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Campus - TÉMOIGNAGES

« Dès que possible, je reprendrai mes cours et poursuivrai ma vie... »

Déplacées de leurs villages, trois étudiantes racontent leur évacuation forcée, leurs angoisses, mais aussi leurs espoirs.

« Dès que possible, je reprendrai mes cours et poursuivrai ma vie... »

Sarah Zeineddine. Photo Sarah Zeineddine

« Nous avons reçu tellement d’informations qu’il nous a été difficile de les traiter », raconte Rayane Kdouh, 26 ans, en évoquant la période qui a précédé son évacuation précipitée de son domicile avec sa famille. Son village, el-Souwané, situé dans le district de Marjeyoun, a « été bombardé dans les toutes premières heures de la guerre », précise-t-elle. Consciente de son incapacité à saisir l’ampleur et la gravité de la réalité vécue, l’étudiante en première année de master en science de l’information et de communication à l’Université libanaise (UL) résume en quelques mots la situation : « Des maisons détruites, des routes bloquées, des connaissances perdues et des menaces pesant lourdement sur les civils. » Elle explique : « C’est difficile de devoir quitter sa maison sans savoir où aller… C’est très lourd. » Actuellement installée à Jiyé avec sa mère et sa fratrie, elle réside chez l’une de ses sœurs mariées. « Au début, nous n’avons pas pris au sérieux l’ordre d’évacuation. J’ai dû abandonner mes souvenirs, mes photos d’enfance, mes vêtements... Les bombardements ont commencé tout de suite après », poursuit-elle. Rayane et sa famille sont restées environ 16 heures et demie sur la route pour un trajet qui dure habituellement environ 75 minutes. « Je n’ai pas pensé à emporter ne serait-ce qu’un morceau de nourriture », précise-t-elle encore. Et d’ajouter : « J’ai pleuré sans réfléchir. J’ai beaucoup pleuré. Une multitude d’émotions m’a envahi tout au long du trajet. » Aujourd’hui, la famille de la jeune fille est éparpillée. « Nous sommes sept dans la famille. Ma mère, mes sœurs et moi vivons à Jiyé. Mon père et mon frère vivent ensemble », confie-t-elle sans donner plus de détails. Un autre changement majeur dans la vie de la jeune fille : son arrêt de travail. « J’enseignais à des élèves après les cours. Aujourd’hui, il est quasiment impossible de poursuivre mon travail », avoue-t-elle, en déplorant « l’absence d’accès facile à l’éducation dans ces circonstances » pour un grand nombre d’élèves et d’étudiants, surtout dans les zones ciblées et dans les autres régions lorsque les établissements d’enseignement se sont transformés en abris pour accueillir les déplacés. « Je ne m’inquiète pas pour moi », précise-t-elle toutefois. « Ce qui m’importe, c’est la sécurité des membres de ma famille », admet-elle, avant d’ajouter, en imputant la responsabilité de la guerre à l’État hébreu : « Nous n’avons pas besoin de lunettes pour voir la vérité. Nous la connaissons par cœur. »

Rayane Kdouh. Photo Ikbal Kdouh

Je crains pour la vie de mes proches

Nour Harb, elle, est étudiante en première année de décoration d’intérieur à l’Université internationale libanaise (LIU). Elle aussi craint pour la sécurité de ses proches. « Je me trouvais avec mon frère qui a 16 ans dans notre village à Kherbet Selm, au Liban-Sud. Mes parents n’étaient pas avec nous, ils sont en voyage », confie la jeune fille de 20 ans. « C’est angoissant, c’est d’une violence inédite », souligne-t-elle encore, en se disant inquiète pour le bien-être psychologique des enfants au Liban. « Je suis préoccupée par la santé mentale de chaque enfant qui vit cette guerre et qui perd un membre de sa famille », avoue-t-elle. Bien qu’elle soit déchirée par la séparation de sa famille et face aux horreurs de la guerre, la jeune fille, qui réside actuellement à Bchémoun chez des proches, estime que « cette crise » l’a rendue « plus forte ». Malgré le fait qu’elle se retrouve sans revenu aujourd’hui, elle qui travaillait dans un centre de beauté avant le déplacement, garde espoir. Et ses études ? « C’est impossible en ce moment », répond-elle, en ajoutant qu’elle rêve de reprendre le chemin de la faculté. Pourtant, la jeune étudiante demeure positive : « J’espère que le Liban restera fort et qu’il surmontera cette épreuve. »

Nour Harb. Photo Oumama Harb

Nous rebâtirons nos maisons, nous retournerons sur nos terres

« Je viens du Liban-Sud d’un village qui s’appelle Safad al-Batikh, à Nabatiyé », se présente Sarah Zeineddine, qui s’est réfugiée avec ses tantes et son oncle à Baabda. La jeune étudiante en première année de master de psychologie à l’UL, campus de Hadeth, poursuit : « Nous n’étions pas préparés. Je me suis précipitée avec mes tantes sans vêtement, ni argent, ni rien. » Pourtant, la jeune fille de 21 ans se veut forte et positive. « Nous surmonterons cette détresse », déclare-t-elle. Évoquant ses beaux souvenirs d’avant la guerre, elle raconte : « Notre maison était chaleureuse avant que nous soyons séparés. Tout a changé. Je vis actuellement à Baabda, et mes parents sont ailleurs. » « Étudiante en psychologie, je me préparais mentalement tout en aidant mon entourage à accepter les circonstances et les événements », confie-t-elle. « Nous vivons en guerre depuis 12 mois, et durant cette période, je n’ai jamais cessé d’assister à mes cours ni de me rendre à la faculté », insiste-t-elle. Malheureusement, ce n’est plus le cas actuellement. « Dès la réouverture de l’université, j’y retournerai comme d’habitude et je poursuivrai ma vie », affirme-t-elle, avant de confier : « Ce qui nous brûle réellement, c’est de retourner chez nous et de prendre conscience de la perte d’un être cher... » Pour elle, le plus difficile reste « de faire son deuil sans pouvoir participer à un rite funéraire ». Pourtant, c’est sur une note d’espoir qu’elle conclut : « Le peuple du Sud est résilient. Il saura traverser cette épreuve. Nous rebâtirons nos maisons et retournerons sur nos terres. »


« Nous avons reçu tellement d’informations qu’il nous a été difficile de les traiter », raconte Rayane Kdouh, 26 ans, en évoquant la période qui a précédé son évacuation précipitée de son domicile avec sa famille. Son village, el-Souwané, situé dans le district de Marjeyoun, a « été bombardé dans les toutes premières heures de la guerre », précise-t-elle. Consciente de son incapacité à saisir l’ampleur et la gravité de la réalité vécue, l’étudiante en première année de master en science de l’information et de communication à l’Université libanaise (UL) résume en quelques mots la situation : « Des maisons détruites, des routes bloquées, des connaissances perdues et des menaces pesant lourdement sur les civils. » Elle explique : « C’est...
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Marie Claude

08 h 12, le 17 octobre 2024

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    Marie Claude

    08 h 12, le 17 octobre 2024

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