politique qui gère le quotidien avec une compétence digne d’un dinosaure qui tenterait d’utiliser un smartphone. Ajoutons à cela un gouvernement protégeant des milices sous prétexte de faire de la résistance.
Pour nous qui avons quitté le Liban, la vie n’est pas nécessairement plus simple, nos vies sont entre deux mondes. Être expatrié, c’est jongler avec la nostalgie, la culpabilité du survivant (pourquoi eux et pas moi ?)
et un sentiment d’étrangeté permanente. On ne sait jamais vraiment si on appartient à son pays d’accueil ou si on finira par revenir pour retenter l’aventure libanaise.
Et pourtant, malgré la distance, le lien reste intact. Le Liban, avec toutes ses contradictions, continue de hanter l’esprit de ses enfants dispersés à travers le monde.
Malgré tout, le Libanais tient bon. Est-ce de la folie ou une forme de résilience unique ? Peut-être un peu des deux. Nous trouvons encore des raisons de sourire dans le chaos, de rêver au milieu de la tempête et de croire qu’un jour, tout ira mieux. La culture, la beauté naturelle, les liens familiaux et amicaux sont des piliers qui soutiennent notre espoir. Nous imaginons un Liban différent, un Liban qui nous ressemble : libre, indépendant, fort et développé. Un pays où nous pourrons enfin vivre et non survivre.
Nous rêvons tous d’un avenir meilleur, ce rêve, nous le portons comme un flambeau, même dans les moments les plus sombres. Un jour, peut-être, ce rêve deviendra réalité. Un Liban où l’électricité ne sera plus une question, où les jeunes ne chercheront pas à fuir, où la justice prévaudra et où la dignité humaine sera enfin restaurée. Un Liban nitrate free où Dieu n’aura pas besoin d’armées, de soldats ou de victoires inutiles. Ce jour-là, être libanais ne sera plus seulement un défi, mais une source inépuisable de fierté.
Dania Georges TYAN
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