Mercredi, des médias libanais ont rapporté que des avions de chasse israéliens ont utilisé pour la première fois depuis le début du conflit avec Israël en octobre les munitions les plus lourdes lors d'une frappe aérienne sur le village de Kfar Kila au Liban-Sud. Une frappe qui a détruit quatre habitations à la fois, sans faire de victimes.
Selon la chaîne israélienne Channel 14, l'armée israélienne a affirmé qu'il s'agissait d'un dépôt de munitions visé, ce qui a provoqué une forte explosion inhabituelle. Le quotidien libanais an-Nahar, citant des rapports de « médias israéliens », a écrit pour sa part que les munitions utilisées étaient des bombes MK-84 équipées de systèmes de guidage GBU-31 JDAM (Joint Direct Attack Munition).
Les munitions MK-84 JDAM
Selon le site web de l'armée de l'air américaine, le MK-84 est une bombe polyvalente de 2 000 livres qui, lorsqu'elle est modifiée à l'aide d'un kit JDAM, produit par l'entreprise Boeing, qui comprend un empennage guidé par GPS, devient une munition intelligente à guidage de précision. Cette modification améliore considérablement la précision de la bombe, ce qui lui permet de frapper des cibles avec une grande précision, même dans des conditions météorologiques défavorables. Selon l'armée de l'air US, les JDAM améliorent la précision des bombes non guidées jusqu'à une erreur circulaire probable (ECP) de cinq mètres ou moins lorsque des données GPS sont disponibles. Dans le cas contraire, le JDAM peut encore atteindre une ECP de 30 mètres ou moins.
Des munitions JDAM déjà utilisées au Liban
Selon le Guardian, des munitions équipées de JDAM (de fabrication américaine) ont été utilisées lors d'une attaque le 27 mars dernier à Hebbariyé, au Liban-Sud. Cette frappe avait visé un centre de secouristes, tuant sept d'entre eux. Les restes des JDAM, y compris des fragments du système de guidage de la bombe, ont été analysés et vérifiés par le Guardian et Human Rights Watch. Selon leur rapport, l'arme utilisée à Hebbariyé était constituée d'un GBU-12 et non d'un GBU-31. L'étude « Learning from Lebanon » publiée en 2012 par l'US Naval War College Digital Commons indique que lors des frappes israéliennes sur la banlieue sud de Beyrouth pendant la guerre de 2006, une quinzaine de bâtiments du quartier général ont été détruits par une bombe de 2 000 livres, des GBU-31 JDAM assistées par satellite et lancées par des avions de chasse F-15I. « Un deuxième complexe ciblé, composé du quartier général et de la résidence personnelle du chef du Hezbollah Hassan Nasrallah avait été touché par quarante JDAM en l'espace d'une minute. Un haut responsable israélien avait confirmé par la suite que Nasrallah lui-même était la cible de cette attaque », peut-on lire dans l'étude.
Les bombes MK-84 lors de récentes attaques
Selon le site turc Yetkin Report, des avions de guerre israéliens ont largué, le 10 août, trois bombes MK-84 sur un bâtiment du quartier de Daraj à Gaza qui abritait des centaines de Palestiniens déplacés par le conflit. Le bâtiment, qui fait partie de l'école al-Tabi'in, était alors utilisé comme abri. L'attaque, qui s'est produite à l'heure de la prière de l'aube, a fait au moins 100 morts. Selon ce site, la MK-84 est connue comme la bombe la plus lourde que les avions F-16 peuvent transporter. La Turquie, qui a condamné l'attaque en la qualifiant de « nouveau crime contre l'humanité » commis par Israël, a suggéré que les États-Unis, en tant que fournisseurs de ces armes, étaient complices en ne prenant pas de mesures pour mettre fin à la violence.
Si les JDAM sont conçues pour améliorer la précision du ciblage, l'énorme puissance explosive de la MK-84 peut malgré tout entraîner des dommages collatéraux importants, en particulier dans les zones densément peuplées.
Violations des droits de l'homme
Selon un article du Wall Street Journal publié en mai, le gouvernement américain a reporté la vente de 6 500 munitions JDAM à Israël dans le cadre du conflit qui l'oppose à Gaza. La décision d'envoyer des JDAM à Israël a suscité des critiques sur la politique d'armement d'Israël de l'administration Biden, certains alléguant qu'elle pourrait enfreindre les lois américaines interdisant l'aide militaire aux nations engagées dans des violations des droits de l'homme.
Le bombardement prolongé de Gaza par Israël, à la suite de l'attaque du Hamas du 7 octobre qui a tué environ 1 200 personnes, a fait de nombreuses victimes, dont près de 40 000 morts et près de 100 000 blessés à ce jour. Israël est accusé de génocide par la Cour internationale de justice, ce que Tel-Aviv nie.
Le Hezbollah et Israël se livrent parallèlement à un échange quotidien d'attaques depuis le 8 octobre, date à laquelle le parti chiite a lancé des missiles à partir de nombreux villages du Sud, dont Kfar Kila. Ces hostilités ont fait 547 morts au Liban, en majorité des combattants, selon le dernier bilan du ministère libanais de la Santé. En Israël et sur le plateau du Golan occupé, 22 militaires et 26 civils ont été tués, selon les autorités israéliennes.