La boucle est bouclée. La prorogation du mandat du commandant en chef de l’armée, le général Joseph Aoun,-censé arriver à expiration le 10 janvier prochain- est acquise, assure à L’Orient-Le Jour une personnalité politique de premier plan. Selon elle, le patriarche maronite, Béchara Raï -qui fait du maintien du général Aoun à son poste dans les circonstances actuelles une question de principe intangible- en a été informé par des délégations récemment dépêchées à Bkerké de la part du président de la Chambre, Nabih Berry, et du Hezbollah.
De même source, on indique que M. Berry a « rassuré » le chef de l’Eglise maronite sur le fait qu’il tiendra une séance plénière de la Chambre durant la première moitié de décembre. Une décision confortée par la disposition affichée par divers blocs parlementaires chrétiens à y prendre part, rompant ainsi avec leur position de principe contre la tenue de séances législatives en période de vacance présidentielle. De toute évidence, il s’agit du groupe des Forces libanaises, qui avait présenté, le 31 octobre dernier, une proposition de loi repoussant d’un an l’âge de départ à la retraite du chef de l’armée, quel qu'il soit. La personnalité citée plus haut précise que le président de la Chambre a fait savoir à Mgr Raï que le retardement du départ à la retraite de Joseph Aoun sera un des points de l’ordre du jour de la séance.
Toujours de même source, on fait état d’un accord tacite entre le président de la Chambre et le Premier ministre sortant, Nagib Mikati, pour proroger le mandat de Joseph Aoun, en Conseil des ministres ou par voie parlementaire. Le chef du gouvernement n’est pas disposé à aller à l’encontre de la volonté de Bkerké à ce sujet. Il entendrait donc, en cas d’échec de la Chambre à adopter une loi allant dans ce sens, soulever la question en Conseil des ministres. Une démarche qui devrait avoir lieu avant la date butoir du 10 janvier.
La personnalité politique citée plus haut est informée des contacts en cours autour de cette affaire, tant sur le plan local qu’au niveau diplomatique, notamment de la part du quintette impliqué dans le dossier libanais (les Etats-Unis, la France, l’Arabie saoudite, l’Egypte et le Qatar). La question de l’avenir du commandement de la troupe était au centre des entretiens de l’émissaire du groupe des Cinq, Jean-Yves Le Drian, avec les responsables libanais, la semaine dernière à Beyrouth. L’ex-ministre français des Affaires étrangères a même ouvertement plaidé pour la prorogation du mandat de Joseph Aoun.
Le Hezbollah et le quorum
Quid du Hezbollah, coincé entre son souci de préserver la stabilité de l’armée en ces temps de guerre au Liban-Sud, et sa volonté de ne pas se mettre à dos son allié chrétien de longue date, le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil, fortement hostile au maintien du général Aoun à son poste ? Le parti chiite n’a pas encore dit son dernier mot. Il ne le fera qu’à la dernière minute, croit savoir la personnalité. Il reste que le Hezbollah ne fera pas face à la volonté de la majorité des chrétiens dans ce dossier, et ne contribuera pas à favoriser le vide dans un troisième poste réservé à cette communauté (après la présidence de la République, en octobre 2022, et le poste de gouverneur de la Banque centrale, depuis juillet 2023) . Cette position médiane pourrait se traduire par la décision d’assurer le quorum requis pour la tenue d’un Conseil des ministres ou de la séance parlementaire. Une façon de concrétiser le récent rapprochement entre le parti de Dieu et Bkerké.
De son côté, Béchara Raï ne lâchera pas cette affaire avant que le mandat de Joseph Aoun ne soit effectivement prorogé. De quoi assurer la couverture chrétienne à une telle décision, qu’elle soit prise par le gouvernement ou par le Parlement. « Le mandat sera prorogé. Et ce n’est plus qu’une question de temps », tranche la personnalité politique. Et deux scénarios sont préparés pour parvenir à ce but », conclut-elle.
" Par le biais soit du Parlement soit du Conseil des ministres". La Constitution interdit au Parlement de légiférer en période de vacance présidentielle. :a "législation de nécessité" est une invention berryiste que la loi fondamentale ignore totalement. Seule l'option du gouvernement est valable.
07 h 16, le 06 décembre 2023