Dans le sillage du travail musical et intellectuel de son père sur le sujet de la paix entre Palestiniens et Israéliens, Michael Barenboim s’engage à son tour en faveur des habitants de Gaza et de la cause palestinienne. Voix rare dans le monde de la musique classique, le fils du célèbre pianiste et chef d'orchestre Daniel Barenboim, violon solo du West-Eastern Divan Orchestra, est soudainement réapparu sur les réseaux sociaux ces derniers jours, dans des extraits vidéo largement partagés et salués, dans lesquels il dénonce les horreurs à Gaza.
Ces clips sont réapparus alors que de grands mouvements de contestation anti-gouvernementaux ont secoué Israël la semaine dernière, pour réclamer un accord sur la libération des otages toujours aux mains du Hamas, après que les corps de six d'entre eux ont été retrouvés dans un tunnel de Rafah, dans le sud de l'enclave, le 31 août.
Ces vidéos reprennent des extraits d'une conférence donnée à Berlin en février 2024 à l’Académie Barenboim Saïd, fondée en 1999 en l'honneur de son ami l'intellectuel palestinien Edward Saïd par Daniel Barenboim, afin de réunir des instrumentistes venant d’Israël, de Palestine et des pays arabes voisins. Une de ses interventions, dans laquelle il dénonce les horreurs de la guerre à Gaza et rejette catégoriquement ce que représente Israël au sein de la communauté juive, a été massivement partagée : «Israël essaie d'apparaître comme la seule représentation de la judéité, ce qui est complètement faux. [...] En tant que juif, je ne veux pas être représenté par Israël, bien au contraire».
« Les Palestiniens souffrent de quelque chose que les Allemands ont fait il y a 80 ans »
Il a également déploré la difficulté de pouvoir aborder publiquement cette question de la façon dont il le fait en Allemagne, en raison du passé douloureux de son pays sous le régime nazi : « L'histoire allemande est pleine d'horreurs, mais le peuple palestinien n'est pas responsable de cela. Ils n'ont rien à voir avec la Shoah. Pourquoi impliquer les Palestiniens dans cette histoire si nous, Allemands, avons une conscience coupable ? Il n'y a aucune raison que les Palestiniens souffrent de quelque chose que les Allemands ont fait il y a 80 ans. »
Cette remise en perspective historique des massacres menés par l'armée israélienne dans l'enclave palestinienne et en Cisjordanie occupée depuis l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023 a ainsi été saluée par de nombreux internautes : « Il y a des gens qui comprennent vraiment ce que signifie 'plus jamais' », en référence au slogan souvent utilisé pour parler du génocide des juifs mené par l'Allemagne nazie durant la Seconde Guerre mondiale alors que la Cour internationale de Justice (CIJ) avait ordonné au gouvernement israélien de « prendre toutes les mesures » pour prévenir les actes de génocide à Gaza.
« Chaque jour, je me réveille, je prends mon téléphone et je regarde combien de centaines de Palestiniens ont été tués aujourd'hui. [...] Je n'arrive pas à comprendre pourquoi la demande pour un cessez-le-feu immédiat ne fait pas consensus en Allemagne et dans le monde occidental », a-t-il ajouté.
« Un vrai humanitaire »
Sur les réseaux sociaux, les internautes, qu'il s'agisse d'activistes pro-Palestiniens ou non, ont repris en masse certains extraits, saluant « une conversation très intelligente ». « Michael Barenboim, un juif allemand, un musicien à la tête d'une académie, l'a dit en premier ! Merci ! C'est ce que nous ressentons tous. Merci de rester en Allemagne », a écrit une autre utilisatrice de X, tandis qu'un troisième saluait « un vrai humanitaire, qui défend la vérité et la justice ».
En réaction, plusieurs comptes pro-israéliens ont estimé que le musicien faisait de la « désinformation », lui reprochant, comme cela est massivement le cas des défenseurs de l'État hébreu, de ne pas mentionner l'attaque du 7 octobre. Dans un extrait de la vidéo consulté par L'Orient-Le Jour, le violoniste évoque l'attaque et dit en avoir discuté avec les étudiants de son Académie le 9 octobre dernier.
En juillet dernier, Michael Barenboim a créé un collectif d'artistes baptisé « Make Freedom Ring », notamment composé de musiciens libanais, qui organise des concerts afin de récolter des fonds pour les Palestiniens. « Nous sommes des musiciens et artistes qui souhaitons attirer l’attention sur la situation terrible à Gaza et en Palestine. Nous élevons ainsi une voix qui est sinon inaudible dans notre domaine », avait expliqué Michael Barenboim, qui regrette que les musiciens ne s’engagent pas davantage sur le sujet, tout en insistant sur le nombre important de juifs qui soutiennent les droits des Palestiniens et dénoncent le non-respect du droit international et des droits humains à Gaza.
L'un des plus fervents d'entre eux n'est autre que son père, Daniel Barenboim. Le pianiste et chef d'orchestre virtuose israélo-argentin de 81 ans avait été nommé « messager de la paix » de l’ONU en 2007 par Ban Ki-moon, ancien secrétaire général de l'ONU, avant de diriger un concert historique à Gaza en 2011, dans le sillage de celui donné à Ramallah en Cisjordanie occupée en 2005. Il est détenteur depuis 2008 d'un passeport d'honneur palestinien.
"C'est une maladie très connu malheureusement", souvent des gens de gauche : "jüdischer Selbsthaß" étudié au XIX et XX ème siècle, la haine de soi juive.
14 h 55, le 09 septembre 2024