
Un enfant près d’un frigo vide au Liban, dans un contexte de grave crise. Photo d’illustration Ibrahim Chalhoub/AFP
Un rapport publié par l’Unicef lundi sur l’alimentation des enfants au Moyen-Orient et en Afrique du Nord entre 2021 et 2023 révèle que les enfants vivant au Liban sont victimes soit de malnutrition, soit d’une alimentation pauvre en matières nutritives qui conduit certains à souffrir de surpoids. Des tendances aggravées par la crise économique qui sévit dans le pays depuis 2019.
L’Unicef rapporte que la malnutrition est à la baisse de manière générale parmi les enfants au Liban, mais qu’elle reste élevée parmi les petits réfugiés syriens, dont 17 % souffraient de malnutrition en 2013, contre 25 % en 2021. Par ailleurs, l’obésité chez certains jeunes âgés de 5 à 19 ans serait en augmentation à cause d’une alimentation inadaptée et malsaine, explique le rapport, sans plus de détails.
« En raison, en partie, de la crise économique au Liban (...) l’insécurité alimentaire des ménages a augmenté et l’alimentation des enfants de moins de 5 ans a empiré », indique le texte, sans avancer de chiffres spécifiques sur cette tendance. Le rapport explique par ailleurs que le stress vécu par les femmes enceintes au Liban, à cause de la crise que traverse le pays depuis 2019, pourrait conduire à la naissance de bébés en sous-poids.
« La récession économique actuelle au Liban pourrait exacerber les niveaux déjà précaires de la sécurité alimentaire des ménages, car les prix des denrées alimentaires continuent d’augmenter alors que le chômage s’aggrave. Les parties prenantes nationales ont expliqué que les prix des aliments nutritifs ont augmenté de 10 à 15 fois plus par rapport aux prix pratiqués auparavant, poussant de nombreuses mères à réduire leurs propres apports alimentaires pour s’assurer que leurs enfants ne souffrent pas de la faim », poursuit l’Unicef.
La hausse des prix des aliments nutritifs influe par ailleurs sur l’alimentation des enfants et des adolescents au Liban, qui, selon le texte, se tournent vers la malbouffe. Selon l’Unicef, plus de 30 % des garçons et des filles de cette catégorie d’âge étaient obèses en 2015 et l’obésité chez les jeunes de 5 à 19 ans serait en augmentation dernièrement. « Au Liban, l’alimentation des jeunes se caractérise par un faible apport en micronutriments et une forte consommation de sucres et de graisses par le biais d’une grande variété de sucreries, de boissons sucrées et de céréales », poursuit le texte.
Selon l’Unicef, 55 millions d’enfants dans 20 pays de la région, dont le Liban, sont en surpoids ou obèses, et 24 millions d’enfants supplémentaires souffrent de « dénutrition, notamment de retard de croissance, d’émaciation et de maigreur ». « L’aggravation de la crise de malnutrition dans la région est due à la nature et à la manière dont les enfants sont nourris, au manque d’accès aux aliments nutritifs, à l’eau potable, aux soins médicaux et à d’autres services essentiels, ainsi qu’à la prolifération d’aliments bon marché, malsains (...) riches en sel, en sucre et en graisse », ajoute le Fonds.
À cela vient s’ajouter un contexte de « conflits permanents, d’instabilité politique, de chocs climatiques et de hausse des prix des denrées alimentaires qui, ensemble, privent les enfants de leur droit à une alimentation nutritive et limitent l’accès de l’aide humanitaire aux populations vulnérables ».
Un enfant sur trois souffre de malnutrition
Au niveau régional, le rapport de l’Unicef met en garde contre une « crise qui s’aggrave » dans un contexte de conflits et de changement climatique. « Au moins 77 millions d’enfants, soit un sur trois, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (MENA) souffrent d’une forme ou d’une autre de malnutrition », a indiqué le Fonds des Nations unies pour l’enfance dans un communiqué.
« Seul un tiers des enfants reçoit des aliments nutritifs », a déclaré la directrice régionale de l’Unicef pour la région MENA, Adele Khodr. Qualifiant cette proportion de « choquante en 2024 », elle estime que celle-ci « risque de s’aggraver encore avec la persistance des conflits, des crises et des autres défis » dans la région.
Selon un rapport publié en juillet par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et d’autres agences onusiennes, 733 millions de personnes ont souffert de la faim en 2023, soit 9 % de la population mondiale.
Environ 2,3 milliards de personnes sont par ailleurs considérées comme étant en insécurité alimentaire modérée ou forte, c’est-à-dire devant sauter un repas occasionnellement. Et plus d’un tiers de la population mondiale ne peut pas s’offrir une alimentation saine, dont 72 % des habitants des pays les plus pauvres.