Critiques littéraires Roman

L’apprentissage de la beauté à travers les yeux de Mona

L’apprentissage de la beauté à travers les yeux de Mona

Les Yeux de Mona est un phénomène éditorial : il a été traduit dans une trentaine de langues avant même sa parution en France ! Écrit par Thomas Schlesser, historien de l’art et professeur à l’École polytechnique, il propose une initiation à la beauté et à la vie…

L’histoire de ce roman est simple : Mona, une fillette de dix ans, est brusquement victime d’un AIT, un accident ischémique transitoire, qui risque de l’aveugler pour toujours. Son grand-père Henry, un homme cultivé et fantasque, décide alors de l’initier aux chefs-d’œuvre de la peinture afin qu’elle emmagasine ces images dans sa mémoire, avant que l’obscurité ne l’empêche de les admirer. Chaque mercredi après l’école, il l’emmène au Louvre, au Musée d’Orsay et à Beaubourg pour lui faire découvrir les œuvres de Botticelli, Raphaël, Léonard de Vinci, Michel-Ange, Goya, Courbet, Manet, Monet, Cézanne, Kahlo, Magritte, Klimt ou Kandinsky – dont les reproductions ornent la jaquette dépliable du livre pour permettre au lecteur de mieux les visualiser. Happée par le spectacle d’un tableau ou d’une sculpture, Mona s’émerveille, s’émeut et s’interroge. Elle découvre le pouvoir de l’art et apprend le don, le doute, la mélancolie et la révolte…

Le roman de la transmission

Ce qui frappe dans Les Yeux de Mona, c’est d’abord cette complicité entre la fillette et son grand-père, une belle relation fondée sur l’idée de transmission : « Les éclosions sauraient venir le jour dit, à condition d’avoir tracé les sillons et planté des graines. » Considéré « comme un rouleau compresseur d’expérience du monde et d’érudition tranquille », Henry n’entend pas faire de sa petite-fille un « singe savant ». Pour lui, ce qui importe, c’est qu’elle l’accompagne « là où l’on conserve ce que le monde a fourni de plus beau et de plus humain… Si par malheur, Mona devenait un jour aveugle à jamais, elle jouirait au moins d’une sorte de réservoir au fond de son cerveau, où puiser des splendeurs visuelles… »

Placere et docere

L’intrigue de ce roman est au fond bien ténue, voire artificielle : la maladie de Mona n’est qu’un prétexte utilisé par Thomas Schlesser pour déployer ses vastes connaissances dans le domaine de l’art et nous instruire de manière plaisante à travers la conversation qui s’engage dans les musées entre les deux protagonistes, suivant ainsi le précepte d’Horace dans son Art poétique : « Il obtient tous les suffrages celui qui unit l’utile et l’agréable, et plaît et instruit en même temps. » Mais le lecteur ne s’en plaint pas puisqu’il se figure à la place de Mona, en train de (re)découvrir des œuvres impérissables et d’apprendre toutes sortes d’informations relatives à ce qu’elles représentent, leur genèse ou le parcours de l’artiste qui les a composées. Certes, les questions que pose la fillette sont généralement naïves, mais elles s’avèrent parfois révélatrices. Ne dit-on pas que « la vérité sort de la bouche des enfants » ?

À l’issue de cinquante-deux mercredis au cours desquels ils passent en revue cinquante-deux œuvres, les deux complices se retrouvent plus unis que jamais. S’installe alors « la nostalgie des secrets » jusqu’au dénouement final, marqué par toutes ces couleurs à jamais imprimées dans les yeux de Mona.

Les Yeux de Mona de Thomas Schlesser, Albin Michel, 2024, 485 p.

Les Yeux de Mona est un phénomène éditorial : il a été traduit dans une trentaine de langues avant même sa parution en France ! Écrit par Thomas Schlesser, historien de l’art et professeur à l’École polytechnique, il propose une initiation à la beauté et à la vie…L’histoire de ce roman est simple : Mona, une fillette de dix ans, est brusquement...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut